mardi 19 décembre 2017

Conflit de la construction : la traduction d'un grand tournant

Ça y est, on apprenait le mois dernier que le conflit de la construction s’achève [1] ! La ministre du Travail, Dominique Vien, a limité l’objet de l’arbitrage aux enjeux de salaires. Rappelons que, lors de l’imposition de la loi spéciale de cet été, le Gouvernement s’était accordé le droit de dicter les sujets traités si le conflit en arbitrage si le conflit devait s’y rendre.

Toutefois, force est d’admettre que cette grève de cet été reflète bien, d’une part, la cacophonie d’une loi (la loi R-20, votée en 1968 [3] ; et d’autre part, lorsque l’on s’attarde aux revendications de l’Association des contracteurs du Québec (ACQ), les transformations majeures que subit l’organisation du marché du travail aujourd’hui.

Particularités de la loi R-20

L’industrie de la construction a des réalités qui lui sont propres. En plus d’être particulièrement sensible aux aléas de l’économie, son activité fluctue en fonction de la température, du prix des matériaux, et des saisons. Bref, tout travailleur et travailleuse de la construction doit jongler – du moins au début de sa carrière – avec la dure réalité du chômage, par faute d’ouvrage.

Au Québec, c’est la loi R-20 qui régule les relations de travail de ce secteur. À cet effet, celui-ci est l’un des seuls à être régis par décret, et donc, de ne pas être souscrit au Code du travail. Ainsi, il oblige à la fois les syndicats accrédités par ladite loi (FTQ-construction, le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction, le Syndicat québécois de la construction, la CSD-Construction et la CSN-Construction : formant l’Allience syndicale) et les contracteurs reconnus (ACQ), à nommer des représentants-es principaux pour négocier. Toutefois, ses failles sont particulières et engagent des conséquences délétères sur les travailleuses et travailleurs.

Les éléphants dans la pièce : les trois grandes failles d’une loi

Premièrement, elle ne prévoit pas d’article anti-briseur de grève [4], élément non banal lorsque l’on considère – et c’est le deuxième problème – qu’elle ne prévoit pas une clause de solidarité entre les travailleurs-euses [5]. Dit autrement, alors qu’ordinairement au Québec, un mandat de grève engage tout un groupe de syndiqués-ées, dans la construction, celui-ci est un choix individuel, ce qui provoque inévitablement une volonté – à juste titre – de « vider les chantiers » par les travailleurs-euses qui se voient remplacés-ées par des travailleurs-euses en périphérie.

Troisièmement, comme le remarque Eve-Lyne Couturier de l’IRIS [6], elle ne prévoit pas la possibilité d’inclure une clause de rétroactivité dans le cas où la convention collective est signée après son échéance [7]. C’est l’une des principales failles, d’ailleurs bien exploitées depuis quelque temps par l’association patronale : l’augmentation salariale prévue en fonction de l’inflation n’est pas rétroactive à la date d’échéance de la convention, ce qui fait en sorte que les contracteurs ont tout intérêt à faire durer le conflit jusqu’à la fin de la saison, de manière à ne pas devoir couvrir les augmentations salariales [8].

Les évènements du conflit de cet été sont d’une part explicable par ces trois éléments, soit : l’absence de loi anti-briseur de grève, un droit de grève individuel, et l’interdiction d’appliquer une convention collective rétroactivement, ce qui au final, rend le patronat gagnant d’une grève des travailleurs et travailleuses. Faut le faire ! Mais d’autre part, il ne fait nul doute que le conflit traduit les réalités d’une société et de ses institutions en plein changement, et cela en premier lieu à travers le discours de l’État – devenu gardien de l’économie – et en deuxième lieu, par les propos tenus par le patronat, revendiquant davantage de flexibilité.


Un marché du travail en changement : le discours de l’État

« Je veux juste rappeler à tout le monde que le conflit de la construction – et c’est pas anodin – coûte à l’économie québécoise 45 millions $ par jour. […] Moi je souhaite qu’il y ait une entente entre les parties, mais on ne pourra pas laisser l’économie saigner 45 M$ par jour.

