mardi 3 octobre 2017

Le Québec et les infirmières :

            Une semaine, jour pour jour, espace deux articles apparus dans le Journal de Montréal. Le vendredi 15 septembre, juste avant de commencer mon quart de travail, je ne fus aucunement surprise de voir qu’il est, encore une fois, question de notre système de santé dans l’actualité. Il me semble que la pénurie du corps hospitalier, les heures sans fin données aux infirmières et les restrictions budgétaires n’ont rien de nouveau au Québec. Que ce soit les quarts de travail interminables, dont un 24 h de travail sans arrêt qu’une infirmière de l’hôpital de Saint-Jean dut faire, ou la perte de deux salles d’opération dans un des blocs du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), notre système de santé se doit de prendre de meilleures mesures. À un certain point, on doit s’arrêter, en tant que société, et regarder les méfaits du système. Prendre soin de quelqu’un ne peut pas s’arrêter à un simple service. L’organisation du travail qui est « la somme des moyens employés pour diviser le travail entre tâches distinctes et pour ensuite assurer la coordination nécessaire entre ces tâches » (Mintzberg, 1982) se doit d’être repensée. De nos jours, notre système de santé manque de coordination. Le cas de l’infirmière cité plus haut en est un parfait exemple : passer tout l’après-midi à contacter ses supérieurs afin de se faire remplacer est la définition même d’un manque d’organisation et de coordination des tâches internes. De plus, ajoutons qu’au lendemain du 24 h de travail qu’elle dut faire, on lui accola la mention « d’absence non autorisée » puisque celle-ci ne pouvait pas se rendre à son quart de travail habituel. Ainsi, le travail dans le milieu hospitalier se doit d’être réorganisé à des fins d’efficacité et d’efficience.
            Évidemment, je suis bien consciente que les défis et les enjeux sociaux dans le monde du travail sont nombreux de nos jours : balancer efficacité, efficience et réduction des coûts tout en cherchant un bien-être et un épanouissement dans notre domaine sont loin d’être chose facile. Cependant, autant la psychologie que la sociologie du travail et industrielle ont démontré que chaque cas peut être amélioré. D’ailleurs, le problème social que nous controns à notre époque est le manque de valorisation dans les carrières d’aide, notamment lorsqu’il est question des femmes (Hamrouni, 2012). Que l’on soit éducatrice, gardienne ou infirmière, notre travail est banalisé, comme s’il est naturel pour nous de vouloir aider et prendre soin d’autrui. Cela étant dit, la notion de l’inné et de l’instinct féminin, dit maternel, est prise comme chose courante, naturelle chez la femme. Ainsi, notre société réduit ces carrières à de simples contacts humains. Cependant, n’y a-t-il pas dans chaque travail un effort à donner et du temps de partager. Par conséquent, la visibilité des travailleurs, dont les infirmières, diminue au détriment d’un paradigme social. Malheureusement, cela a pour effet de réduire leur sentiment d’appartenance, de valorisation et crée de grands méfaits quant au bien-être psychologique.
            Parallèlement à cela, nous répétons sans arrêt que nos hôpitaux sont en manque de personnel, mais traitons-nous humainement les employés ? Le système favorise-t-il leur loyauté lorsque, notamment le CUSM, ne peut qu’offrir des postes à temps partiel aux plus expérimentés ? Naturellement, lorsque l’offre d’emploi n’arrive pas à répondre aux demandes dans le secteur de santé, les professionnels iront ailleurs, et ce par le simple concept de l’offre et de la demande. Cependant, à la place de se soucier du budget qu’il faut faire de plus en plus petit, pourquoi ne pas regarder plus loin que les compressions budgétaires ? En se penchant seulement sur l’argent qu’il ne faut pas investir, le problème n’est réglé qu’à moitié, et ce, à court terme. D’ailleurs, employer infirmiers et infirmières, leur mettre des 24 h d’affilé, les épuiser et après leur en demander davantage ne fait que plus de mal que de bien. À long terme, nous ne pouvons plus réduire ces infirmiers et infirmières à de simples êtres donnant un service, il faut les valoriser et prendre soin d’eux dans toutes sphères de leur vie afin qu’ils puissent également contribuer à notre bien-être. Ainsi, je suis poussée à me questionner quant au sérieux des gestionnaires du CUSM. En effet, je suis portée à me demander comment un hôpital d’une telle envergure n’arrive pas à se charger du problème de précarité, et ce, malgré que plusieurs systèmes sont mis en place. Conséquemment, allons-nous vraiment attendre que l’état des patients se détériore pour aller de l’avant ? Repousser la charge, s’en aveugler un moment n’arrangera rien. Le problème de précarité du système de santé québécois se fait sentir depuis bien longtemps et il me semble qu’il est temps d’y trouver une solution. Notez qu’en date du 22 septembre, le Journal de Montréal expliquait qu’un total de 97 075 patients québécois attendent d’avoir accès à une chirurgie (MSSS, 2017).
            Ainsi pour dire, des solutions, il y en a beaucoup! À titre d’exemple, une approche intergénérationnelle (Ermine, 2010), soit celle de l’économie du savoir est, selon moi, une bonne méthode à long terme. En effet, laisser la chance aux plus expérimentés de partager leurs savoirs aux nouvelles infirmières peut remédier au manque de personnel spécialisé, ce qui petit à petit diminuera la fermeture des salles d’opération. Plutôt utopique de ma part, mais n’est pas irréaliste. D’ailleurs, que vaut le serment d’Hippocrate s’il n’y a pas place à l’application ? Les médecins ont besoin d’assistance. En créant se partage précieux, nous donnons la chance à notre société de veiller à son bien-être autant physiquement que socialement. En donnant une chance aux plus qualifiés, nous offrons une force d’avancement technique et sociale à notre société et ça, ça n’a pas de prix, car ayant une place centrale dans la vie des individus, le travail se doit d’être un projet d’épanouissement à temps plein. Assez humaniste comme concept, mais son utilité à été prouvé à mainte reprise, d’où la naissance de la sociologie du travail et de la psychologie industrielle!
                                                                                                         El-Merhebi Lina
Bibliographie :

Mintzberg, H. (1982). Structure et dynamique es organisations. Éditions d’Organisation.
Journal de Montréal. (2017). Une infirmière a travaillé 24 heures d’affiliée. Repéré à http://www.journaldemontreal.com/2017/09/22/penurie-dinfirmieres-au-bloc-operatoire-du-cusm
Journal de Montréal. (2017). Pénurie d’infirmières au bloc opératoire du CUSM. Repéré à http://www.journaldemontreal.com/2017/09/22/penurie-dinfirmieres-au-bloc-operatoire-du-cusm
Ermine, J-L. (2010). Une démarche pour le transfert intergénérationnel des savoirs. Repéré à http://cerberus.enap.ca/Telescope/docs/Index/Vol_16_no_1/Telv16n1_ermine.pdf

Hamrouni, N. (2012). Le care invisible : genre, vulnérabilité et domination (Philosophie Docteur, Université de Montréal, Montréal). Repéré à https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/bitstream/handle/1866/9059/Hamrouni_Naima_2012_these.pdf

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