Depuis le début du mandat du
gouvernement Couillard, le Québec connaît une ère de changements majeurs. De
façon générale, je ne vois pas cela négativement. Le Québec a assurément besoin
de changements. En tant que province sociale-démocrate, l’organisation
politique de nos différents systèmes est primordiale. Les travailleurs
québécois par les impôts qu’ils versent permettent aux citoyens du Québec un
accès égal à plusieurs services. Il est donc nécessaire d’avoir une
organisation étatique structurée et disciplinée pour ainsi mieux optimiser nos
ressources fiscales.
Cependant, il y a deux semaines,
le gouvernement Couillard a commis selon moi une grave erreur, dans son annonce
sur la loi 20 du ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette.
Dans l’article que j’ai choisi « Projet de loi 20 : salaires réduits
pour médecins peu assidus », le journaliste Samuel Auger nous informe sur
le projet de loi 20 que nous propose M. Barrette. Ce projet de loi a comme
objectif premier l’amélioration de l’accès aux médecins de famille au Québec. Selon
M. Barrette, cette réforme est nécessaire pour assurer un bon fonctionnement du
système de santé. Les médecins de famille ne prennent pas assez de patients et
cela serait l’une des causes directes des débordements en urgence.
Deux critères seront utilisés
pour l’évaluation du bon travail des médecins de famille. Ils devront d’abord
prendre en charge un plus grand nombre de patients et devront être plus
accessibles. « Par exemple, un médecin de famille accueille un patient une
fois par année. Mais ce dernier se rend aussi quatre fois à l’urgence pour voir
un autre médecin. Au final, le médecin de famille aura assuré le cinquième du
service et aura un piètre bulletin de 20%. » [1]
Bref, le médecin de famille doit s’assurer d’être le plus accessible possible
pour que son patient puisse le voir directement lorsqu’il a des problèmes de
santé.
M.
Barrette ne voit pas cela comme une forme de punition, mais plutôt comme
l’assurance d’un meilleur accès à la santé pour les patients. Avec l’adoption
de cette loi 20, les médecins de famille devront donc modifier leur technique
de travail, sans quoi ils seront moins bien rémunérés. Pour faire passer sa
réglementation, M. Barrette prône la responsabilité sociale pour inciter les
médecins à changer leur méthode de travail.
Bien
évidemment, l’opposition dénonce ce projet de loi en avançant que ce programme
prône la quantité au détriment de la qualité des services médicaux. De plus,
ceci représente un contrôle excessif de la profession.
De façon générale, les médecins
passent à travers une formation très exigeante. Tout au long de leur formation,
les médecins (7 ans pour les médecins de famille) sont constamment amenés à
être évalués selon de multiples critères. Je pense que ces travailleurs
méritent d’obtenir une grande confiance de la part de notre société sur la
rigueur de leur travail. Les médecins au Québec sont à la base considérés comme
des travailleurs autonomes c’est-à-dire qu’ils : contrôlent leur travail,
contrôlent leur profit et leur horaire. Ils devraient être évalués différemment
non pas par une règle générale réductrice, mais plutôt cas par cas, une loi
générale ne pourra pas améliorer le rendement chez les médecins sans tenir
compte des situations particulières. La pratique de la médecine familiale revêt
en effet diverses formes. Ce projet de loi vient réglementer d’autant plus leur
travail et vient les priver de leur liberté d’action. C’est un contrôle radical
qui n’est pas nécessaire et ne donnera pas un résultat favorable.
Ensuite, contrôler ainsi ces
travailleurs entrainerait une intensification de l’individualisme chez les
médecins et particulièrement chez les médecins de famille. La façon dont le
ministre Barrette tente d’évaluer les médecins ne favorisera pas une entraide
entre les médecins de famille et les médecins spécialistes. La communication
entre médecins sera sans doute moins transparente qu’à l’habitude en raison du
fait que le médecin de famille sera mis sous pression pour voir le plus grand
nombre de patients et être le plus disponible possible pour ces derniers. Dans
le but d’obtenir le même salaire qu’auparavant, le médecin risque de prioriser
son travail selon une approche individuelle plutôt que collective.
M. Barrette tente de faire
fonctionner le milieu de la santé comme une réelle entreprise en régularisant
le nombre de temps que le médecin a le droit de passer avec son patient. Cette
règle générale fait en sorte que le patient n’est pas pris en charge comme un
individu, mais plutôt comme un objet. Ce projet de loi montre vraisemblablement
un manque d’humanisme de la part du gouvernement Couillard et n’est pas très
rassurant dans une perspective de vieillissement de la population.
Bref, ce projet de loi 20 nous
montre, une fois de plus, que le gouvernement Couillard prône la quantité et la
productivité au détriment de la qualité. À plusieurs reprises, le leader de ce
mouvement législatif, Gaétan Barrette, nous a montré son besoin d’arriver
rapidement aux fins, et ce, peu importe les moyens. Il sera bien sûr
intéressant de suivre ce débat et d’y observer les différentes positions prises
par la population québécoise. J’aurais toutefois espéré du gouvernement
Couillard une meilleure planification et une réflexion plus sérieuse de notre
système de santé. L’accessibilité demeure un problème de taille et je doute que
l’actuel projet de loi puisse y remédier.
Virginie L'Heureux
[1] AUGER,
Samuel. «Projet de loi 20 : salaires réduits pour médecins peu assidus»,
Le Soleil, http://www.lapresse.ca, Samedi le 29 novembre.
Source: AUGER, Samuel. «Projet de loi 20 : salaires réduits pour médecins peu assidus», Le Soleil, http://www.lapresse.ca, Samedi le 29 novembre.
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