lundi 9 décembre 2013

Laissé à soi-même pour 7.15$ de l'heure?

Depuis quelques semaines, plusieurs articles sont parus dans les médias de la province concernant les revendications actuelles des employés de la restauration rapide aux États-Unis, notamment une hausse de salaire jusqu’à un taux horaire de 15 dollars de l’heure. C’est normal, vous me direz, considérant l’ampleur que prend la mobilisation au sud de la frontière, qu’on commence à en parler de plus en plus. Dans les médias québécois, toutefois, il n’y a pas la même animosité  dans ceux du pays concerné; on se contente ici d’énumérer les faits, même si les différentes luttes de pouvoir qui se jouent à l’étranger y transparaissent.

Jeudi le 5 décembre eut lieu une grève dont La Presse faisait l’état dans un billet de Jeremy Tordjman, un de leurs collaborateurs situé à Washington. Celui-ci soulève le fait que le salaire horaire minimum des employés de ce secteur n’est que de $7.15, conférant à ceux-ci le même pouvoir d’achat (sinon moindre) qu’à l’époque du Président Truman, considérant l’inflation. Le Président actuel affirme vouloir bien augmenter celui-ci à $9, mais ce dernier fait face à l’opposition non seulement des républicains, mais aussi de l’association nationale de la restauration. Ces derniers présentent la mobilisation présente comme une «opération de communication montée par les syndicats », syndicats qui traditionnellement n’en mènent pas très large dans un pays considéré comme un des berceaux du libre-marché; à ce sujet, donc, la simple syndicalisation dans un établissement de restauration est vue comme quelque chose de quasiment contre-nature. De plus, selon le vice-président de l’association nationale de la restauration «L'industrie de la restauration est une des seules à avoir continué à créer des emplois pendant la récession (...). Une importante hausse des salaires (...) conduirait à réduire le nombre d'emplois créés», essayez donc d’imaginer sa position sur l’effet qu’aurait une syndicalisation massive! Bref, d’un côté comme de l’autre, c’est-à-dire du patronat et des politiciens, les appuis envers les travailleurs de la restauration rapide sont laissés de côté.

Aux États-Unis comme ailleurs, les emplois dans ce secteur sont souvent considérés (à tort comme à raison) comme des « emplois charnières », qu’occupent des étudiants ou des travailleurs qui se retrouvent entre deux emplois ou bien qui en sont aux premiers barreaux de l’échelle. Mais comme le spécifie Tordjman à l’aide d’exemples, cette situation supposée n’est pas toujours représentative de la réalité : un nombre quand même important de travailleurs y font carrière. Il faut donc éviter de faire des généralisations lorsqu’il s’agit d’emplois atypiques (heures coupées, horaires instables) et de mettre dans l’ombre les réalités de ceux qui sont touchés par le manque d’encadrement des conditions de travail dans ce type d’établissements.

Peu importe ce que l’élite politique ou financière semble croire, il y aura toujours des gens qui occuperont ce type d’emplois. Peut-être par manque de moyens, mais la raison importe-t-elle vraiment? Y en a-t-il de mauvaises? Mais surtout, il y aura toujours une demande ainsi qu’une nécessité à ce qu’Il y en ait; comme les éboueurs, par exemple, certains métiers demeurent essentiels et ne bénéficient pourtant pas d’une valorisation adéquate. Quel pays peut espérer prospérer sans qu’il n’y ait de collecte d’ordures ou de restauration? Quel humain peut-il espérer prospérer quand son travail ne lui permet même pas de payer son loyer? 

Yann Clavette Charbonneau


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