mercredi 19 novembre 2014

L'Afrique, en route tranquille vers la classe moyenne?

L’Afrique en route tranquille vers la classe moyenne?
Il est bien rare d'entendre parler de l'économie africaine dans d'autres termes que ceux généralement associés à la pauvreté, à l'exploitation, à l'impuissance ou à la négativité. Néanmoins, selon une étude réalisée par le cabinet Deloitte, le plus grand cabinet de d'audit et de conseil au monde avec plus de 180 000 employés et l'un des principaux commanditaires des Jeux olympiques de Londres et de Vancouver, la tendance devrait progressivement se renversée. Évidemment, ce discours ne semble pas si étonnant étant donné que les prévisions de meilleurs jours économiques pour le continent africain se sont succédés sans véritable succès. Ce présent texte résume les principaux points de l'étude et y mêle une analyse socio-économique.

La première particularité intéressante de l'étude est le choix des termes. Il n'y est pas vraiment question d'un boom reposant sur des statistiques riches et précises, mais plutôt d'un ensemble de conditions présentes, surtout en Afrique subsaharienne, qui n'est pas sans rappelé la situation en Asie du Sud-Est d'il y a environ 30 ans. Toutefois, ce n'est pas à cause d'un contexte qu'une situation va se (re)produire. Pour que cela se transpose à l'Afrique, il faudrait également un afflux de capitaux étranger plus important comme cela a été le cas en Asie du Sud-Est.

Les problèmes de l'éclosion économique de l'Afrique ne seraient pas des faits de la demande, mais plutôt de l'offre qui ne répond pas réellement aux besoins des populations. Deloitte souligne que les risques reliés à l'investissement exigeraient que les entreprises soient « prêtes à innover en adaptant leurs circuits, leur marque et leur portefeuille d'activités » pourraient engranger des revenus importants. Cependant, ces gains seraient davantage obtenus dans une perspective à long terme que dans une approche à courts termes. Dans une logique néolibérale rationalisée à l'intérieur de laquelle productivité, efficacité et rapidité vont de pairs comme valeurs dominantes, il m'apparaît difficile de croire en une exception pour le cas africain dans laquelle des investisseurs prendraient le risque de la croissance à long terme au lieu du confort de l'imminence financière, spécialement dans un contexte où l'économie occidentale (principal source d'investissements étrangers) semble ralentir.
Toutefois, la différence court-long terme ne représente pas le seul incitatif négatif à l'éclosion économique prévue. En effet, l'Afrique présente des risques supplémentaire en raison de problèmes « de change, d'instabilité politique, de corruption, d'infrastructures et de main-d’œuvre qualifiée » identifiés par Deloitte, mais ceux-ci sont comptés à l'intérieur même de l'analyse. Néanmoins, il m'apparaît qu'en plus d'être une barrière économique, ces problèmes sont bien souvent solidement imbriqués dans le discours médiatiques et donc dans les pensées et actions des actionnaires et investisseurs étrangers.


Cependant, l'étude relève aussi une autre nouvelle. Il apparaîtrait que la croissance économique africaine passe de moins en moins par les secteurs miniers ou pétroliers, sans que des données soient relevées (probablement davantage une faute de l'article que de l'étude). Ces transformations seraient derrière une possible croissance démographique de la classe moyenne qui serait sans référent antérieur. Selon l'étude : « D'ici 2030, plus d'un demi-million d'Africains devrait appartenir à la classe moyenne [celle ci étant définit comme étant en situation de pouvoir dépenser de deux à dix dollars par jour]. » Évidemment, la croissance économique et démographique d'une classe moyenne est sans contredit une bonne nouvelle, surtout si elle ne dépend pas autant qu'auparavant du secteur primaire de l'économie. Toutefois, n'importe qui peut se questionner sur la pertinence de définir une personne qui dispose de deux dollars par jour comme un membre de la classe moyenne.

D'un point de vue démographique, l'Afrique est un continent disposant d'un poids démographique jeune très élevé. L'étude insiste sur ce phénomène jumelé à l'urbanisation qui produit de nouvelles villes lesquelles disposant de nouveaux marchés. Ces jeunes souhaitent de nouveaux types de produits, certains locaux (surtout dans le case de l'alimentation) et d'autres internationaux (pour un gage de qualité en mode et en cosmétiques). Avec l'accès grandissant à Internet, il est question de 21% dans le continent contre 40% pour la moyenne internationale, les jeunes sont de plus en plus conscients des produits étrangers et des enjeux liés à leur consommation.


En conclusion, l'étude de Deloitte, telle que brièvement présentée dans La Presse, permet de constater certaines différences dans le contexte socio-économique, mais il semble que les vieux démons du continent africain soient encore présents dans le décor. De plus, la récente éclosion médiatique autour du virus d'Ebola ne restera vraisemblablement pas sans impacts sur les apports et capitaux étrangers.

http://affaires.lapresse.ca/economie/international/201411/19/01-4820385-lafrique-deuxieme-marche-de-consommation-dici-2017.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=lapresseaffaires_LA5_nouvelles_98718_accueil_POS7

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