Journaliste : Est-ce qu’il y aura une loi spéciale ?
On sera prêt à agir ! [8]

C’est en direct d’Israël que ce curieux échange entre un journaliste et le Premier ministre Philippe Couillard donnait le ton à la grève des travailleurs-euses de la construction qui devenait chaque jour plus probable, les négociations tournant en queue de poisson. Le lundi suivant, après seulement cinq jours, celle-ci fut votée à l’Assemblée nationale et la grève des 170 000 travailleurs de la construction prit subitement fin, pour se transporter en médiation, puis en arbitrage en novembre dernier [9]. L’histoire s’est donc répétée, puisque lors des précédentes négociations en 2013, au moment des renouvellements des conventions collectives[1], le gouvernement du Parti Québécois était également intervenu, brandissant la menace d’une loi spéciale avant même que la grève n’eût été commencée [10]. Au cours des débats entourant l’adoption de la loi spéciale à l’Assemblée nationale, le Parti libéral et la Coalition avenir Québec, tout comme il avait été le cas en 2013 par le Parti Québécois, clamaient les dangers de pertes économiques engendrées par la grève [11].

Bref, en premier lieu, ces huit dernières années – soit lors de l’échéance des deux dernières conventions collectives – l’État s’impose dans le débat au nom de la sauvegarde de l’économie. Désormais, plus question d’autoriser la grève, et ce au nom de la sacro-sainte économie. L’État prend désormais le parti de l’économie sans se soucier des revendications des travailleurs-euses.

Ce discours montre bien le changement de cap de l’État [12]. Car bien que les lois spéciales ont été nombreuse dans cette industrie, force-nous est d’admettre que le discours mis de l’avant, soit celui de l’économie, reflète bien le passage vers un État néolibéral régulateur, acteur dans une mise en compétition des travailleurs-euses entre eux et elles. À ce premier grand changement relatif au discours du gouvernement s’ajoute un deuxième grand changement, à savoir les revendications tenues par la partie patronale, propos inhérents à celui de la flexibilité.

La recherche de flexibilité du patronat

En début d’année, la partie patronale est arrivée avec les mêmes revendications sur la table qui, quatre ans auparavant, avait soulevé les tollés et la colère des travailleurs-euses. L’une de leurs demandes centrales est ancrée dans le discours de la flexibilité. On cherche à acquérir la possibilité d’imposer aux employés-ées de travailler le samedi en cas de journée de pluie, à bénéficier d’horaires flexibles quant aux heures de début et de fin des journées de travail, ainsi que, pour la plupart des secteurs, des taux horaires et possibilités plus avantageux. Ce qui attire notre attention, c’est le discours mis de l’avant, c’est-à-dire de la nécessité de l’incorporation flexibilité dans un marché en compétition, où les contracteurs doivent être à même de « mieux répondre aux demandes des clients commerciaux » [13].

On assiste donc à un conflit traduisant ce tournant politique vers une mise en compétition des entreprises et des travailleurs entre eux, où la loi agit de manière à défaire la solidarité entre les travailleurs-euses, notamment en ne prévoyant pas de loi anti-briseur de grève ni application collective d’un mandat de grève. Également, le discours axé sur la « santé » économique que tient le Gouvernement, combiné au discours de flexibilité de l’ACQ reste confiné dans ce grand tournant : au nom de la croissance et de l’efficience, l’État se permet de mettre fin à une grève votée démocratiquement [14].

Références

[1] Lévesque, Lia (28 novembre 2017). « Arbitrage dans la construction: syndiqués soulagés, entrepreneurs déçus », La Presse, consulté le 17 décembre 2017, en ligne < http://affaires.lapresse.ca/economie/quebec/201711/28/01-5145119-arbitrage-dans-la-construction-syndiques-soulages-entrepreneurs-decus.php>.

[2] http://www.apecq.org/00APECQ/possibilite_travail_pendant-greve_construction-mai-2017

[3] Commission de la construction du Québec, consulté le 15 décembre 2017. En ligne : https://www.ccq.org/fr-CA/M_RegimeRelationsTravail/M01_LoiR-20?profil=GrandPublic

[4] [5] [6] [8]  Couturier, Eve-Lyne (2017). IRIS, consulté le 2 décembre, en ligne : <http://iris-recherche.qc.ca/blogue/comprendre-le-conflit-de-travail-en-construction>.

