mardi 6 novembre 2018

Les luttes pour le 15$ au Québec et en Ontario : Enjeux de mobilisation et perspectives



Dans le cadre des rencontres organisées par le GIREPS, une conférence a eu lieu le 01 novembre 2018 pour discuter de la campagne de revendication du salaire minimum de 15$ l’heure au Québec et en Ontario.

Animateur : Yanick Noiseux, U. Montréal- GIREPS

Panélistes :
  • Cheolki Yoon, CTI Montréal
  • Dominique Daigneault, CCMM- CSN
  • Karen Cocq, "15 and Fairness" 
  • Patrick Rondeau, FTQ
L'animateur a posé quatre questions aux panélistes :
  1. L’engagement et la mobilisation
  2. Les défis rencontrés
  3. Les actions mises en place
  4. Les enjeux de collaboration syndicale 

15 & Fairness, par Karen Cocq
1- Le salaire minimum, qui se situait à 11,60 $ l'heure en 2012, a augmenté à 14 $ l'heure en janvier 2018, puis augmentera à 15 $ à compter de janvier 2019. Le mouvement « 15 and Fairness » revendique en plus du 15$ comme salaire minimum, l'équité salariale pour les travailleurs à temps partiel ainsi qu'une augmentation des congés payés et des congés pour urgence personnelle. Il est vrai que le "15$" a été plus médiatisé que la partie "Fairness" mais les travailleurs en Ontario ont réussi à gagner plusieurs acquis. Toutefois, il y avait une confusion chez le public entre un salaire viable et un salaire minimum. 
2- Le parti conservateur en Ontario a présenté le projet de loi 47 pour abroger la loi du 15$ et souhaite maintenir le salaire minimum à 14$ jusqu'en 2020.
3- Les actions mises en places pour soutenir ce mouvement sont principalement : des pétitions à signer, collectes de fonds, produits dérivés (bannières, pancartes), événements de mobilisation organisés...
4- En Ontario, le mouvement « 15 and Fairness » a été porté par une seule entité regroupant les représentants de communautés religieuses, du secteur médical, académique, des députés, des travailleurs immigrants,...

FTQ, par Patrick Rondeau
1- La lutte sociale au Québec était principalement menée par les syndicats dans les années 60 et 70. En 2016, le projet de campagne « Minimum 15 » a été présenté à 30 syndicats et a été adopté à la majorité. Le défi était de convaincre les propres membres de la FTQ dont un tiers des membres était opposé à la campagne. Cette opposition découle du refus des membres des syndicats (dont les salaires sont supérieurs au 15$ l’heure) que leurs cotisations soient utilisées dans cette campagne.  
2- Le domaine syndical a besoin d'un renouvellement dans ses troupes. La majorité des membres sont des hommes "blancs" âgés. Or, les travailleurs concernés par le salaire minimum sont majoritairement des femmes, des jeunes et des personnes racisées qui sont d'ailleurs difficiles à mobiliser. Cependant, plusieurs exemples d'organisations associatives ont vu le jour, notamment les chauffeurs de taxi et les sage-femmes qui n'ont pas de syndicats.
3- La sensibilisation se fait dans les quartiers initiée par les citoyens. Au Québec, il n'y a pas de coordination entre les régions. Les Think Thank de droite véhiculent une image de victimisation des employeurs qui menacent de fermer leurs entreprises si le salaire minimum est fixé à 15$ l'heure. Ces idées sont largement partagées par les médias qui omettent de préciser que le salaire minimum dans les PME est aux environs de 19$ l'heure. Les syndicats représentent un contre-pouvoir dans la mesure où ils peuvent influencer les députés s'ils arrivent à mobiliser un grand nombres d'employés.
4- Faire des coalitions impose de faire beaucoup de compromis. A cet effet, la FTQ a choisi de garder son identité propre tout en collaborant avec les autres mouvements sur les objectifs en commun. L'objectif principal de la FTQ est de se concentrer sur le salaire minimum de 15$ l'heure.

CCMM- CSN, par Dominique Daigneault
1- Le CSN milite pour le salaire minimum pour lutter contre la pauvreté. Durant les années 80, plusieurs manifestations ont vu le jour pour revendiquer une hausse du salaire minimum au Québec, inspirées des luttes outre-frontière aux États-Unis notamment. La campagne « 5-10-15 » a pour but de garantir non seulement le salaire minimum à 15$ l’heure, mais aussi des avantages sociaux de base notamment de connaître son horaire 5 jours à l’avance et de bénéficier de 10 jours de congé payé pour cause de maladie ou de responsabilités familiales. 
2- La campagne a connu une grande opposition de la part des employeurs mais aussi des employés qui touchaient un salaire supérieur au 15$ l’heure. L’argument avancé par les opposants était que cette campagne menaçait l’économie du Québec. 
3- Inciter les syndicats à revendiquer les mesures minimales suivantes lors du renouvellement de leurs conventions collectives : 5 jours de préavis pour prendre connaissance de son horaire de travail ou de sa modification; 10 jours de congés payés pour maladie ou responsabilités familiales; une structure salariale prévoyant un salaire minimum de 15 $ l’heure. La CSN procède à plusieurs actions dont : un sondage auprès des conseillères et des conseillers pour cibler les conventions où il y a présence de salaire inférieur à 15 $ l’heure, des tournée des équipes de travail, une mise en place des stratégies de négociation liées aux demandes du 5-10-15, une mise en place d’un outil de suivi des résultats.[1]
4- La campagne revêt un caractère pluriel en raison des différentes manifestations, alliances et collaborations avec les autres mouvements.

CTI Montréal, par Cheolki Yoon
1- En 2012, plus de 200 travailleurs précaires ont manifesté à New York pour un salaire minimum de 15$ l’heure. En 2015, la campagne « 15 et juste » a été lancé au Québec, inspiré du « 15 and Fairness » en Ontario. Le but de cette campagne était d’organiser les travailleurs précaires et d’élargir l’alliance de ce mouvement. En 2016, la campane « 15$ maintenant » a été lancé en collaboration avec la FTQ.  
2- Les travailleurs ont souvent peur de perdre leur emploi si l'entreprise découvre qu'ils s'organisent pour faire revendications.
3- Les stratégies de mobilisation de la CTI se font par contact direct avec les travailleurs en les abordant à la sortie de leur travail ou au métro.
4- Le mouvement pour les 15$ au Québec est porté par différents syndicats qui travaillent certes chacun de son bord, mais qui collaborent souvent pour faire appliquer leurs revendications en commun.

Lamyae Khomsi




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