dimanche 23 novembre 2014


Modulation des prix en garderie : comprendre les enjeux

1er octobre 2014, le gouvernement Libéral faisait passer de 7.00$ à 7.30$ le tarif des garderies québécoises.

1er avril 2015, le gouvernement Libéral envisage une modulation des tarifs de garderies en fonction du revenu familial.

20 novembre 2014, le gouvernement Libéral opte finalement pour une « fiscalisation » de la nouvelle grille tarifaire. Ce qui veut dire que le tarif restera à 7.30$ pour tout le monde, à condition que le revenu familial net soit inférieur à 75 000$ par an. En tenant compte de l’impôt, il y aura une hausse progressive des tarifs pour les familles ayant un revenu net de 100 000$ ou de 200 000$, cette hausse s’élèvera respectivement jusqu’à 12$ et 20$ par jour, comme rapporté dans l’article de La Presse rédigé par Denis Lessard et Tommy Chouinard. (http://www.lapresse.ca/actualites/education/201411/20/01-4820706-nouvelle-tarification-dans-les-garderies-de-730-a-20.php)

Dans l’optique des « mesures d’austérité », et dans le désir de « rééquilibrer les finances publiques » : le système d’éducation pour enfant écope. Ironiquement, c’est ce système auquel tous, autant dans le monde politique que sur la place publique, sera d’accord pour dire qu’il est d’une importance capitale. Bien que cette modulation ait lieu sur les tarifs de garderies, elle aura des répercussions dans toutes les sphères de la vie sociale : auprès des enfants, des femmes, dans l’universalité des services, dans l’économie, et plus encore.

L’Histoire nous parle
On assiste à un véritable retour en arrière en posant comme idée de moduler les prix en garderie. Toutes les luttes féministes, toutes les mobilisations et les revendications qui ont permis de créer ce réseau de garderie à prix modique seraient véritablement remises en question. On ne croit plus à l’universalité des services, mais on prône plutôt un principe idéaliste et progressiste « d’utilisateur-payeur » comme l’a mentionné Françoise David dans sa déclaration ministérielle du 20 novembre dernier. Ce principe selon lequel l’utilisateur doit assumer tous les coûts du service qu’il utilise, serait de questionner l’idée de cohésion et de solidarité sociale. Voulons-nous réellement d’un Québec divisé où tout le monde paie uniquement pour ses propres services, et ainsi créer une véritablement schisme au sein de la population? (http://quebec.huffingtonpost.ca/2014/11/09/cpe-rassemblements-pour-denoncer-la-modulation-des-tarifs-de-base_n_6128226.html)

On impose aux parents de débourser a priori un montant, et maintenant on leurs mentionne qu’ils verront se montant gonfler d’ici peu. L’impact sera majeur sur les parents, et surtout sur les femmes. Celles-ci ayant maintenant accès au travail feront face à une dualité illégitime : elles devront soit diminuer leur nombre d’heures pour être à la maison avec les enfants (pour ainsi en sauver les frais de garde), ou devront encore plus travailler pour arriver à payer les nouveaux tarifs d’éducation en centre de la petite enfance. Comme Pierre Fortin l’a mentionné lors d’un entrevu : « Si on freine l'entrée des femmes dans la population active, je ne pense pas qu'on va dans la bonne direction ». C’est donc dire que cette mesure nous transposerait dans un Québec des années 60 : un Québec traditionnel, où l’image de la femme ménagère et de l’homme pourvoyeur referait surface. (http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/Economie/2014/11/21/002-economiste-crainte-femmes-retour-maison-garderies-tarif-reduit-fin.shtml )

Le néolibéralisme
Les mesures d’austérité auquel les CPE font face s’inscrivent dans un contexte néolibéral. Selon Castells (1998), l’État est un acteur de premier plan et organise le jeu du marché. Dans sa gestion, il provoque une « restructuration des entreprises et des organisations ». Il va s’en dire qu’il est possible d’adapter cette vision des choses au gouvernement Libéral. Cette restructuration s’exprime dans la modification de la gestion de certains centres, notamment les CPE. Ce glissement de l’État-providence vers un État-néolibéral, est marqué la prédominance de l’économie dans notre environnement. La quête du « déficit zéro » en est un exemple. On pense en terme économique comme élément structurant toutes les décisions prises. Dans cet ordre d’idée, il nous est possible de comprendre la raison de « la fin du tarif unique » d’un point de vue strictement économique.
Assisterons-nous à un retour en arrière? Les « acquis » des luttes féministes sont-ils finalement que passagers? Dans un Québec dit « démocratique », la mobilisation sociale aura-t-elle gain de cause sur un gouvernement majoritaire?


Anne-Julie

1 commentaire:

  1. Il est évident que la lutte au démantèlement du réseau de la santé et des services sociaux et des services de garde doit exister par et pour la population québécoise.

    À mon avis, le gouvernement Couillard s'en prend à la politique familiale. De toute évidence, le gouvernement augmente les tarifs des services de garde, mais il ne se rend pas compte qu'il met un frein à l'accès à des services qui ont une grande valeur aux yeux des citoyens. Une fois de plus, le gouvernement s'en prend à ses contribuables pour renflouer ses dettes.

    Cette mesure drastique sert seulement à accroître les inégalités des enfants et des familles à faible revenus.
    Que dire de la conciliation travail-famille, la présence ou même l'absence des femmes sur le marché du travail ainsi que l'égalité et l'équité entre les femmes et les hommes !

    J'espère que le gouvernement ne s'attend pas à une lutte qui se terminera lors de la prochaine élection.

    Merci Anne-Julie de nous avoir ouvert les yeux sur cette triste réalité québécoise.

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