[7] FTQ-Construction (26 avril 2016). « La FTQ-Construction propose des solutions pour faciliter le déroulement des prochaines négociations », consulté le 17 décembre 2017, en ligne : http://ftqconstruction.org/la-ftq-construction-propose-des-solutions-pour-faciliter-le-deroulement-des-prochaines-negociations/

[8] Gagnon, Marc-André (25 mai 2017). « Grève dans la construction: Couillard prêt à agir dès lundi », TVA, consulté le 15 décembre 2017, en ligne : http://www.tvanouvelles.ca/2017/05/25/greve-de-la-construction-couillard-lance-un-ultimatum

[9] Chouinard, Tommy et Martin Croteau (29 mai 2017). « Construction: un arbitre tranchera à défaut d'entente d'ici le 30 octobre », Radio-Canada, Consulté le 15 décembre 2017, en ligne : <http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-quebecoise/201705/29/01-5102347-construction-un-arbitre-tranchera-a-defaut-dentente-dici-le-30-octobre.php>

[10] (1er juillet 2013). « Construction : la loi spéciale est adoptée, retour au travail mardi », consulté le 17 décembre 2017, en ligne : <http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/621136/construction-greve-loi-speciale>.

[11] Assemblée nationale du Québec (29 mai 2017). Séance de l’assemblée, consulté le 5 novembre 2017, en ligne : http://www.assnat.qc.ca/fr/video-audio/archives-parlementaires/travaux-assemblee/AudioVideo-72763.html

[12] Clin d’œil à : Dardot, Pierre et Christian Laval (2009). La nouvelle raison du monde : Essai sur la société néolibérale, Éditions La Découverte, Paris.
[13] « Les travailleurs de la construction du Québec se préparent à une grève le 24 mai », Radio-Canada, consulté le 19 décembre 2017, en ligne : http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1034177/travailleurs-construction-negociation-menace-greve-24-mai
[14] (11 mai 2017). « Industrie de la construction: l'Alliance syndicale se dote de mandats de grève », Journal de Montréal, consulté le 17 décembre 2017, en ligne : < http://www.journaldemontreal.com/2017/05/11/industrie-de-la-construction-lalliance-syndicale-se-dote-de-mandats-de-greve>.

mercredi 6 décembre 2017

Engageriez-vous une femme enceinte ?


