Depuis déjà plusieurs
mois, les représentants des travailleurs de la fonction publique négocient avec
le gouvernement par rapport à l’augmentation des cotisations à la retraite.
D’un côté, les syndicats critiquent le fonctionnement indigne de l’imposition
de la loi 3 qui réduira les cotisations gouvernementales quant aux
retraites en plus d’obliger l’entrée d’un arbitre dans le débat d’ici un temps
limité. D’un autre côté, le gouvernement se défend considérant que le paiement
des retraites est trop généreux pour atteindre un budget équilibré. Ainsi, les
deux parties cherchent l’appui de l’opinion publique part diverse moyen. D'une part, les syndicats utilisent des moyens de pression[1] et, de l’autre, les
gouvernements, municipal et provincial, dénigrent plusieurs actions posées par
les travailleurs[2].
Au cours du mois de novembre,
le gouvernement semble montrer une nouvelle technique pour convaincre l’opinion
publique : celui de montrer l’exemple. En effet, proposer par la Coalition
Avenir Québec (CAQ), l’Assemblée nationale a voté majoritairement pour un
changement quant aux cotisations de la retraite pour les députés provinciaux. Celles-ci
passeraient à un paiement de 23 % à 50 %, ce qui est demandé par le
gouvernement dans la négociation de la convention collective[3]. L’argument avancé par la
CAQ est simple, si l’on veut imposer une rigueur budgétaire, tout le monde doit
y passer, y compris les 125 députés du salon bleu.
J’ai malheureusement
l’impression que cet argument va donner effectivement des munitions au
gouvernement libéral dans son application de l’austérité. Ils montrent leur
capacité de s’imposer la même rigueur salariale, alors que le débat va plus
loin. Même les représentants du parti Québec Solidaire (QS), reconnus pour
leurs positions gauchistes, ont évité de voter. Ceux-ci indiquent qu’ils « craignaient de “cautionner” indirectement le projet de
loi 3 en votant “pour” la motion caquiste. »[4]
Ici, nous tenterons de
mieux comprendre la décision du parti QS d’éviter ce vote.
D'abord, en adoptant
cette motion, le gouvernement montre qu’il est prêt à faire les mêmes efforts
que la population. Ce faisant, ils appliquent ce que plusieurs travailleurs et
travailleuses critiquent depuis le début de la négociation : une réduction
de l’intervention étatique, donc de l’employeur, dans l’investissement de la
retraite. Voter pour ce changement salarial montrerait que les députés sont en
accord avec l’approche du gouvernement et l'application de l’austérité.
Ensuite, cette
motion va dans le sens de la pensée populaire. « On doit
prêcher par l’exemple. On ne peut pas, d’un côté, demander une chose aux
employés municipaux puis ne pas l’appliquer à nous-mêmes » [5]
proposait François Legault, chef de la CAQ. Cette pensée populiste met en
évidence la logique simpliste de ce parti. Pourtant, cet argument aura un appui
chez plusieurs individus. Cela amène un débat interne quant à une logique « œil
pour œil, dent pour dent ».
Toutefois, il ne faut pas
se leurrer, cette motion n’est qu’une poudre aux yeux. Celle-ci n’est qu’une
motion n’ayant aucun échéancier. Un engagement sans limites de temps. Le
gouvernement n’applique donc pas complètement les mêmes limites qu’aux
travailleurs publics.
Par ailleurs, ce débat va
plus loin que l’épineuse question des cotisations à la retraite. Le
gouvernement du Québec est en train d’imposer une rigueur budgétaire qui met en
motion l’idéologie néolibérale. Ce faisant, l’État se montre de moins en moins
concerner par les aides sociales, considéré comme superflu : « un programme
de destruction méthodique des collectifs. »[6] En échange, la mission de
l’État semble de plus en plus orientée vers une mise en compétition dans la
population en général. C’est une logique implacable qui met sur un piédestal le
laissez-faire ; chaque personne est capable de réussir seule et l’État n’est qu’un
obstacle à sa réussite avec sa grande imposition.
Pour atteindre cet
objectif, la désorganisation des pressions collectives est fondamentale. Pour
cela, il faut convaincre la population de l’efficacité d’un plan économique
utopique où l’économie ne serait plus influencée par le social. Ainsi, la
motion proposer va dans ce sens : tout le monde fait un effort, tout le
monde est égal, tout le monde a les mêmes chances de réussite.
Donc, un parti défendant un
État social ne pouvait pas se montrer en accord avec cette motion, mais QS à un
grand besoin d’un appui de la population. Ce parti se devait d’éviter ce vote afin
de se montrer en désaccord avec ce projet en gardant un opinion favorable de l’opinion publique.
Pour moi, le gouvernement fait fausse route. En fait, l’État se
doit de montrer l'exemple en appuyant les travailleurs au lieu de s'inspirer des entreprises qui réduisent leurs participations au bien-être du salariat; une pensée qui semble graduellement manquée de popularité.
Laurent Collard
[1]
Nous n’avons qu’à penser aux innombrables autocollants apposer dans le milieu
de travail.
[2] Par
exemple, la critique du temps de réponse des pompiers.
[3] http://www.ledevoir.com/politique/quebec/423714/les-deputes-gouteront-tot-ou-tard-a-la-medecine-de-la-reforme-des-retraites
[4] Ibid.
[5] Ibid.
[6] Bourdieu,
Pierre. Mars 1998. « L’essence du néolibéralisme », Le Monde Diplomatique,
Paris.
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