mardi 17 octobre 2017

Ingénieurs-immigrants cherchent emplois.


L’ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) est sur le point de mettre en place de nouveaux règlements pour permettre aux immigrants de mieux s’intégrer sur le marché du travail. Ils ont pour objectif d’augmenter le taux d’obtention des permis d’ingénieurs pour les professionnels formés à l’étranger, tout en réduisant les délais d’acquisition de celui-ci. En effet, le nombre de permis octroyés à des ingénieurs immigrants a diminuer de manière considérable depuis 2013, il est passé de 34% à 18% en 2017. L’initiative de l’OIQ  à homologuer de nouvelles règles visant une meilleure intégration des immigrants, autorisera une certaine amélioration pour les individus s’établissant au Québec qui se cherche du travail. Or, le permis de pratique, dorénavant plus facile d’accès, n’est pas le seul facteur qui entre en compte lorsque vient le moment pour un ingénieur immigrant de se trouver un emploi au Québec.

            D’abord, le permis junior qui leur ait accordé par l’OIQ, est un droit de pratiquer tout en étant supervisé. Il est donc difficile pour les individus détenant ce genre de diplôme de se trouver un emploi dans une entreprise qui accepte de les chapeauter. Les employeurs ont toutefois d’autres critères d’embauche que les permis, comme le fait remarquer une ingénieure immigrante au Québec, qui fait part de ce constat dans l’article. Fâcheusement, elle à bien raison. Les immigrants, et en particulier les femmes, sont sujets à être victime de discrimination lors des processus d’embauche, et ce, malgré leur expérience, leur statut et leur scolarisation obtenu à l’étranger. Il est possible de confirmer l’existence d’un profilage racial à l’embauche au Québec grâce aux méthodes de testing qui consistent à envoyer des C.V. identiques sous tout rapport sauf que l’un porte un nom de famille de groupe majoritaire et l’autre un nom de famille d’un groupe racialisé. Le candidat franco-québécois à 60% plus de chances d’être convoqué à une entrevue que les autres candidats.[1] Les facteurs d’inégalités qui touchent les immigrants sont multiples  puisqu’ils recoupent en même temps des traits identitaires et des différences de ressources en ce qui concerne l’avoir, le pouvoir ou le savoir. En effet, les immigrants à leur arriver au Québec peuvent se retrouver en déficit de ressources matérielles et peuvent ne pas (ou peu) posséder de ressources sociales et politiques.
  
Découle de la discrimination et de la non reconnaissance des diplômes obtenus à l’étranger, qui est particulièrement forte au niveau des professions réglementées, la surqualification des immigrants. Ils doivent donc souvent se résoudre à accepter des emplois plus modestes. Or, « Une analyse plus fine des données dans la région de Montréal révèle cependant que le principal facteur explicatif n’est pas l’origine étrangère du travailleur ou de son diplôme, mais la couleur de sa peau. Une fois toutes les variables isolées, comme la langue, l’âge, le sexe ou l’expérience professionnelle, on voit que les principaux écarts avec la majorité se trouvent chez les Philippins, les Noirs, les Latino-Américains et les Sud-Asiatiques. »[2] Trouver un emploi s’annonce donc être une tâche difficile et lourde de conséquences pour les immigrants. Il est, à mon avis, déplorable de discriminer un individu en fonction de ses traits identitaires, puisqu’ils sont propres à lui en plus d’être impossible à dissimuler. De plus, comme le souligne une ingénieure immigrante dans l’article, avoir la possibilité d’exercer sa profession d’ingénieure nécessite d’une part la maitrise de l’anglais ou du français et, d’autre part, des contacts dans une entreprise. Un point important est ici relevé puisque les procédures de recrutement supposent un caractère informel, non transparent et peu démocratique. En effet, les immigrants, et en particulier les femmes, manquent souvent d’informations et sont souvent coupés des réseaux, dont l’appui est essentiel pour obtenir un poste ou de l’avancement au sein de l’entreprise.

 Bref, on peut prendre conscience qu’un diplôme n’est pas automatiquement gage d’indépendance pour les immigrants. Les changements apportés par l’OIQ auront-ils un impact? Voici la question qui était énoncé au tout  début de l’article. Selon moi, et à la lumière de ce qui a été brièvement démontré dans le texte, l’OIQ fera, dès mai 2018, un pas positif vers l’amélioration de l’intégration des immigrants ingénieurs sans toutefois enrayer la discrimination subit par ceux-ci. Une remise en question sociétal s’annonce nécessaire. La conscience collective (en admettant qu’il est possible d’atteindre une telle conscience) doit aplanir les préjuger qu’on tous et chacun envers les immigrés. C’est toutefois grâce à des initiatives comme celle de l’OIQ qu’on pourrait un jour, souhaiter arriver à une telle conscience.

Au terme de ce blogue, on peut s’interroger  sur les conséquences qui découle de ne pas avoir d’emploi, ou d’exercer un travail qui n’est pas en congruence avec ses qualifications. En effet, selon Durkheim, c’est par le travail que se passe l’intégration en société. L’absence de travail est alors un facteur d’exclusion sociale. De plus, le travail construit l’identité des individus dans notre société où l’économique est placé au centre de tout. Les immigrants ingénieurs qui ne trouvent pas d’emploi dans leur domaine seront donc contraints de « modifier » leur identité. De plus, selon Locke, le travail est le premier pas vers l’émancipation. Donc, les immigrants, en ne trouvant pas d’emploi sont moins indépendants financièrement et plus dépendants du gouvernement par exemple.
Par Rebecca Choquette
Lien vers l’article : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/508012/ingenieurs-immigrants-cherchent-emploi








[1] Stéphane Moulin (2016), Inégalités : mode d’emploi. L’injustice au travail au Canada, Montréal, Les Presses de l’Université Laval
[2] http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/406630/la-surqualification-professionnelle-en-hausse

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