mercredi 19 octobre 2016

De la propagande: l'art de désinformer et la fabrique de l'opinion publique

            Dans cet article[1], Noam Chomsky discute de quelle manière les « mass medias » l’on peu à peu expulsé de l’espace médiatique grand public. Il critique cette pratique propagandiste et déplore le caractère antidémocratique de ce contrôle de l’opinion publique. La censure dont Chomsky est victime dans les médias de masse américains n’est qu’un des nombreux exemples de censures et contrôles sur l’opinion publique américaine.

            Je veux faire le parallèle ici avec l’article[2] de Radio-Canada donnant la tribune à l’économiste Pierre Fortin qui affirme qu’augmenter le salaire minimum ferait perdre 100 000 emplois. Ce qui m’a le plus frappé c’est l’omission flagrante de la mise en perspective des énoncés de M. Fortin. En effet, plusieurs études, produites entre autres par l’IRIS[3] [4] [5], viennent mettre à mal les affirmations de M. Fortin. Même si un article[6] publié quelques mois plutôt dans le même média juxtaposait les deux positions, je me demande s’il n’y a pas un lien à faire entre la mobilisation actuelle autour du salaire minimum et la mise en lumière d’un côté plus que d’un autre. Afin de discréditer un mouvement social, ralentir la mobilisation,  décourager l’action, etc., le contrôle de l’opinion publique instrumentalisé par les médias de masse vient jouer un rôle politique insidieux et antidémocratique. Dresser un portrait incomplet, c’est en quelque sorte dresser un portrait erroné. Ce manque d’authenticité dans les pratiques journalistiques est symptomatique de l’information de masse et on peut se demander si la propagande n’est pas la seule et unique raison qui autorise son existence.

            De plus, on peut se questionner sur la légitimité et l’autorité du chercheur lui-même. En sommes-nous encore à considérer comme valeur suprême le discours d’un économiste qui se base sur des théories qui n’ont aucun fondement scientifique ? Dans une discussion[7], Chomsky et Yanis Varoufakis, professeur de théorie économique à l’Université d’Athènes, soulèvent de quelle manière la construction des théories économiques depuis les années 50 est venue influencer les politiques économiques des États et a mené aux crises que l’on a connues. Toutes ces théories étaient basées sur des équations erronées qui ne prenaient pas en ligne de compte le temps et l’espace, par exemple. Pourtant, personne ne tient rigueur à cette « science » des torts qu’elle a causés un peu partout sur la planète et quelques années plus tard on se retrouve encore et toujours avec des théoriciens économiques qui viennent appuyer des décisions politiques ou mettre en garde les acteurs sociaux comme si rien ne s’était passé et comme si leur « science » bien pensante venait expliquer tous les phénomènes sociaux.

            Ce matin à RDI économie, on peut voir le fondateur de Couche-Tard nous faire une leçon d’économie : « ce sont les consommateurs qui devraient payer une hausse du salaire minimum à 15$ de l’heure »[8]. Le mégalomane qui projette d’acheter Seven Eleven, possède une entreprise « qui dégagera le plus haut niveau de revenus dans tout le pays avec plus de 50 milliards de dollars, un chiffre d’affaires plus élevé que celui de la RBC, de Suncor ou de Loblaw ». À son passage à RDI économie, M. Bouchard vocifère sur la place trop importante des syndicats au Québec. C’est sur qu’avec 50 milliards en revenus, il n’est pas facile de payer décemment ses employés et leur donnés des avantages sociaux quelconques… Mais ce qui m’exaspère encore plus, c’est l’idéalisation de cet homme comme modèle du « self-made-man », de la place importante qu’il prend dans les médias et de la fabrication de l'opinion publique opéré par Radio-Canada.

Charles Lavoie




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