vendredi 19 décembre 2014

Critique des essais cliniques

Nourris, logés, rémunérés et ce, pour faire avancer la science. Le discours promotionnel est rôdé, mais quelle réalité se cache derrière les études cliniques sur cobaye humain?

De l'unité 731 aux camps de concentrations, l'imaginaire des expérimentations sur sujets humains renvoie aux heures les plus sombres de notre Histoire contemporaine. Bien entendu, les pratiques actuelles, en Europe et Amérique du Nord, sont loin des atrocités de la seconde guerre mondiale, si l'on occulte, toutefois, quelques rumeurs sur la CIA. Pourtant, les activités, légales, des groupes pharmaceutiques ne sont pas aussi lisses et immaculées que les murs de leurs cliniques. 

Le principale reproche rapporté par les usagers concernent les conditions d'hébergements lors des études longues : l'obligation de manger la nourriture de l’hôpital, soigneusement dosé mais rarement bien cuisiné (file:///C:/Users/Hank/Desktop/J%E2%80%99ai%20test%C3%A9%20pour%20vous%C2%A0%20%20cobaye%20pour%20la%20science%20%28et%20l%E2%80%99argent%29%20-%20Rue89%20-%20L%27Obs.htm), l'interdiction de quitter l'établissement, le rationnement, voir la restriction complète, de la consommation de produit, tel que la cigarette, le chocolat ou le café. Bien souvent, même les visites sont réglementés, et le produit testé est souvent soumis à une clause de confidentialité. Si tous ces désagréments tiennent à la nécessité de surveiller les conditions d'expérimentation, elles donnent aux cobayes un sentiment d'emprisonnement, au quel s'ajoute les difficultés classiques de la relation entre médecins et patients.

En effet, une fois admis dans ces centres d'études, vous n'êtes plus un individu, vous êtes un corps, au service de la science. Votre identité est souvent résumé, sur une étiquette, en une contraction de votre nom et de votre prénom, ou pire, par votre numéro de dossier (http://rennes1720.fr/2012/06/14/jai-deteste-pour-vous-cobaye-de-labo-pour-200-e-658/). Le personnel encadrant l'expérience attend de vous une complète coopération, pour ne pas dire soumission, et les médecins prennent à peine le temps d'expliquer ce qu'ils vous font, ou pourquoi ils le font. Si dans l'enceinte d'un hôpital, au cours d'un internement à visé thérapeutique, ce genre de comportement peut se comprendre, le ressenti est très différent, lorsque l'on vous inocule une substance expérimentale, aux effets secondaires encore méconnus, et particulièrement lorsque les doses sont volontairement importantes, pour tester la tolérance du corps à cette substance. Les cobayes, affaiblis par les prises de sang à répétitions, abrutis par le manque d'inactivité, peuvent développer de sévères anxiétés dans ce type d'environnement et, si par malheur, le personnel médical juge que vos réactions risquent de compromettre la bonne conduite de l'expérimentation (votre stress contaminant les autres sujets, par exemple), alors, libre à eux de simplement vous exclure, avec une infime partie de la rémunération promise pour seule compensation, preuve supplémentaire de la marchandisation du corps en cours dans ces établissements.

Bien entendu, tous ces désagréments figuraient, en petites lignes, et souvent dans un jargon médical, sur le formulaire de décharge que l'on vous a fait signer, à la lumière de votre consentement éclairé. Mais peut on parler de consentement éclairé, lorsque le montant de la rémunération atteint plus de deux milles euros? Certes, la somme ne paraît pas énorme, surtout compte tenu des risques encourus pour votre santé, mais rare sont les témoignages à déclarer s'infliger pareil traitement uniquement pour les progrès de la science. Dans la plupart des cas, les cobayes ont besoin de cette argent, pour leurs loisirs, pour leurs enfants, parfois même, pour leurs loyers. Il faut être bien naïf pour croire que la raison n'est pas affectée par la précarité. Ces groupes pharmaceutiques ne s'y trompent pas : si les publicités pour les essais cliniques sont omniprésentes dans le métro Montréalais, je doute que vous en trouviez dans les pages d'un magazine de luxe.

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