lundi 24 septembre 2018

De meilleures conditions de travail pour un service de qualité dans nos CPE



Le 6 juin 2018 on comptait plus de 1350 travailleuses de 57 CPE (centre de la petite enfance) en grève générale illimitée de Montréal et de Laval. (https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1105315/debrayage-cpe-montreal-laval-greve-enfants) Ces grèves perdurent depuis le mois de mars après plusieurs séances de négociations qui, selon la CSN, ne portent pas fruit. Il faut dire que les travailleuses de CPE sont sans convention collective depuis plus de trois ans.
Mais que revendiquent exactement les travailleuses? Depuis les dernières années, ce n’est pas la première fois que les CPE entre en grève, mais cette fois ci les revendications ne sont pas d’ordre salariales, on ne parle pas non plus de régime de retraite ou d’assurances collective. Ce que les éducatrices revendiquent c’est avant tout leur pouvoir décisionnel, le fractionnement des vacances, la transparence des états financiers ainsi que la reconnaissance de leur ancienneté, dit Tania Valdez, membre du comité de négociation.(https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1105315/debrayage-cpe-montreal-laval-greve-enfants) En effet, les travailleuses réclament une reconnaissance de leurs acquis, de leur ancienneté et veulent être impliquées dans les processus décisionnels, après tout, ce sont elles qui sont principalement touchées par les coupures ou la mauvaise gestion. Ainsi, elles réclament que leur travail soit reconnu à sa juste mesure et dénonce le fait que les CPE soient de plus en plus gérés comme de petites entreprises privées. Avec l’effritement des services publics au temps de l’austérité, et la forte tendance à tout vouloir privatiser, les CPE se serrent la ceinture et écopent dans la qualité de leurs services. De plus, ce travail exigeant et essentiel est trop souvent mal compris ou sous-estimé. Cela étant dit, cette fois-ci leurs revendications dépassent la sphère monétaire, on parle plutôt d’organisation de travail.
Cette grève illimitée des travailleuses lève le voile sur une réalité auparavant peu connue, soit les inégalités dans les qualités des services offerts par les CPE, et je ne parlerais même pas des garderies privées, puisqu’il s’agit d’une tout autre problématique. Effectivement, plusieurs enfants n’ont pas accès à des services de garde qui favorise pleinement leur développement avec les ressources et les outils nécessaires. Par le fait même, nous savons à présent qu‘il y a une forte corrélation entre le salaire et les conditions de travail des éducatrices et la qualité du service offert, c’est ce que souligne l’Observatoire des tout-petits dans son récent rapport la qualité des services éducatifs au Québec. (https://lactualite.com/societe/2018/08/10/ca-cloche-a-la-garderie/) Pour améliorer la qualité des services, il faudrait donc donner de meilleures conditions de travail et un salaire bonifié à celles qui possèdent un diplôme. Ainsi, on favorise une main-d’œuvre qualifiée et l'on valorise par le fait même et à juste titre, le travail des éducatrices. C’est du moins que le rapport propose. Cependant, pour employer de telles mesures il faut évidemment l’aide de l’État.
Il faut préciser que les conditions de travail des travailleuses en CPE dépassent largement le simple intérêt de celles-ci. Effectivement, on parle ici d’égalité des chances pour les enfants. À vrai dire, la qualité des services de garde est intrinsèquement liée à la réussite scolaire future des enfants, et par le fait même, le contraire est tout aussi vrai. Cela va plus loin encore : « Les enfants qui fréquentent un service éducatif de bonne qualité auraient ainsi de meilleures chances d’obtenir un diplôme et un revenu plus élevé une fois adultes. Un bon service de garde ferait même diminuer la consommation de médicaments et de drogues, la criminalité et le risque de maladies cardiovasculaires! » (https://lactualite.com/societe/2018/08/10/ca-cloche-a-la-garderie/) Donnez une meilleure formation, un meilleur salaire et de meilleures conditions de travail aux éducatrices ce n’est donc pas une simple dépense, c’est aussi un investissement. On assure aux enfants de tous milieux confondus certaines bases communes et le droit et l’accessibilité au même service de qualité. Il va sans dire que les CPE accessibles et de qualité font partie intégrante de l’égalité des chances dans notre société, les conditions de travail des éducatrices ne sont donc pas négligeables. À vrai dire, la logique strictement entrepreneuriale et néolibérale nuit à la qualité des services offerts et néglige le facteur humain et social lors de restructurations ou de coupure.
Malgré les aléas des négociations, le 21 juin signe la fin de la grève pour les CPE. En effet, les CPE adoptent une entente de principe qui a été voté et adopté avec plus de 92% des voix et qui prévoit notamment une hausse des salaires et d’ajuster les horaires. Cette entente semble faire l’unanimité au sein des syndiqués et des patrons. (https://www.tvanouvelles.ca/2018/06/21/les-travailleuses-des-cpe-adoptent-lentente-de-principe)Mais l’accessibilité des CPE  et la fragilisation de la qualité des services offerts demeurent des enjeux à ne pas négliger.
Mais qu’en est-il des promesses électorales sur le sujet? Les CPE font partie intégrante du filet social de la société québécoise et a subi de nombreuses modifications lors des quatre dernières années. En effet, la garderie à 7 dollars qui était alors un accomplissement de notre État providence perd de l’aile, et en pleine campagne électorale, les partis se bousculent à coup de proposition pour nos services publics. Pour faire un vague résumé des propositions, le Parti Québécois propose une abolition des listes d’attente et permet de miser sur un service de qualité. Le Parti Libéral permet la gratuité, mais seulement pour les enfants de quatre ans et veut continuer à instaurer des maternelles quatre ans des les quartiers plus défavorisés. Quant à la Coalition Avenir Québec, ils veulent invertir massivement dans les maternelles quatre ans, et ce pour tous les enfants. Pour Québec Solidaire, leur proposition est la suivante; gratuité du CPE au doctorat. (https://www.journaldequebec.com/2018/06/02/garderie-gratuite-pour-les-enfants-de-4-ans) À la lumière de ces propositions, je demeure convaincue qu’il est primordial d’investir dans de meilleures conditions de travail et salariale pour les éducatrices qui jouent un rôle primordial dans notre société. Ainsi, les CPE participent à assurer une certaine justice sociale et elles sont un maillon fort de la qualité de nos services publics. Les syndicats ne baissent pas les bras et réclament aux élus un réinvestissement massif (28,5M) dans les services publics. (https://courrierlaval.com/les-syndicats-reclament-aux-elus-285-m-pour-les-cpe/) Il ne reste plus qu’à attendre pour voir s’ils seront entendus.
Jeanne Dessureault

Aucun commentaire:

Publier un commentaire