Nourris, logés,
rémunérés et ce, pour faire avancer la science. Le discours
promotionnel est rôdé, mais quelle réalité se cache derrière les
études cliniques sur cobaye humain?
De
l'unité 731 aux camps de concentrations, l'imaginaire des
expérimentations sur sujets humains renvoie aux heures les plus
sombres de notre Histoire contemporaine. Bien entendu, les pratiques
actuelles, en Europe et Amérique du Nord, sont loin des atrocités
de la seconde guerre mondiale, si l'on occulte, toutefois, quelques
rumeurs sur la CIA. Pourtant, les activités, légales, des groupes
pharmaceutiques ne sont pas aussi lisses et immaculées que les murs de
leurs cliniques.
Le
principale reproche rapporté par les usagers concernent les
conditions d'hébergements lors des études longues : l'obligation de
manger la nourriture de l’hôpital, soigneusement dosé mais rarement
bien cuisiné (file:///C:/Users/Hank/Desktop/J%E2%80%99ai%20test%C3%A9%20pour%20vous%C2%A0%20%20cobaye%20pour%20la%20science%20%28et%20l%E2%80%99argent%29%20-%20Rue89%20-%20L%27Obs.htm), l'interdiction de quitter l'établissement, le
rationnement, voir la restriction complète, de la consommation de
produit, tel que la cigarette, le chocolat ou le café. Bien souvent,
même les visites sont réglementés, et le produit testé est
souvent soumis à une clause de confidentialité. Si tous ces
désagréments tiennent à la nécessité de surveiller les
conditions d'expérimentation, elles donnent aux cobayes un
sentiment d'emprisonnement, au quel s'ajoute les difficultés
classiques de la relation entre médecins et patients.
En
effet, une fois admis dans ces centres d'études, vous n'êtes plus
un individu, vous êtes un corps, au service de la science. Votre
identité est souvent résumé, sur une étiquette, en une
contraction de votre nom et de votre prénom, ou pire, par votre
numéro de dossier (http://rennes1720.fr/2012/06/14/jai-deteste-pour-vous-cobaye-de-labo-pour-200-e-658/). Le personnel encadrant l'expérience attend de
vous une complète coopération, pour ne pas dire soumission, et les
médecins prennent à peine le temps d'expliquer ce qu'ils vous font,
ou pourquoi ils le font. Si dans l'enceinte d'un hôpital, au cours
d'un internement à visé thérapeutique, ce genre de comportement
peut se comprendre, le ressenti est très différent, lorsque l'on
vous inocule une substance expérimentale, aux effets secondaires
encore méconnus, et particulièrement lorsque les doses sont
volontairement importantes, pour tester la tolérance du corps à
cette substance. Les cobayes, affaiblis par les prises de sang à
répétitions, abrutis par le manque d'inactivité, peuvent
développer de sévères anxiétés dans ce type d'environnement et,
si par malheur, le personnel médical juge que vos réactions
risquent de compromettre la bonne conduite de l'expérimentation
(votre stress contaminant les autres sujets, par exemple), alors,
libre à eux de simplement vous exclure, avec une infime partie de la
rémunération promise pour seule compensation, preuve supplémentaire
de la marchandisation du corps en cours dans ces établissements.
Bien
entendu, tous ces désagréments figuraient, en petites lignes, et
souvent dans un jargon médical, sur le formulaire de décharge que
l'on vous a fait signer, à la lumière de votre consentement
éclairé. Mais peut on parler de consentement éclairé, lorsque le
montant de la rémunération atteint plus de deux milles euros?
Certes, la somme ne paraît pas énorme, surtout compte tenu des
risques encourus pour votre santé, mais rare sont les témoignages
à déclarer s'infliger pareil traitement uniquement pour les progrès
de la science. Dans la plupart des cas, les cobayes ont besoin de
cette argent, pour leurs loisirs, pour leurs enfants, parfois même,
pour leurs loyers. Il faut être bien naïf pour croire que la raison
n'est pas affectée par la précarité. Ces groupes pharmaceutiques
ne s'y trompent pas : si les publicités pour les essais cliniques
sont omniprésentes dans le métro Montréalais, je doute que vous
en trouviez dans les pages d'un magazine de luxe.
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