Le modèle coopératif, une lueur d’espoir
À partir
de l’article d’Alexandre Faille dans la tribune de La Presse faisant l’éloge
des coopératives du Québec suite 21ème Gala Mérite coopératif 2015, je vous
propose une réflexion sur les avenues qu’amène le développement du modèle
coopératif au sein d’une société dominée par le néolibéralisme.
La guerre de tous contre tous
Pour Bourdieu, le néolibéralisme est la destruction des
résistances collectives, l’individualisation des salaires et des carrières et
la culture du tous contre tous. Dardot et Laval renchérissent en affirmant que
l’évaluation comme mode disciplinaire mène à désir individuel d’améliorer ses
performances et à la culpabilisation dans l’échec. Ces derniers ajoutent aussi
que l’État crée de la concurrence, ce qui oblige les individus à choisir et à se
considérer responsable de leur choix. Sous les mots d’ordre réalisme, rigueur
et modernité, nous en venons à naturaliser les pratiques de gestions
compétitrices et à miser sur notre capital humain en tentant d’être l’instrument
de notre succès individuels. Les individus, ainsi atomisés, semblent ne pas considérer
que les gains collectifs résultant des luttes syndicales équivalent les
sacrifices individuelles qu’ils et elles devront faire pour les obtenir. Dans
le capitalisme avancé, les luttes sont multiples. Il faut lutter contre le patronat
qui perçoit les profits de notre labeur, mais aussi, et c’est surtout à cette
endroit que l’on dirige l’énergie des employé(e)s il faut lutter avec les autres
entreprises et nos collègues de travail, pour individuellement atteindre le
sommet de la plus haute pyramide.
Une lueur d’espoir
La
particularité de la formule coopérative renverse en quelques sortes cette logique
en misant sur la solidarité et la coopération. Au Sommet international des coopératives
en 2014, les jeunes coopérateurs témoignaient de leur volonté de créer un monde
global sans frontière en passant : « d'un modèle économique fondé sur
l'accumulation individuelle des richesses et du pouvoir vers un système
poursuivant le bien-être collectif des individus et de notre planète par le
biais de la redistribution des ressources et la propriété collective»[1].
En effet les principes reconnus par l‘Alliance coopérative internationale (ACI) inclus le pouvoir démocratique exercé
par les membres selon le principe d’un membre un vote, la coopération entre
coopérative et l’engagement envers la communauté[2].
Ainsi le mouvement coopératif revendique l’autogestion et applique une
structure qui favorise l’entraide en dépassant le rapport inégalitaire de la
charité.
Faille
nous présente les coopératives honorés en Estrie la semaine dernière. Parmis
elles, je retiens La Frabrique qui s’est vue décerné le prix de la nouvelle
coopérative. La Fabrique est une coopérative de solidarité qui permet à ses membres d’œuvrer
sur des projets d’art ou d’artisanat en ayant accès à une gamme d’outils traditionnels
ou hautement technologiques. La coopérative et ses membres producteurs
offrent des formations diversifiées qui ont pour but de développer le potentiel
créateur de tous et permettent à la communauté sherbrookoise de s’initier à la
fabrication sous toutes ses formes[3]. La Fabrique, qui a d'ailleurs inauguré
ses nouveaux ateliers d'ébénisterie, de mécanique, d'électronique et d'art la
semaine dernière. Le président Julien
Lamarche indique que « Ce que ça me dit, c'est que l'idée de la Fabrique
inspire les gens, ça vient conforter ce volet […]notre plus grande fierté, ce
sont les projets qui émergent de la Fabrique, les gens qui sont heureux de se
découvrir une passion dans la fabrication et les rencontres avec la communauté.»[4]
Rupture et continuité
Bien qu'elles soient gérées par leurs membres, les
coopératives sont des entreprises et doivent faire face à un marché compétitif.
Le fait qu'il 'agisse d'une initiative d'économie sociale peut encourager
certain(e)s consommateurs-consommatrices, mais d'autre aspect tel que le prix
et la qualité des produits peut aussi peser dans la balance. Dans les
entreprises non-coopératives, l'évaluation constante des employé(e)s peut les
amener à s'imposer à eux et elles-mêmes énormément de pression. La
responsabilité que ressentent les employé(e)s face au succès de l'entreprise
est toujours présente au sein des COOP et les membres travailleurs et
travailleuses, pouvant être émotionnellement impliqué(e)s dans leur milieu de
travail, ne sont pas à l’abri du stress de la société actuelle. Il faudrait
voir si ce mode d'organisation permet de créer une contre-culture fasse à
l'individualisme ambiant. Ce modèle est certainement porteur d'espoir. Ces
principes de fondateur de solidarité et de démocratie incitent à considérer le
facteur humain comme l'entendait Elton Mayo c'est-à-dire en prenant en compte
de le vécus des humain(e)s impliqué(e)s dans l'entreprise et non seulement un
élément de productivité. Je crois que d'un point de vue éthique, l'autogestion
est un modèle idéal qui peut très bien fonctionner à petite échelle. Je suis
emballée par les coopératives comme La Fabrique qui s'implique dans leur
communauté. Il faut s'intéresser à ce type d'organisation et voir dans quelle
mesure elles peuvent être des vecteurs de changement social
Pascale Lafrenière
[2]
Qu’est-ce qu’une coopérative ?, collection « outils coop » ,
MDEIE, Gouvernement du Québec, 2000 (mise à jour en avril 2009)
Aucun commentaire:
Publier un commentaire