Un article d’Andréanne Chevalier paru le 18 novembre dans Le Devoir se pose la question de l’employabilité d’une femme enceinte et des tabous qui entourent la question. À prime à bord, la question peut soulever un choc pour certains alors que pour d’autres, poser la question c’est y répondre. Cependant, tout ce qui entoure la question de la différence entre les femmes et les hommes sur le marché du travail s’avère être d’une sensibilité. Un directeur d’entreprise interrogé pour répondre à la question dit clairement son point de vue qui va dans le sens d’une incompatibilité entre la période où la femme est enceinte et le fait de postuler pour un emploi. Des arguments comme la perte de temps et le fait qu’il devra engager deux employé(e)s pour combler un seul poste est problématique pour lui. Par ailleurs, il soutient la thèse de plusieurs autres interrogés qui trouvent la question très touchy puisqu’il se trouve dans un dilemme entre son entreprise et l’aspect moral de la question. Un autre directeur soutient que son patron ne serait pas en accord avec la décision d’engager une femme enceinte. Par la suite, des femmes sont aussi interrogées sur la question et leur point de vue est semblable à celui des hommes. Étonnamment, les femmes interrogées ont une tendance vers le scepticisme quant au fait de postuler pour un emploi alors qu’elles sont enceintes. Le fait de débuter un emploi et de devoir abandonner pour un certain moment semble les rendre mal à l’aise et la plupart s’entendre pour dire qu’a la place du patron, elles n’engageraient probablement pas une femme enceinte.
Mais qu’en est-il d’un point de vue légal ? La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse stipule dans l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne que la discrimination fondée sur la grossesse est interdite, notamment à l’embauche. Exercer une telle pratique serait répréhensible de poursuite en justice notamment pour des dommages matériels, moraux et punitifs. En 2003, La Société de l’assurance automobile du Québec a dû dédommager une femme qui avait postulé comme contrôleur routier et elle a réussi à prouver qu’elle n’a pas eu l’emploi puisqu’elle était enceinte. Elle a donc reçu la somme de 37 628,20 $ en plus des avantages sociaux. Un professeur de l’UQAM au Département d’organisation et ressources humaines, Denis Morin, dit que l’embauche de femmes enceintes est une pratique fréquente dans les secteurs syndiqués, les grandes entreprises et la fonction publique. La réticence est plutôt propre à la PME. L’une des hypothèse est le taux de femme travaillant dans ses secteurs qui seraient plus sensibles à la cause.
Les femmes devraient-elles, dans un cas où elles souhaitent travailler pendant leur grossesse, mentionner à leur potentiel futur employeur leur statut ? Pour Denis Morin, l’entrevue est un bon moment pour mentionner à l’employeur le statut de femme enceinte puisque ce serait un moment important quant au contrat psychologique entre l’employé et l’employeur. Cependant, le mentionner en premier lieu n’est pas nécessaire, car une femme ne devrait pas se sentir coupable d’être dans cette condition.
On peut donc affirmer que malgré les avancés sociaux, les différences physiologiques constituent encore une cause des inégalités sociales qui persistent entre les femmes et les hommes. En ce sens, les femmes désirant entamer une nouvelle carrière ou avoir un nouvel emploi et qui sont enceintes se doivent, dans certains cas, faire un choix important puisque trouver un emploi stable et permanent représente un certain défi comparativement à l’homme. On peut donc faire un lien avec la surreprésentation des femmes dans le travail atypique puisqu’il est plus facile pour ses femmes de trouver des emplois temporaires, à temps partiels ou tout simplement un contrat « en attendant ». Encore une fois, la femme est désavantagée sur le marché du travail. Certaines femmes doivent mettre une pause sur leur carrière ou tout simplement reporter le début de celle-ci au détriment de la grossesse.
Par Jérémie Meynard

Lien : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/513322/engageriez-vous-une-femme-enceinte

La croissance et l’emploi dans l’agenda de la Banque de la République d’Haïti (BRH): un épilogue heureux ou une panacée réchauffée ?

« On supporterait tellement mieux nos contemporains s’ils pouvaient de temps en temps changer de museau. Mais non, le menu ne change pas. Toujours la même fricassée. »
(Camus, 1958 : 17)

Sans vouloir jouer les Cassandre ni tomber dans la paramnésie, n’importe quel observateur ayant suivi l’actualité socioéconomique d’Haïti des deux dernières décennies au moins, peut avoir une sensation de déjà-vu face à l’« agenda monétaire pour la croissance et l’emploi » (Lalime, 2017) présenté récemment par la Banque de la République d’Haïti (BRH). 

Des Duvalier aux néo-duvaliéristes de « tèt kale » (PHTK) en passant par « Lavalas » et les gouvernements de transition, ce ne sont pas tant les remèdes pour la croissance et le développement qui ont manqué à la stérile et rabougrie économie haïtienne. On a promis tant de milliards, investi tant de millions, élaboré tant de plans, validé tant de programmes, exécuté tant de projets et mis en place tant de structures de gestion et/ou de pilotage, etc., etc.…Pourtant, le fameux « plan structuré de développement économique », encore appelé « le démarrage », adopté par les américains pour calmer l’indignation nationaliste de Duvalier était présenté dans le message du 22 mai 1963 de ce dernier comme la nouvelle et nécessaire « loi de salut » pour laquelle tous ceux qui aiment Haïti devaient être mobilisés (Pierre-Charles, 1973 : 65). Les Programmes d’Ajustement Structurel (PAS) mis de l’avant par le FMI dans les années 70 et 80 pour appuyer les pays en voie de développement (PVD) dans leur démarche vers la croissance économique ont donné des résultats exactement contraires à cet objectif et évidemment néfastes pour ces pays, tandis que les rémanences des DSRP (Documents de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté) des années 90 et 2000 font encore objet de rudes récriminations. Or, les DSRP n’avaient pas manqué d’annoncer la couleur ; en Haïti tout au moins. En témoigne un article publié dans « Le Nouvelliste » du 18 avril 2007 sous le pompeux titre « Le DSRP : pour un réel développement d’Haïti » ; ou encore le sous-titre de la version indigène du document (DSNCRP) : « POUR REUSSIR LE SAUT QUALITATIF ». 

