dimanche 2 octobre 2016

Les vieilles théories sont comme le vin, meilleures avec le temps

Dans l’article de la Presse, Mobiliser ses employés pour performer, l’auteur Martin Primeau nous présente le point de vue d'un entrepreneur. Nicolas Barazin explique sa vision au sujet de ses employés et de son entreprise. Au tout début, celui-ci explique qu’il a opéré une restructuration de son entreprise et que cela l’a obligée à engager beaucoup de nouveaux employés. Il mentionne qu’il a perdu de la proximité avec son personnel. Du coup, il explique que cela a eu un lien de causalité avec la baisse de productivité de ses employés. Il affirme que ces derniers se démobilisent par rapport à l’entreprise, ce qui fait baisser l’efficacité de celle-ci. Il enchaîne en mentionnant que certains employés qui travaillent dans la chaine de production nuisent à la productivité globale en n’acceptant pas leurs responsabilités. Selon lui, ce comportement crée des délais supplémentaires ce qui le désavantage par rapport à d’autres concurrents. En contrepartie, pour éviter le ¨sabordage¨¸ il tente d’impliquer ses employés dans l’entreprise. Il mentionne qu’on ne peut plus chicaner le personnel. Selon lui, il faut « coacher » les employés (Primeau : 2013). Ainsi, il espère contrer le manque de vigueur de ses ¨vilains¨ employés. Bref, Barazin, prône une culture d’entreprise basée sur l’inclusion du personnel et sur le sentiment d’appartenance de ces derniers pour augmenter la production de son entreprise. Pour se faire, ce dernier les implique dans les prises de décision concernant l’entreprise. Aussi, Barazin explique qu’il investit dans la formation de ses cadres pour que ces derniers soient en mesure de bien gérer la main-d’œuvre. Il finit en mentionnant « qu’avant de mettre en place de nouveaux processus de travail, on va de plus en plus chercher l’approbation de nos employés » (Primeau : 2013).

Il est étonnant, à travers le discours de Barazin, de constater que celui-ci prône le même genre d’argument que certains penseurs d’un siècle passé en ce qui a trait à la gestion du personnel et de l’entreprise. Tout d’abord, le fait d’imputer le manque de productivité de son entreprise à la vaillance de son personnel rappelle étrangement le discours de Frederick Winslow Taylor, un penseur du 20e siècle. En effet, celui-ci affirmait qu’une grande majorité des travailleurs ne tenait pas à être productive au sein d’une entreprise et que cela expliquait le manque de productivité globale d’une entreprise ou même d’une nation (Taylor : 2008[1911] : 5). De plus, le fait que Barazin veut impliquer son personnel dans la prise de décision à un but bien précis. En effet, l’implication du personnel, dans la prise de décision de l’entreprise, a pour but de créer un sentiment d’appartenance chez les travailleurs. Barazin n’est pas très différent d’Elton Mayo qui prônait une gestion des relations humaines pour obtenir un meilleur rendement (Noiseux : automne 2016 [3] : 30). Cette façon de faire ressemble étrangement à de la « manipulation pour faire passer plus en douceur l’organisation scientifique du travail et les côtés, devenus difficilement supportable, du management classique » (Aktouf : 1989 : 528). Aussi, en investissant dans la formation de ses cadres, pour une meilleure gestion des ¨méchants¨ travailleurs, Barazin ramène un des arguments clefs de Taylor. Taylor, à travers sa théorie de la gestion scientifique du travail, prônait une meilleure formation des cadres pour permettre une hausse de la productivité de la plèbe ouvrière (Taylor : 2008[1911] : 3). Il ne faut surtout pas oublier que ce dernier pensait que les travailleurs ne voulaient pas être productifs pour plusieurs raisons (Taylor : 2008[1911] : 5). Bref, il est étonnant de constater que les théories mises en places au vingtième siècle pour bien contrôler les travailleurs sont encore actuelles dans la gestion moderne du personnel.

Jean-François C. Cazes

AKTOUF, Omar. 1989. « Elton Mayo et les sciences du comportement face au management du comportement organisationnel », dans « Le management : entre renouvellement et tradition » , Gaetan Morin Éditeur, Montréal. Pp. 171-179 ; 188-189 ; 539-543.

NOISEUX, Yanick. (Automne 2016). SOL2015- Notes du cours 3, Université de Montréal.

PRIMEAU, Martin. 2013. « Mobiliser ses employés pour performer », dans La Presse [En ligne], <http://plus.lapresse.ca/screens/4aed-f8e0-5170396e-83c8 4fa2ac1c606a%7CGmIagflpsKJO.html>, consulté le 02 octobre 2016.

TAYLOR, F. W. 2008[1911]. « Fundamentals of Scientific Management », dans The Principes of Scientific Management, Forgotten Books. Pp.1-14.

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