L’été 2016 marqua un moment où la
société civile fut bouleversée dans ses fondations les plus profondes. Vous
trouverez, dans cet article, les détails de cet évènement (http://ici.radio-canada.ca/regions/ottawa/2016/07/04/003-un-stand-kiosque-limonade-ferme-faute-permis.shtml).
Jamais Ottawa n’aura connu une journée aussi sombre. En début du mois de
juillet, deux fillettes prirent d’assaut un espace dans un parc près du canal
Rideau pour installer leur kiosque et faire commerce de leur limonade. Cela va
à l’encontre du règlement du parc.
Effectivement, les fillettes
n’avaient pas en leur possession le permis nécessaire pour faire valoir leur
droit de commercer à cet endroit. Elles doivent obligatoirement obtenir
l’approbation par la Commission de la capitale nationale (CCN). Sur l’avis d’un
agent de la CCN, les fillettes ont dû plier bagage et retourner chez elles.
Après que l’histoire est faite sensation sur les réseaux sociaux, la CCN s’est
excusée auprès de la famille de contrevenants et a promis qu’elle allait faire ce
qu’elle peut pour les permettre d’obtenir l’autorisation de vendre leur
limonade dans le parc.
Cette histoire me rend perplexe à
plusieurs niveaux. D’abord, après avoir demandé aux fillettes de partir, la CCN
n’était même pas sûre si l’emplacement en question était sous la législation
fédérale ou municipale. Il y a ici une question essentielle en ce qui a trait
aux partages des pouvoirs et à la différenciation des compétences. Une personne
voulant commercer doit-elle se tourner vers une institution fédérale,
provinciale ou municipale? Est-ce que différents règlements se superposent (on
parle ici d’un kiosque, mais la question peut se poser au niveau plus large)?
La CCN avait affirmé qu’elle allait faire son possible pour accélérer le
processus d’acquisition du permis. Est-ce que cela nous dévoile, comme le
dirait de Soto, les mailles d’un système législatif beaucoup trop lourd pour de
simples vendeurs de limonade ambulants?
En ce sens, je crois qu’il serait
un peu trop fort d’avouer que notre État brime l’esprit entrepreneur des jeunes
de cinq et sept ans en leur imposant un système législatif beaucoup trop
contraignant. Peut-être qu’à cinq ans effectivement cela peut sembler un
labyrinthe sans fin, mais, pour un entrepreneur qu’on dirait « dans la
moyenne », cela ne doit pas s’avérer plus fastidieux que de tenter de
remplir sa première demande pour l’assurance-emploi. Nous sommes effectivement
dans un État où nous avons des règles, où les voitures doivent s’arrêter devant
un feu rouge et où les chiens doivent être tenus en laisse.
Ce qui a vraiment semblé choquer
le public dans cette affaire, c’est l’âge des fillettes. Il est vrai que cela
semble agressif qu’un agent fédéral renvoie chez elle deux fillettes pour
avoir contrevenu au règlement, mais aurait-on eu vent de cette histoire si les
deux fillettes avaient 15, 20 ou 25 ans? Je mettrais ma main au feu que non. Il
semblerait donc acceptable que deux fillettes puissent vendre de la limonade
informellement dans un parc afin de financer leur voyage dans un camp de
vacances. Une forte majorité de gens dirait que cela devrait être
« toléré ». Mais si une femme de 25 ans vendait de la limonade
informellement dans un parc pour « financer » l’école de ses deux
fillettes, ça ne passerait surement pas. Les autorités feraient simplement
appliquer les lois.
Je ne suggère pas que ces deux
fillettes mériteraient une contravention. Je tente simplement de faire
réfléchir sur ce sujet. Vous avez beau être un(e) citoyen(n)e honnête toute votre
vie, si vous avez une contravention pour vous être garé au mauvais endroit au
mauvais moment une seule fois dans votre vie, et bien « sorry body » tu vas payer un ticket
comme tout le monde, peu importe ce que tu inventeras comme histoire.
Nous sommes dans une société très
imparfaite, inégalitaire et impersonnelle.
Maxime Flibotte
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