Plus récemment, la première version de « tèt kale » (mai 2011- février 2016) appelait à s’ « engager entièrement dans le processus de validation du Plan Stratégique de Développement d’Haïti », premier tome d’un document qui, selon les propos signés du président Michel Martelly, décrit :
… les orientations, les choix et les grands chantiers que nous, tous ensemble, avec la collaboration de nos partenaires du développement, devons mettre en œuvre pour une croissance économique rapide et durable visant la création de nombreux emplois, la réduction de la pauvreté sous toutes ses formes, la constitution d’une classe moyenne large et solide, une répartition des fruits de la croissance sur l’ensemble du territoire et la mise en place d’un État de droit assurant la justice et la sécurité à tous. 
Le Premier Ministre Laurent Lamothe de qui émana ce document n’étant pas allé jusqu’au bout du mandat du président, il faudra peut-être attendre l’ouverture des nouvelles campagnes présidentielles haïtienne pour connaitre la suite. Car, il y avait écrit noir sur blanc : « réalisé par nous-mêmes et pour nous-mêmes, sur la base de notre vision et orientations nationales à long terme du développement… ». Bref, chaque nouveau plan annonce la découverte d’une nouvelle panacée mais l’économie demeure stationnaire, sinon moribonde. C’est à croire que la maladie est incurable si le diagnostic à chaque fois établi n’est pas faussé.

L’Agenda de la BRH quant à lui promet de « placer l’économie sur un sentier de croissance soutenue et inclusive ». Il veut, semble-t-il, convaincre. Il dénonce vertement l’orthodoxie de l’équilibre budgétaire.Il a peut-être découvert la règle d’or. Ce n’est pas rien.Va-t-il enfin pouvoir faire sortir Haïti de la pauvreté ? Faut-il enfin croire à un épilogue heureux ? Le moins qu’on puisse souhaiter à cet agenda, c’est une rentabilité de son excès d’optimisme. 

Néanmoins, sait-on combien peuvent coûter la croissance et l’emploi pour Haïti ?Sera-t-on prêt à les payer à ces prix-là ?A-t-on assez justement évalué les enjeux et peut-on être sûr de ne pas se tromper ? A-t-on, par exemple, une connaissance du rapport des principaux acteurs socioéconomiques et politiques du pays avec le travail, la productivité, ou encore l’économie ? Bref, est-il possible de résoudre les problèmes liés à la croissance, l’emploi et le travail en Haïti sans une profonde analyse et une réelle compréhension des processus cognitifs mobilisés par les acteurs haïtiens dans la construction des représentations sociales du travail?

Ce sont là parmi les questions auxquelles il faudra nécessairement répondre, faute de quoi les cent pages de l’agenda risquent de n’être que vœux pieux ; à moins qu’ils servent à stopper l’hémorragie de la jeunesse haïtienne en quête de travail et de reconnaissance vers le Chili.Cela passera nécessairement par des politiques sociales et d’emplois efficaces. Reste à savoir si c’est possible dans ce climat de scandales de corruptions répétés sans un sérieux assainissement de la vie politique haïtienne. En tout cas, si le chômage n’est pas nécessairement un motif de colère, il peut le devenir. Alors, halte !

Bibliographie
1.      Camus, Albert. 1958. Caligula suivi de Le malentendu, Gallimard, Paris, coll. « Folio », no 64. 246 p.
2.      Gouvernement de la république d’Haïti. (2012). Plan Stratégique de Développement d’Haïti, Pays émergent en 2030, [En ligne], http://www.ht.undp.org/content/dam/haiti/docs/Gouvernance%20d%C3%A9mocratique%20et%20etat%20de%20droit/UNDP_HT_PLAN%20STRAT%C3%89GIQUE%20de%20developpement%20Haiti_tome1.pdf. Consulté le 4 décembre 2017 à 20h12.
3.      Lalime, Thomas. 2017. “La BRH présente son agenda monétaire pour la croissance et l’emploi », Radio Télévision Caraïbes, [En ligne], http://lenouvelliste.com/article/175893/la-brh-presente-son-agenda-monetaire-pour-la-croissance-et-lemploi. Consulté le 4 décembre 2017 à 19h43.
4.      Pierre-Charles, Gérard. 1973. Radiographie d’une dictature. Haïti et Duvalier, éditions Nouvelle Optique, Montréal. 205 p.

