Dans un article paru dans Le Devoir le 20 novembre
2018, on apprend que l'automatisation de certains emplois, surtout dans les
secteurs tertiaires, ne semble pas être une menace ou, du moins, une situation
inquiétante pour le Québec, selon l'Organisation
de coopération et de développement économiques (OCDE). Effectivement, elle
émet ce constat en se fiant à l'un de ses rapports notant que le Québec compte
parmi les provinces canadiennes à vivre une augmentation du taux d'emploi entre
2011 et 2016 (Desrosiers, 2018). On note que l'augmentation touche
principalement les secteurs peu exposés à l'automatisation, notamment « chez les professionnels en science et en ingénierie, les professionnels
de la santé, les professionnels en éducation ainsi que les professionnels en
administration et dans le secteur des affaires.
» (Desrosiers, 2018) D'un autre côté, une croissance moindre du taux
d'emploi est observable dans les secteurs plus à risque. Ainsi, l'OCDE émet
l'hypothèse que le mouvement global d'automatisation soit paradoxalement
prometteur de progrès puisque les travailleurs s'orienteraient ou se
réorienteraient généralement vers des emplois plus sûrs et « de meilleure
qualité » (Desrosiers, 2018). On nous
informe aussi que le Canada est un pays tout aussi concerné par cet enjeu
mondial d'automatisation, selon des données émises par l'Organisation,
mais il y est bien préparé. Effectivement, avoir un niveau de formation générale
élevée de la main-d'œuvre, un contexte urbain fort et l'effervescence de
services exportables sont des caractéristiques susceptibles de protéger une
région contre les méfaits de l'automatisation dans le champ de l'emploi
(Desrosiers, 2018).
Plusieurs points sont à soulever dans cet article. Tout
d'abord, on remarque la place centrale qu'occupe le corps dans la sphère du
travail autant dans son utilité physique qu'intellectuelle. Il est l'outil
premier de l'humain, auquel on attribue différentes fonctions. Quand on
s'intéresse à l'automatisation, les performances motrices du corps sont les
plus concernées par la question. Ce sont elles qui sont directement menacées,
puisque les machines sont conçues pour exceller dans ce type de tâches. Ainsi,
une valorisation grandissante des secteurs plus intellectuels se dessine en
écho à ce phénomène. Seulement, comme l'article le mentionne, ce mouvement
d'équilibration que vit le Québec, entre autres, semble exister puisque la
situation socio-économique de la province est à l'image d'un pays développé. Effectivement,
une synchronisation des phénomènes d'automatisation et de hausse d'emplois peu
vulnérables survient, car les projets technoscientifiques derrière
l'automatisation proviennent justement des pays développés. Ainsi, les régions
qui, inversement, ne trouvent pas leurs forces dans ces domaines se voient
nettement désavantagées et plus vulnérables, puisque les secteurs tertiaires
occupent toujours une place centrale dans l'économie de ces pays. Même si
l'automatisation est à l'échelle planétaire, des inégalités ne cesseront de se
creuser puisque certaines régions y sont mieux « préparées » que d'autres. Le sociologue Jean-Pierre
Durand expliquerait cela par la fragmentation des marchés du travail. En effet,
dans certains pays ou régions, les
entreprises de sous-traitance dominent et ce sont elles qui sont le plus
vulnérables, car si l'on utilise le modèle de cœur/périphérie de Durand, plus
on s'éloigne du cœur plus il y a précarité, puisque l'on est dépendant des
activités qui proviennent du cœur (Durand, 2004). Il est également intéressant
de souligner que la source principale sur laquelle repose cette nouvelle au
sujet de l'automatisation est l'OCDE, reconnue pour être une organisation
mondiale qui regroupe, pour la plupart, des pays développés ayant une structure
politique démocratique et une économie de marché (Wikipédia, 2018). Ainsi, il
faut être conscient que ce point de vue de l'OCDE, même si l'Organisation
possède une certaine notoriété, représente qu'une interprétation possible de la
situation. Vu l'importance croissante
dans les pays développés des métiers davantage intellectuels et créatifs, quels
seront possiblement les effets d'un avènement futur des machines dans ces
sphères ? De tels cas semblent déjà se manifester marginalement. Par exemple, au
courant de l'année 2017, deux chercheurs français ont travaillé sur une
nouvelle forme d'intelligence artificielle capable de reconnaître certains
styles de peinture (Desmichelle, 2017). À première vue, l'utilisation d'une
telle technologie dans le milieu de l'art est assez déroutant et inhabituel, puisqu'elle
est étroitement liée à la subjectivité humaine à laquelle on associe une
identification plus profonde, voire philosophique à la nature de l'Homme. Cette
subjectivité s'impose aussi dans « l'individualisation
de la relation salariale » (Bourdieu, 1998 : 13) qui vise à convaincre en la
nécessité d'être différent et de se faire reconnaître comme tel pour demeurer
compétitif et avoir une valeur aux yeux des entreprises.
Catherine
Bykov
BIBLIOGRAPHIE
BOURDIEU,
Pierre. Mars 1998. « L’essence du néolibéralisme », Le Monde diplomatique,
Paris
DESMICHELLE,
Stéphane. « L'intelligence artificielle est-elle sensible à
l'art? »,
Sciences et Avenir, mis à jour le 26 octobre 2017. En ligne au
<https://www.sciencesetavenir.fr/high-tech/intelligence-artificielle/l-intelligence-artificielle-est-elle-sensible-a-l-art_117431
>, consulté le 17 novembre 2017.
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