dimanche 2 octobre 2016

Une mine à Malartic ou La politique du travail à tout prix

Peut-être avez-vous déjà entendu parler de Malartic, ville dont la population actuelle est de près de 3200 habitants qui fait constamment les manchettes grâce à la plus grande mine d’or à ciel ouvert au Canada. Celle-ci a fait un grand émoi dans la population de Malartic et les environs avant même d’avoir ouvert ces portes pour avoir relocalisé une grande partie de la ville, dont le centre-ville. Il est désormais notoire que les impacts sur la population de Malartic n’ont rien d’aussi gai que les promesses qu’Osisko leur faisait[1]. Malgré son ouverture il y a déjà 5 ans de cela la mine Canadian Malartic est constamment au centre des débats de la municipalité. Nous croyons que le cas de Malartic reflète un problème sérieux dans les principes de politique du travail à tout prix et devrait donc être le débat de notre société. Puisque le cas de Malartic pose la question du coût social de l’emploi et de l’utilisation des dites « ressources naturelles ».  

Le portrait de Malartic, comme beaucoup de petite ville ou de petit village de région, se présente de manière complexe sur le territoire et semble difficilement accessible à ceux qui ne le côtoient pas d’abord à cause de ce que la presse et les politiciens en font.

Les habitants de Malartic

Si les gens veulent travailler et gagner leurs pains, cela ne veut pas dire pour autant qu’ils doivent le faire au prix de leurs santés, de celle de leurs enfants, ainsi que de celle de l’ensemble des animaux et végétaux qui habitent le territoire. Le fait qu’une poignée de personnes reçoivent de l’argent d’une grande entreprise, qui est en vérité la grande gagnante de cette transaction, puisqu’elle fera de l’argent sur les propriétaires terriens qui lui ont cédé leurs milieux de vie à un prix fixe, puis sur ces travailleurs (souvent les mêmes individus) qui ne seront pas propriétaires de la plus-value issue de leurs forces de travail, sur ce qui était leurs terres. C’est la santé de ces mêmes individus qui habitent à proximité de la mine et celle des générations suivantes qui en sera minée. Les personnes qui vivent aujourd’hui à Malartic et dans le voisinage ne recevront pas tous des « compensations » sous forme de salaire ou de montant fixe pour racheter une maison à l’écart des vibrations, de la poussière et du bruit, dues au dynamitage. Actuellement, un quartier entier de la ville demande encore à être déplacé parce qu’il souffre de cette nouvelle réalité. D’ailleurs, rien ne viendra compenser les dégâts sur les habitants non-humain de Malartic, qui trouveraient peu à faire de morceaux de polymère, lorsque leurs eaux, leurs aires, et leurs nourritures se voient ensevelies sous la poussière.  

Les communautés autochtones

Osisko soutient qu’aucune loi ne lui prescrit de redevances aux communautés autochtones dans le cadre de ces activités, actuelles ou future, à Malartic si ce n’est que de les tenir au courant de leurs décisions. Néanmoins, Osisko fait valoir qu’il y eut discussion et que par conséquent il est plus que rempli sa responsabilité auprès des premières nations touchées par la mine. Trois communautés autochtones des environs, dont celle du Lac-Simon, ne sont pas satisfaites des propositions de la minière. Celles-ci revendiquent un plus grand intérêt pour l’ensemble de l’environnement et s’inquiètent de l’éventuel déplacement de la 117 sur le peu de terre que les gouvernements blancs leur ont cédée. Ils désirent avoir des redevances, comme la population de Malartic, se traduisant entre autres en emplois. Des journalistes s’acharnent à demander à certains des porte-parole de ces communautés quel montant pourrait les faire taire, pourtant ce que ces communautés autochtones veulent et demandent ne peut pas se compenser que par des montants d’argent, c’est ce que leurs porte-parole tentent en vain d’expliquer à des individus qui, comme Ned Goodman (millionnaire, membre de l’ordre du Canada et co-président d’Osisko), ne parlent qu’en termes de dollar[2]. Par conséquent, les groupes autochtones qui ne définissent pas leurs décisions sur le seul appât du gain n’arrivent pas à trouver de terrain d’entente ni de support sérieux auprès des autres acteurs du problème des mines, puisqu’ils ne parlent pas la seule langue du bénéfice.

Pendant ce temps à Malartic…

…Un groupe d’habitant fait une marche pour manifester son plaisir de vivre à Malartic sous les conditions imposées par la mine. À ce sujet, je note cet éclaircissement édifiant, rapporter par Radio Canada « Il y a du monde qui soutiennent la mine, il y en a qui vont soutenir la ville. Il y en a qui vont se soutenir eux autres même, parce qu'ils sont bien à Malartic, et il y en a qui vont marcher pour changer l'image négative que les médias ont parlé de Malartic, avec la poussière, la vibration et tout, il y a beaucoup de monde qui vivent très bien avec ça. Malartic a pris beaucoup d'ampleur. On a connu des années très moroses du côté de l'économie et là, la ville a pris beaucoup de poil de la bête [3]». Il faut ici rappeler que les années difficiles de Malartic sont elles aussi venues après le départ de minière[4] puisque comme toutes les entreprises qui dépendent de l’extraction de ressources limitées, les mines ont un cycle, vont et viennent comme bon leurs semble et sans garantit pour leurs nombreux employés, livrant l’économie de ville et de région entière à elle-même lorsque la ressource est épuisée.