mardi 5 décembre 2017

« Les réseaux sociaux en entreprise ne font pas recette »

            Dans la société actuelle, les réseaux sociaux font partis des moyens de communication les plus utilisés. Si leur fonction principale est d’échanger, partager des photos et des évènements avec des amis, depuis quelques années ils servent également à des entreprises. En effet, le réseau social d’entreprise (RSE) sert à communiquer, partager des données et créer des évènements au sein de l’entreprise. C’est donc un lieu d’échange professionnel interne où seul les employés et certains partenaires commerciaux ont accès. Le RSE est une innovation importante dans la société de travail moderne puisqu’il apporte énormément de bénéfices aux entreprises : gain de temps, fédération des équipes, augmentation de la productivité, développement de son réseau professionnel, facilite et améliore la communication interne ... Cependant, malgré tous ces avantages et le nombre d’entreprises possédant leur RSE, l’Institut de gestion sociale en ressources humaines (IGS-RH) s’est demandé pourquoi ces réseaux sociaux d’entreprises étaient si peu utilisés par les salariés.

            Il faut savoir que le réseau social d’entreprise a été créé afin que la communication en entreprise soit facilitée et que les informations puissent circuler sans considérer la hiérarchie de l’entreprise. Un professeur de l’IGS-RH a témoigné : « Les entreprises affirment vouloir se débarrasser de la bureaucratie avec le digital comme outil ». Pour cela, ces RSE sont composés de deux groupes : le groupe « Corporate » qui s’occupe de la communication et le groupe « métier » qui partage les informations techniques. Cette organisation a été mise en place afin de renforcer et d’accélérer la compétitivité et l’innovation. On reconnaît là, le néolibéralisme de Dardot et Laval où la compétition et la concurrence sont la base d’un nouveau mode de gouvernement. Cependant, les résultats sont différents voir même, complètement à l’opposé de ce qui était attendu. L’étude révèle que les salariés sont 8,5 fois plus engagées dans des tâches et des dossiers que leur supérieur hiérarchique a posté sur le réseau de l’entreprise, que sur les autres dossiers partagés par d’autre membre de l’entreprise. Principalement trois raisons ont été évoquées durant les témoignages des salariés. D’abord, l’inutilité de l’information et la fiabilité de celle-ci. Ils évoquent le fait que même si l’information peut être utile à leur travail, l’utiliser serait une forme de déloyauté envers leur supérieur hiérarchique. De plus, le système de trace écrite n’est pas en accord avec « la politique du quotidien » qui consiste à passer par son supérieur hiérarchique avant de valider l’information et de prendre une décision. Il est vrai que la relation et la distinction entre employés et employeurs est une des bases de l’histoire du salariat. Cet article nous rappelle également que la sociologie nous apprend que « les interactions entre individus sont dépendantes de la structure organisationnelle dans laquelle elles se déroulent ». Il est dont normal d’obéir à son patron avant de s’attarder sur des sujets proposés par d’autres employés.
            En résumé, nous pouvons dire que les réseaux sociaux d’entreprises illustrent parfaitement la pensée de Taylor quant à l’augmentation et la « scientifisation » de la productivité. En effet, celui-ci suggère dans l’organisation scientifique du travail, la séparation des tâches pour optimiser la façon de faire. On retrouve ce modèle là dans la création de groupes distincts (Corporate et métier) au sein du réseau social d’entreprise. Malheureusement, l’effet attendu est bien différent de l’effet obtenu, et même si le principe du RSE est intéressant, innovateur et que ces avantages sont multiples, les salariés n’ont pas été convaincus, et on peut alors se demander si à l’avenir, les résultats attendus vont pouvoir être obtenus ?

