mardi 25 septembre 2018

Amener les jeunes à leur plein potentiel ou intégrer les besoins de l’entreprise ?



Nous entendons souvent parler de pénurie de main-d’œuvre, des baby-boomers qui partent à la retraite et de la baisse du nombre d’enfants dans les familles québécoises, depuis quelques années déjà. À entendre cela par-ci et par-là, on pourrait s’imaginer facilement que toute cette boucle est bien évidente et que nous devons effectivement faire face à des solutions pour combler cette pénurie de la main-d’œuvre. Le gouvernement du Québec estime que dans la prochaine décennie, il y aura environ un total de 1,3 million d’emplois à combler, mais qui sont exactement les individus qui combleront ces emplois et de quels emplois on parle exactement ? À la lumière de cet article, il semblerait qu’il faut miser principalement sur l’intégration des jeunes au travail.

La situation actuelle et la place des jeunes dans la population active

En mai dernier, le gouvernement de Philippe Couillard a lancé la stratégie nationale sur la main-d’œuvre 2018-2023. Dans ce rapport, il est estimé que d’ici quelques années, le 54% des postes à combler seront pris en charge par les jeunes[4]. Si nous regardons la situation de chômage actuel pour la population québécoise, les données fournies, en mars dernier, par Statistique Canada s’élevé à un taux de chômage de seulement 5,6% [5]. Ce qui est un très petit pourcentage des personnes qui se trouvent au chômage. Par contre pour Alexandre Soulières, directeur général de la RCJEQ (Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec), le chômage des jeunes de québécois(e)s, qui s’élevait à 10,1% en juillet dernier, semblerait être un pourcentage inquiétant[4]. Selon lui la stratégie nationale sur la main-d’œuvre devrait appuyer davantage les Carrefour Jeunesse-Emploi [4].  

La stratégie d’intégration de l’emploi des jeunes

Le discours de l’inclusion des populations marginalisées dans le milieu laboral est un beau projet souvent énoncé par les partis politiques libéraux. Malheureusement, se sont très souvent que des discours, car évidement l’inclusion sociale est loin d’être la priorité numéro un des grosses entreprises. Le directeur général de la RCJEQ et ancien conseiller politique du premier ministre incarne un même discours semblable sur l’inclusion des jeunes. Le vieillissement de la population est selon lui une opportunité en or pour que les jeunes puissent « choisir le poste qui leur correspond et ainsi se réaliser et s’épanouir »[4]. La fameuse liberté du choix. Une personne en réinsertion sociale a-t-elle énormément de choix ou bien n’a-t-elle plus autant de choix de réintégrer le marché de l’emploi ? La culpabilité et la responsabilisation de sa condition de sans-emploi pèsent bien plus que le fameux choix de s’épanouir au sein d’une entreprise [2]. Mais, pour que ces jeunes puissent un être des futurs employés disciplinés, il faut bien qu’ils soient initiés aux réalités de celles-ci. Monsieur Soulières, semble avoir tout prévu. Dans ses carrefours jeunesse-emploi, ils y offrent une formation entrepreneuriat, dont un des buts est que les jeunes puissent se familiariser avec les valeurs, les nécessités du marché et les compétences que les jeunes doivent adopter face aux entreprises. Ce rêve d’être entrepreneur est en plein cœur de la gestion néolibérale de l’entreprise. En sachant que tous ne deviendront pas entrepreneurs, ils les auront du moins initiés à l’individualisation des performances au travail. Ces futurs employés pourront maintenant être prêts pour la course aux avantages salariale. [1] [2].  Au sujet des compétences, l’article en conclut qu’il semble important que les jeunes soient amenés à un développement de leurs « compétences transversales, celles qui seront transférables d’une entreprise à une autre, d’un poste à un autre, d’un métier à un autre »[4].

Les emplois des retraités ou les emplois du futur ?

Et alors les emplois ? Quels sont les emplois que ces jeunes et que la future génération occuperait ? Ça ne semble pas très clair. En fait, comme l’article fait référence, un rapport de Economic Forum indiquerait que « 65 % des enfants qui entrent au primaire aujourd’hui occuperont plus tard un emploi qui n’existe pas encore actuellement » [4]. Il est certain que beaucoup de changements s’opèrent dans le marché de l’emploi, et ce principalement par la technologie de l’automatisation de certaines tâches qui touche une variété d’emplois [3]. Les emplois les plus grandement touchés sont les individus moins formés. Peut-on penser que l’approche « des compétences transversales », « transférables d’une entreprise à une autre » serait peut-être trop généraliste pour ce qui attend les jeunes dans un futur non lointain ? Il faudrait peut-être songer à une éducation sur la formation des nouvelles aires d’emploi [3].  

 Par Salomé Aristizabal

[1] BOURDIEU, Pierre. Mars 1998. « L’essence du néolibéralisme », Le Monde diplomatique, Paris, p.11.

[2] Darot et Laval. 2009. « Discipline (3) : la géstion négolibérale de l’entreprise », dans La nouvelle raison du monde : essai sur la société néolibérale, La Découverte, Paris. Pp 309-314.

[3]DESROSIERS, Éric. « La formation sera la clé face à l’automatisation », Le Devoir, 24 mars 2018. https://www.ledevoir.com/economie/523537/automatisation


[4] ROULOT-GANZMANN, Hélène. « Amener les jeunes à leur plein potentiel », Le Devoir, 22 septembre 2018.  https://www.ledevoir.com/economie/537137/amener-les-jeunes-a-leur-plein-potentiel

[5] Statistique Canada. 2018. « Taux de chômage selon la province, mars 2018 ». https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/180406/cg-a003-fra.htm

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