mercredi 30 septembre 2015

Quand les salariés reprennent leur entreprise après sa fermeture... solution pérenne ou temporaire ?

Quand les salariés reprennent leur entreprise après sa fermeture... solution pérenne ou temporaire ?

Le 24 mai 2015, un article publié dans le journal « Le Monde » affirmait que 58 anciens employés sur les 186 qui avaient été licenciés par le groupe UNILEVER (ancien propriétaire de l’usine FRALIB) avaient choisi de monter une SCOP[1] pour commercialiser des thés biologiques français.
En effet, l’usine FRALIB produisait du thé pour Lipton et des tisanes pour L’Éléphant. Seulement après la menace d’une délocalisation, les salariés de Gémenos ont occupé le site pendant près de 4 ans, soit plus de 1 336 jours pour se faire entendre et négocier. Unilever a été contrainte de verser aux salariés un dédommagement s’élevant à plus de 19 millions d’euros. L’argent partagé à entre autres permis à monter la SCOP 1336 en souvenir de ces 1 336 jours d’occupation de leur usine.

Après un retour sur le marché du travail assez médiatisé, où même le Président français François Hollande avait soutenu la création de cette SCOP[2], la nouvelle marque de thé 1336 a fait son entrée de façon remarquée et attendue dans les rayons d’un hypermarché d’Aubagne ce vendredi 25 septembre 2015[3]. Ce qui m’a bien entendu réjouie c’est l’élan de soutien de la population, des politiques et du leader syndical de la CGT vis-à-vis de cette création d’entreprise puisque 58 personnes ont, en plus d’avoir créé de l’emploi, retrouvé eux-mêmes un travail. Cependant, j’éprouve une certaine réserve à l’égard des reprises d’entreprises par les salariés, car au vu de certaines expériences passées, l’aventure s’avère être de courte durée.

En 2013, des ex-couturières de Lejaby ont crées « les Atelières » selon le même principe que la SCOP 1336 des ex-FRALIB. L’affaire avait également été médiatisée et soutenue par les pouvoirs publics. A l’époque, c’était Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif qui s’occupait du dossier afin de valoriser le « made in France ». Cependant, en février 2015 la société s’est retrouvée en cessation de paiement et par la suite en liquidation judiciaire[4].

Il est tout à fait légitime que les pouvoirs publics soutiennent les anciens salariés dans cette nouvelle démarche afin de sauver leur emploi et possiblement en créer de nouveau. Cependant, au-delà du souci de « sauver les emplois » de ces ex-salariés; les anciens salariés se voient devenir des chefs d’entreprises avec tous les avantages et inconvénients que cela soulève. En effet, en devenant « les patrons » ces anciens salariés ne sont plus soumis au même régime de cotisation, de retraite ou d’assurance chômage. De plus, sauver de l’emploi c’est un fait, mais en créer d’autres et faire en sorte que la société soit viable et compétitive c’est autre chose.
A mon avis, les anciens salariés qui se voient devenir des chefs d’entreprise devraient d’abord être préalablement mieux informés des avantages et des risques liés à la reprise et/ou à la création d’une SCOP. Surtout, ils devraient être mieux formés aux nouvelles exigences du marché travail, et ce, en fonction de leur nouveau statut au sein de cette nouvelle société.
Et si les salariés échangeaient leur place avec le patron temporairement ? En effet, si chaque salarié pouvait « temporairement » se mettre à la place d’un chef d’entreprise lorsque sa société est prospère ou en situation de licenciement ; cela serait une manière de rendre compte que les décisions ne sont pas toujours évidentes à mettre en place et que la réalité (du marché) peut s’avérer plus complexe. Cela est d’autant plus perceptible dans le cas où l’entreprise possède des actionnaires toujours de plus en plus gourmands.
Finalement, le capitalisme et la globalisation poussent les entrepreneurs à la croissance, la compétitivité seulement, si la société n’est pas suffisamment « armée » le licenciement et la liquidation judiciaire est rapidement exigée.

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