lundi 30 octobre 2017

Autour des cols bleus

Nous vivons dans un temps où les syndicats ont encore un rôle majeur, mais dont l’utilité aux employés est remise en question. Dans les divers articles en question, c’est le syndicat représentant les cols bleus qui est remis en question. Tout d’abord, il est question de la manière dont agit le syndicat par rapport aux membres de son propre conseil exécutif. En effet, la présidente aurait ordonné d’espionner deux des membres du conseil exécutif en installant un appareil GPS dissimulé sur leur voiture personnelle. Les cols bleus, n’appréciant pas les méthodes utilisées par la présidente, ont « désavoué » celle-ci et son conseil exécutif à 50,6%. Il y a, par la suite, eu un autre vote qui a résulté à la remise en poste de la présidente. La participation à ce vote fut de 15% ce qui est ridiculement bas surtout en comparaison au vote d’élection de la même présidente (Chantal Racette) en 2015 qui était de 62%. Par la suite, le 27 avril 2017, un regroupement de cols bleus créent leur propre syndicat (l’Unité syndicale des cols bleus de Montréal) en opposition à la direction du conseil exécutif du syndicat actuel. La présidente a répondu à ce regroupement par des menaces de représailles.
On remarque clairement que lors de l’élection du nouveau conseil exécutif en 2015, il y avait un mouvement de masse non négligeable aux bulletins de vote. Ce qui démontre la volonté de changement de la part des cols bleus. Certes il y avait un syndicat déjà en place, mais le fait est que les cols bleus n’en étaient pas satisfaits.
Il y a aussi cette volonté de changement lors du désaveu de la présidente, mais il y a rétraction lors du vote de remise en fonction de celle-ci. On le voit avec le taux de vote extrêmement bas. Il y a une certaine indifférence liée au fait que le changement n’a jamais lieu pour le mieux ou qu’il n’a jamais lieu tout court. Il y a ensuite un sentiment d’exaspération menant à la création d’un syndicat alternatif par des cols bleus.
L’évolution temporelle du syndicat des cols bleus est assez intéressante. Tout d’abord on remarque que l’histoire des employés se répète, mais sous une autre variation. La relation patrons-employés est ici retransposée dans la relation syndicat-employés. Il y a un rapport de force démesuré et abus de pouvoir du syndicat. Cet abus de pouvoir n’est pas nécessairement régulé ou bien comprimé. Il y a en effet les instances gouvernementales qui réglementent les agissements du syndicat à l’externe, c’est-à-dire dans la dynamique syndicat-entreprise, mais beaucoup moins dans la dynamique syndicat-employés (syndiqués). Il y a, par contre, contrairement à la relation patrons-employés du temps de l’industrialisation, un ensemble de règles du syndicat limitant ses pouvoirs et en en conférant certains aux employés syndiqués. L’exemple de ça est le vote du désaveu de la présidente du syndicat (vote de confiance). Pourtant, le retour de la présidente à son poste par l’entremise d’un autre vote s’est effectué selon un taux de participation extrêmement bas. Il y a alors cette impression que le syndicat est aveugle par rapport aux employés qui eux, se sentent invisibles (Kracauer). Il y a cette impression que le syndicat ne revendique pas pour l’employé, mais bien par celui-ci. C’est-à-dire que l’employé est plutôt l’objet du combat et non le sujet de celui-ci. Ce sentiment d’invisibilité mène alors à la création d’un syndicat parmi les employés déjà syndiqués. Ce qui est assez semblable à la manière dont les syndicats en général se sont créés, c’est-à-dire par un ras-le-bol populaire envers l’autorité patronale des grandes entreprises. Cette création d’un syndicat alternatif est gérée en quelque sorte de la même façon par le syndicat déjà en place que par les patrons d’entreprises de l’époque face aux employés, c’est-à-dire par les menaces (de représailles).
J’ai de plus en plus de mal à croire que les syndicats, dans la forme qu’elles ont actuellement, peuvent perdurer encore longtemps. Il y a, bien évidemment, trop de divergences entre les intérêts des différents partis concernés par le compromis fordiste pour que le pacte entre ces partis reste solide (ou du moins en partie). Il ne reste plus qu’à voir si le mécontentement des travailleurs syndiqués et la création d’un nouveau syndicat parmi ceux-ci (les travailleurs même) ne représentent que la répétition de l’Histoire ou bien une nouvelle page de celle-ci.
Sami Khalil


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