Nous vivons dans un temps où les syndicats ont
encore un rôle majeur, mais dont l’utilité aux employés est remise en question.
Dans les divers articles en question, c’est le syndicat représentant les cols
bleus qui est remis en question. Tout d’abord, il est question de la manière
dont agit le syndicat par rapport aux membres de son propre conseil exécutif.
En effet, la présidente aurait ordonné d’espionner deux des membres du conseil
exécutif en installant un appareil GPS dissimulé sur leur voiture personnelle.
Les cols bleus, n’appréciant pas les méthodes utilisées par la présidente, ont
« désavoué » celle-ci et son conseil exécutif à 50,6%. Il y a, par la
suite, eu un autre vote qui a résulté à la remise en poste de la présidente. La
participation à ce vote fut de 15% ce qui est ridiculement bas surtout en
comparaison au vote d’élection de la même présidente (Chantal Racette) en 2015
qui était de 62%. Par la suite, le 27 avril 2017, un regroupement de cols bleus
créent leur propre syndicat (l’Unité
syndicale des cols bleus de Montréal) en opposition à la direction du
conseil exécutif du syndicat actuel. La présidente a répondu à ce regroupement
par des menaces de représailles.
On remarque clairement que lors de l’élection du
nouveau conseil exécutif en 2015, il y avait un mouvement de masse non
négligeable aux bulletins de vote. Ce qui démontre la volonté de changement de
la part des cols bleus. Certes il y avait un syndicat déjà en place, mais le
fait est que les cols bleus n’en étaient pas satisfaits.
Il y a aussi cette volonté de changement lors du
désaveu de la présidente, mais il y a rétraction lors du vote de remise en
fonction de celle-ci. On le voit avec le taux de vote extrêmement bas. Il y a
une certaine indifférence liée au fait que le changement n’a jamais lieu pour
le mieux ou qu’il n’a jamais lieu tout court. Il y a ensuite un sentiment
d’exaspération menant à la création d’un syndicat alternatif par des cols
bleus.
L’évolution temporelle du syndicat des cols bleus
est assez intéressante. Tout d’abord on remarque que l’histoire des employés se
répète, mais sous une autre variation. La relation patrons-employés est ici
retransposée dans la relation syndicat-employés. Il y a un rapport de force
démesuré et abus de pouvoir du syndicat. Cet abus de pouvoir n’est pas
nécessairement régulé ou bien comprimé. Il y a en effet les instances
gouvernementales qui réglementent les agissements du syndicat à l’externe,
c’est-à-dire dans la dynamique syndicat-entreprise, mais beaucoup moins dans la
dynamique syndicat-employés (syndiqués). Il y a, par contre, contrairement à la
relation patrons-employés du temps de l’industrialisation, un ensemble de
règles du syndicat limitant ses pouvoirs et en en conférant certains aux
employés syndiqués. L’exemple de ça est le vote du désaveu de la présidente du
syndicat (vote de confiance). Pourtant, le retour de la présidente à son poste
par l’entremise d’un autre vote s’est effectué selon un taux de participation
extrêmement bas. Il y a alors cette impression que le syndicat est aveugle par
rapport aux employés qui eux, se sentent invisibles (Kracauer). Il y a cette
impression que le syndicat ne revendique pas pour l’employé, mais bien par
celui-ci. C’est-à-dire que l’employé est plutôt l’objet du combat et non le
sujet de celui-ci. Ce sentiment d’invisibilité mène alors à la création d’un
syndicat parmi les employés déjà syndiqués. Ce qui est assez semblable à la
manière dont les syndicats en général se sont créés, c’est-à-dire par un
ras-le-bol populaire envers l’autorité patronale des grandes entreprises. Cette
création d’un syndicat alternatif est gérée en quelque sorte de la même façon
par le syndicat déjà en place que par les patrons d’entreprises de l’époque
face aux employés, c’est-à-dire par les menaces (de représailles).
J’ai de plus en plus de mal à croire que les
syndicats, dans la forme qu’elles ont actuellement, peuvent perdurer encore
longtemps. Il y a, bien évidemment, trop de divergences entre les intérêts des
différents partis concernés par le compromis fordiste pour que le pacte entre
ces partis reste solide (ou du moins en partie). Il ne reste plus qu’à voir si
le mécontentement des travailleurs syndiqués et la création d’un nouveau
syndicat parmi ceux-ci (les travailleurs même) ne représentent que la
répétition de l’Histoire ou bien une nouvelle page de celle-ci.
Sami Khalil
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