mardi 11 novembre 2014

« Les limites du 'tout virtuel' »

L'article « L'exil du patron Robinson sur une île déserte touche à sa fin » paru dans Le Figaro révèle l'impact de plus en plus important du télétravail c'est à dire du travail que nous effectuons en dehors des locaux de notre employeur ou client grâce aux technologies de l'information et de la communication.

Gauthier Toulemonde, propriétaire de la société Timbropresse qui publie le mensuel Timbres magazine et rédacteur en chef de L'Activité immobilière a décidé de passer 40 jours sur une île déserte au large de l'Indonésie pour tester des conditions « extrêmes » de télétravail. Il décide de gérer son entreprise dans l'isolement total mais ultra connecté, avec un ordinateur, une tablette numérique et deux téléphones satellitaires alimentés par des panneaux solaires. Son pari est réussi, il affirme avoir fini, avec son équipe à distance, chaque magazine dans les délais et avec les mêmes contenues et paginations que d'habitude. Gauthier Toulemonde privilégiait les échanges par mail plutôt que par téléphones satellitaires, ces appels étant beaucoup moins couteux. L’entrepreneur est parti avec un budget de moins de 10 000 euros et s'est fixé comme limite strict 20 euros de frais Internet par jour.
L’entrepreneur finit par conclure, tout de même, que « Le tout virtuel ne marche pas. Si les solutions pour travailler à distance existent, rien ne remplace le contact humain nécessaire au bon fonctionnement d'une entreprise» ; il rajoute qu' « à la longue, communiquer uniquement par mail ou par téléphone devient pénible».

Outre le fait que cet article ait attiré mon attention par son titre plutôt humoristique, je me suis posée plusieurs questions sur le développement de plus en plus important du télétravail.
Sandra Enlart et Oliver Charbonnier dans leur livre « A quoi ressemblera le travail de demain ? » dégagent quatre grandes tendances.
Tout d'abord une porosité des temps, des statuts et des espaces. Pouvoir travailler dans les transports en commun, être à la fois chef d'entreprise et blogueur par exemple.
Ensuite, l
'entreprise va éclater en plusieurs espaces de ressources avec une multiplication du coworking entraînant ainsi une baisse du lieu de travail « sous contrainte ».
Puis, l'univers physique et numérique sera de plus en plus complémentaire car les individus qui travaillent ne pourront pas vivre uniquement dans un monde virtuel. Par exemple des designers devront être de plus en plus présents pour mettre en image des réalisations présentées aux clients.
Enfin, le marketing et la recherche utiliseront énormément le numérique. Toutes les catégories socioprofessionnelles seront concernées.
Ces quatre tendances sont déjà présentes actuellement et n'auront de cesse, selon les auteurs, de s'accentuer.

« Mais cette description vertueuse de l'avenir va devoir vaincre de solides résistances. Selon une étude réalisée en février par Kea & Partners avec OpinionWay sur l'impact du numérique sur les organisations, les deux-tiers des dirigeants français interrogés ne trouvent pas utile de sensibiliser les cadres à la culture numérique. 83% n'utilisent pas d'outils collaboratifs pour lancer un processus d'innovation. 58% jugent que les réseaux ne sont pas un sujet digne d'intérêt pour comprendre les évolutions du monde professionnel. »
Il semble difficile voire impossible que les managers résistent longtemps à ces changements surtout s'il y a une généralisation du numérique comme l'a décrit Sandra Enlart et Oliver Charbonnier.
Actuellement, le télétravail concerne 12% des salariés en France. Avec une accentuation au fil du temps qui semble être inévitable, plusieurs inquiétudes me viennent à l'esprit.
Tout d'abord, au niveau des managers, il me paraît difficile pour eux, de diriger une équipe à distance, sans avoir les salariés « sous la main ». Même si plusieurs études montrent cependant que donner une plus grande autonomie aux salariés les rendent plus efficaces il est important de souligner que cette autonomie reste, actuellement, minime. La plupart du temps, le télétravail correspond à seulement une journée dans la semaine. Sa généralisation m'inquiète, comme l'a relevé Gauthier Toulemond, le contact humain est primordial sinon à la longue, cela devient pénible.

Par ailleurs, les syndicats français semblent être favorable au télétravail mais restent tout de même très prudent sur le sujet. L'isolement des salariés pourrait être une conséquence de ce phénomène. Pour le moment, nous n'avons pas assez de recul pour dresser un bilan de l'impact du télétravail en France.

D'autre part, le télétravail serait un moyen pour les salariés de mieux concilier leur vie privée et professionnelle. L'article « travail à la maison : les hommes ces héros, les femmes ces enquiquineuses » rédigé par Lucile Quillet montre que cette solution est mal perçue chez les femmes et que par conséquent, elles ont moins de chance de voir leur demande d'ajustement de travail acceptée par leur employeur. A partir de là, le télétravail viendrait renforcer les inégalités hommes/femmes au travail puisque cet outil pourra être plus utilisé par les hommes que les femmes.


Laura Tartas.

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