Quand les salariés reprennent leur entreprise après sa fermeture... solution pérenne ou temporaire ?
Le 24 mai 2015, un article publié
dans le journal « Le
Monde » affirmait que 58 anciens employés sur les 186 qui avaient été
licenciés par le groupe UNILEVER (ancien propriétaire de l’usine FRALIB) avaient
choisi de monter une SCOP[1]
pour commercialiser des thés biologiques français.
En effet, l’usine FRALIB produisait
du thé pour Lipton et des tisanes pour L’Éléphant. Seulement après la menace
d’une délocalisation, les salariés de Gémenos ont occupé le site pendant près
de 4 ans, soit plus de 1 336 jours pour se faire entendre et négocier. Unilever
a été contrainte de verser aux salariés un dédommagement s’élevant à plus de 19
millions d’euros. L’argent partagé à entre autres permis à monter la SCOP 1336
en souvenir de ces 1 336 jours d’occupation de leur usine.
Après un retour sur le marché du
travail assez médiatisé, où même le Président français François Hollande avait
soutenu la création de cette SCOP[2],
la nouvelle marque de thé 1336 a fait son entrée de façon remarquée et
attendue dans les rayons d’un hypermarché d’Aubagne ce vendredi 25 septembre
2015[3].
Ce qui m’a bien entendu réjouie c’est l’élan de soutien de la population, des
politiques et du leader syndical de la CGT vis-à-vis de cette création
d’entreprise puisque 58 personnes ont, en plus d’avoir créé de l’emploi,
retrouvé eux-mêmes un travail. Cependant, j’éprouve une certaine réserve à
l’égard des reprises d’entreprises par les salariés, car au vu de certaines
expériences passées, l’aventure s’avère être de courte durée.
En 2013, des ex-couturières de
Lejaby ont crées « les Atelières » selon le même principe que la SCOP 1336
des ex-FRALIB. L’affaire avait également été médiatisée et soutenue par les
pouvoirs publics. A l’époque, c’était Arnaud Montebourg, le ministre du
redressement productif qui s’occupait du dossier afin de valoriser le
« made in France ». Cependant, en février 2015 la société s’est
retrouvée en cessation de paiement et par la suite en liquidation judiciaire[4].
Il est tout à fait légitime que
les pouvoirs publics soutiennent les anciens salariés dans cette nouvelle
démarche afin de sauver leur emploi et possiblement en créer de nouveau.
Cependant, au-delà du souci de « sauver les emplois » de ces
ex-salariés; les anciens salariés se voient devenir des chefs d’entreprises
avec tous les avantages et inconvénients que cela soulève. En effet, en
devenant « les patrons » ces anciens salariés ne sont plus soumis au
même régime de cotisation, de retraite ou d’assurance chômage. De plus, sauver
de l’emploi c’est un fait, mais en créer d’autres et faire en sorte que la
société soit viable et compétitive c’est autre chose.
A mon avis, les anciens salariés
qui se voient devenir des chefs d’entreprise devraient d’abord être
préalablement mieux informés des avantages et des risques liés à la reprise
et/ou à la création d’une SCOP. Surtout, ils devraient être mieux formés aux
nouvelles exigences du marché travail, et ce, en fonction de leur nouveau
statut au sein de cette nouvelle société.
Et si les salariés échangeaient
leur place avec le patron temporairement ? En effet, si chaque salarié
pouvait « temporairement » se mettre à la place d’un chef d’entreprise
lorsque sa société est prospère ou en situation de licenciement ; cela
serait une manière de rendre compte que les décisions ne sont pas toujours
évidentes à mettre en place et que la réalité (du marché) peut s’avérer plus
complexe. Cela est d’autant plus perceptible dans le cas où l’entreprise
possède des actionnaires toujours de plus en plus gourmands.
Finalement, le capitalisme et la
globalisation poussent les entrepreneurs à la croissance, la compétitivité
seulement, si la société n’est pas suffisamment « armée » le
licenciement et la liquidation judiciaire est rapidement exigée.
[1] Pour plus d’information sur
les SCOP, consultez le site internet suivant : http://www.les-scop.coop/sites/fr/les-scop/qu-est-ce-qu-une-scop.html
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