L’argument économique

Quand des projets, comme celui du plan Nord ou celui de Canadian Malartic, voient le jour les gouvernements ne mettent pas de l’avant le caractère éphémère de ces emplois à gros salaire,
qui ne perdurent pas autant que les dégâts environnementaux qu’ils engendrent, laissant pour compte leurs employés et le reste de l’économie municipale. Tout un marché d’offre et de service se développe dans ces villes lors des grandes rentrées d’argent, mais lorsque la moitié de la ville se retrouve sans salaires les magasins ferment peu à peu leurs portes, le prix des propriétés chute, les membres de la communauté doivent désormais se débrouiller sans salaires pour rembourser des hypothèques qu’ils croyaient payer avec des salaires de disons 40 à 150 mille dollars par années. Et c’est ainsi que l’on crée une autre ville fantôme[5] dans le nord du Québec.

Si le gouvernement voulait vraiment améliorer le sort des communautés rurales ainsi que du reste de la société, il pourrait plutôt investir des domaines comme les nouvelles technologies, l’agriculture biologique et l’innovation sociale, créer des emplois qui ne coûtent pas à la nature, qui pourraient faire de nous des innovateurs et qui finalement perduraient et ne disparaîtrait pas à la même vitesse qu’une forêt coupée à blanc.  

Des emplois à quel prix

Les institutions, qu’il s’agisse de nos gouvernements, de nos médias et parfois même de nos familles, semblent souvent s’unir pour dire que la priorité est à l’argent et que pour faire de l’argent il faut travailler. Le travail en vient à former le centre de nos vies, on a une vie d’étudiant(e) où l’on se prépare à travailler, on travaille puis lorsqu’on arrête de travailler on est à la retraite. Mais quelle valeur a vraiment ce travail, et quel prix sommes-nous prêts à payer pour faire plus d’argent ?

Il apparaît que la valeur des territoires ancestraux autochtones est peu d’importance pour les écrivains du free mining act, soit notre gouvernement. La question de l’environnement ne se propose probablement pas plus pour ceux qui développent des mines à ciel ouvert, et qui permettent à une poignée d’individu de devenir millionnaire. Les effets sur la « santé » sociale, physique et psychologique de la ville semblent créer peu d’émoi même au palier municipal. En effet, nombreuses sont les citations rapportées où Martin Ferron,  le maire de Malaric, se prononce pour la minière et contre ceux qui cherchent à recevoir des redevances, même lorsque la minière ne respecte pas ces engagements auprès du gouvernement, de l’environnement et d’un quartier entier.

« Je ne couche pas avec la minière, dit-il. Mais on travaille avec eux par exemple, parce qu'on n'a pas le choix. C'est le partenaire, je dirais. C'est la société qui est en cause là-dedans. On n'a pas le choix d'être en relation directe. »[6]

Le cas de Malartic est l’exemple même de la lutte constante entre les différents acteurs de la société pour définir les conditions de vie et de cohabitations acceptables sur les territoires (ou le territoire global). Il faut redéfinir qu’est-ce que sont des conditions de vie acceptables et pour qui elles doivent l’être.

Si la vie dépend entièrement du salaire aujourd’hui pour être vécu et bien je lève mon chapeau au capitalisme, puis au salariat qui nous auront convaincus que; salir nos rivières et dévorer les souterrains; déplacer, stresser et nuire à la santé des vivants humains ou pas; de ne pas avoir de respect pour les premières nations dont on gruge constamment les terres; et que la vie en générale vaut moins que tous l’or de Malartic.  

Marie-Lou Desjardins






[1] Brisson, G., et al., Effets individuels et sociaux des changements liés à la reprise des activités minières à Malartic : période 2006-2013, Rapport de recherche, Institut nationale de la santé publique du Québec INSPQ, (2015)
article radio Canada plainte des individus an al
 [2] pour mieux connaître les logiques qui guident les actions de Ned Goodman; Kirwin, Susan, Ned Goodman: My commodity is gold, Mining Markets,(2012) lu le 1er octobre 2016 à 
http://www.miningmarkets.ca/news/ned-goodman-my-commodity-is-gold/
[3] Rivard-Boudreau, Émélie, Des citoyens ont marché à Malartic, Radio Canada (2016) lu le 25 septembre 2016 à http://ici.radio-canada.ca/regions/abitibi/2016/09/17/003-malartic-marche-mine-canadian-malartic-comite-malartic-positif.shtml
[4] « Les principales mines qui ont produit à Malartic sont : Canadian Malartic Mines, East-Malartic Gold Mines, Malartic GoldFields Mines ainsi que la Barnat-Sladen Mines. Un total de plus de 8 millions d'onces d'or furent extraits des sols de Malartic.» Malartic(Québec), Wikipédia, lu le 2 octobre 2016  à https://fr.wikipedia.org/wiki/Malartic_(Québec)
[5] À ce sujet vous pouvez lire sur les villes de Gagnon, Joutel,  Labrieville et Val-Jalbert qui furent déserté après la fermeture de mine, d’usine à papier ou d’autre entreprise dont l’économie dépendait entièrement.
[6] Limage Vanessa, 

Canadian Malartic : des citoyens demandent des actions concrètes au conseil municipal, Radio Canada, lu le 20 septembre 2016 à 

://ici.radio-canada.ca/regions/abitibi/2016/02/10/001-conseil-municipal-citoyens-malartic-canadian-mine.shtml

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