Par Mallaury Rau

Bibliographie 

-       RODIER Anne, « Les réseaux sociaux en entreprises ne font pas recette », Le Monde, mis à jour le 27 novembre 2017, http://www.lemonde.fr/emploi/article/2017/11/27/les-reseaux-sociaux-en-entreprise-ne-font-pas-recette_5221034_1698637.html?xtmc=travail&xtcr=10 , consulté le 28 novembre 2017 

Le travail : on en voit de toutes les couleurs

Dans cet article tiré de L’express emploi, nous avons un aperçu de différents types de situations auquel font face les individus immigrants dans des pays étrangers notamment s’ils sont des individus de couleurs. Être immigrant dans un pays étranger est déjà très difficile compte tenu des barrières culturelles auxquelles ils doivent faire face, mais la différence de couleur de peau rend l’intégration encore plus difficile. Surtout lorsque ceux-ci recherchent un emploi, ils font face à différentes barrières à l’emploi tels que la langue, le racisme, de la discrimination directe et indirecte et une grande difficulté à faire reconnaitre leurs qualifications. Dans l’article on présente des témoignages de personnes ayant subi des discriminations bien que celle-ci ne soit pas toujours directe. En effet à certains moments on ne peut pas parler de racisme mais d’une préférence pour l’identique. Mais d’autre voient leur cv rejeter à cause de leur couleur de peu ou de leurs origines. Et après tout cela il y’a aussi le problème de la reconnaissance des diplômes ; comme il est dit dans l’article : « tous les candidats portant des noms à consonance étrangère sont éliminés. Sauf un, surdiplômé, dont le parcours brillantissime parvient à faire oublier les origines africaines. ». Même en réussissant à obtenir un emploi un immigrant doit montrer des capacités supérieures à celles des autres pour que l’on ne s’arrête pas juste à ces origines étrangères et sa couleur de peau.

 De nombreuse associations antiracisme ont vu le jour pour lutter contre la discrimination raciale ainsi que des politiques contre la discrimination au travail, au Canada par exemple on demande de ne pas mettre de photo sur le cv et la demande d’emploi mais de nombreuses entreprises arrivent encore à rejeter les candidatures d’immigrant.

D’autres entreprises ont adopté ces politiques anti discrimination : « Chez McDonald's, par exemple, on affiche sans détour une politique de recrutement non discriminatoire. Ne serait-ce que parce qu'on tient à ce que les employés ressemblent à la clientèle : « notre intégration dans les quartiers passe par un recrutement local », explique Véronique Bobin, manager des ressources humaines, qui assure que, « dans la tradition américaine, si on a des aptitudes, peu importent les origines». »
 Mais cela ne suffit pas nécessairement, en effet les employés immigrant peuvent subir des « pressions » de la part de leur collègue, vis-à-vis de leur comportement : « Même lorsqu'ils sont engagés, bien des immigrés restent souvent sous pression. Victimes, comme Farid Benzaï, de mauvais jeux de mots : téléacteur chez un câblo-opérateur, il est systématiquement baptisé «Banzaï!» par sa chef d'équipe. C'est drôle au début, mais la répétition mine le moral. ». Même si on est admis dans l’emploi, la différence n’est pas forcément acceptée par les autres. Tout cela pousse les immigrants vers des emplois tels qu’agent d’entretien ou de sécurité qui ne correspondent pas à la vraie valeur de leur diplôme. Parfois ils doivent accepter des emplois dans des domaines très peu rémunéré ou alors très dangereux, des emplois longs et pénibles et dans lesquels il peut y avoir de nombreux accidents.   


Dans tout cela le racisme reste le principal problème auquel sont exposé les travailleurs immigrants. La peur de l’inconnu, la préférence pour l’identique, tout cela peut engendre le racisme et celui-ci peut prendre de nombreuse forme et les travailleurs immigrants doivent en s’adaptant à leur nouveau milieu de vie faire face à toutes ces formes de racisme. Tout de même avec la mondialisation de nombreux secteurs de l’emploi sont plus diversifié dans le choix de leurs employés et ne mette aucune barrière dans leur sélection.

Par Njiki Kinkela Rossi