*Le féminin est utilisé pour la
rédaction de ce texte, car la majorité des personnes occupant ce métier est des
femmes.
« Menacé(e)s »[1], «
intimidation »[2],
« manque de personnel »[3], «
difficiles négociations locales »[4], «
épuisement »[5];
sont les mots clés qui reviennent après une courte recherche web à propos du
métier de préposée aux bénéficiaires. Alors que ces travailleuses veillent sur
des personnes vulnérables; malades ou en perte d’autonomie, leurs conditions de
travail sont défavorables à la pratique des soins de santé demandés. « Elles réalisent
de 80 % à 90 % des actes de soin envers les patients, et ce, tant dans les
centres hospitaliers et les institutions gériatriques qu’à domicile ».[6]
Même qu’elles contribuent au travail relationnel (le care) restant souvent dans.[7] Le
métier de préposée aux bénéficiaires est surtout occupé par des femmes. Aussi, il
est favorable pour les nouveaux arrivants, car la formation est assez rapide
(10 mois pour l’obtention d’un D.E.P[8])
et demande peu de qualification (secondaire 3). Ces deux catégories sont les
plus à risques d’avoir un type de travail précaire.
Flexibilisation
et précarité d’emploi : Public Vs Privé
Comment expliquer
ce phénomène de flexibilisation et de précarisation ? La pénurie de main-d’œuvre[9]
? Selon les données ministérielles, il y a 21,9% de démission dans la première
année de travail et après 5 ans, seulement 38% des préposées restent en poste.[10]
Donc 62% des préposées démissionnent dans les 5 premières années de carrière. Pourquoi
démissionne-t-elle, alors qu’il y a une pénurie de main-d’œuvre ? Il semble que
ce soit à cause d’un rapport de force en faveur des employeurs.
À première vue, on penserait qu’un emploi dans
le secteur public serait favorable aux bonnes conditions de travail. En effet,
les salaires dans ce domaine sont entre 19,86$ et 21,80$ par heure travaillée.[11] Pourtant,
le secteur public fait appel à des étudiantes en stage[12]
ou à des agences de placement privées, afin de combler la pénurie de main-d’œuvre. Ces agences de
placement sont plus à risque d’occasionner une instabilité d’emploi. Aussi, les heures de travail des
employées du public peuvent être longues. D’ailleurs, on a déjà imposé par intimidation
un deuxième quart de travail dans une même journée afin de combler des
absences.[13] Étant
donné que le processus
d’embauche à temps plein dure quelques années dans le public, on va souvent se
tourner vers le privé.[14]
Le statut de travailleuses à temps plein est souhaitable, car il permet une
sécurité d’emploi et de meilleurs avantages sociaux. Même l’État employeur
offre des emplois à temps partiel et des emplois temporaires. Dans le public,
comme pour le privé, si les
travailleuses refusent des quarts de travail sur appel ou refusent leur horaire
confectionné par leur cadre, elles peuvent avoir des sanctions (renvoi ou heure
coupée). Ces travailleuses doivent rester flexibles (jour, soir et nuit), même
si elles doivent s’occuper de leurs proches, leurs enfants et leur propre vie.
Selon Radio-Canada, le salaire moyen des
travailleuses du privé est 13$/ heure.
Il est question d’un salaire assez bas malgré l’importance du travail (1$ plus
haut que le salaire minimum). Il y a aussi une absence de sécurité d’emploi
(renvoi pour conflit d’horaire et haut taux de roulement des employées). L’accès
à la syndicalisation est difficile. Les congés sur demande sont rares, ainsi
que les horaires stables (les congés sont considérés comme une non-volonté de
travailler). On parle ici d’emplois précaires. Or, dans les institutions privées, on va retrouver de
multiples profils de travailleuses. Des préposées avec une formation
professionnelle agréée, des étudiantes en stage, ou du personnel formé sur
place détenant au moins un certificat de
principe pour le déplacement sécuritaire des bénéficiaires. Ce certificat
peut être obtenu après une fin de semaine de formation. Là aussi, quand il y a
un manque de personnel, on peut se référer à une agence de placement. Ces
travailleuses peuvent être très peu qualifiées. Ces femmes doivent aussi
accepter du travail sur appel et accepter les conditions de vie qui viennent
avec. Ces multitudes de profils laissent les employées dans un flou considérant
les tâches à effectuer d’une institution à l’autre. Certaines employées mieux
formées que d’autres doivent donc compenser l'inconvénient dû aux lacunes
d’expérience et de qualification des collègues. Les employeurs se permettent
même d’imposer des pratiques illégales (donner de l’insuline en allant à
l’encontre de la loi encadrant les pratiques des préposées aux bénéficiaires;
ou empêcher aux employées de porter des gants).
Revendications et solutions
Les
revendications ont clairement été énoncées par le personnel et les syndicats.
On veut : « un meilleur salaire, une stabilité d’emploi, une formation
plus réaliste et un véritable respect de l[’] intégrité physique et mentale »[15].
François Aubry, un sociologue qui a étudié la problématique, est clair : «
[p]our alléger le climat de travail, selon les principaux intéressés, il
faudrait plus de personnel, un meilleur salaire, une formation réaliste, davantage
de postes permanents, de stabilité, de temps, de liberté. Mais à travers tout
ça, il faudrait aussi un espace pour ventiler. » [16]
[1] https://www.ledevoir.com/societe/sante/535420/des-preposes-aux-beneficiaires-menaces-par-leurs-patrons-denonce-la-csn
[2] https://urbania.ca/article/quand-lintimidation-pousse-les-prepose-e-s-aux-beneficiaires-a-la-demission/
[3] https://www.ledevoir.com/societe/sante/535432/chsld-sainte-dorothee
[4] https://www.ledevoir.com/societe/sante/538495/difficiles-negociations-locales-en-sante
[5] https://www.lapresse.ca/actualites/sante/201802/02/01-5152464-au-tour-des-preposes-aux-beneficiaires-de-crier-a-lepuisement.php
[6] Aubry, François et Couturier, Yves. Préposés aux
bénéficiaires et aides-soignantes Entre domination et autonomie, Collection
santé et société, Presses de l’université du Québec, 2014.
[7] Aubry, François et Couturier, Yves.
Préposés aux bénéficiaires et aides-soignantes
Entre domination et autonomie […]
[8] Diplôme
d’études professionnelles.
[9] https://www.ledevoir.com/societe/sante/535432/chsld-sainte-dorothee
[10] https://urbania.ca/article/gros-plan-les-preposes-aux-beneficiaires/
[11] https://urbania.ca/article/gros-plan-les-preposes-aux-beneficiaires/
[12] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1053999/preposes-beneficiaire-cisss-chsld-formation-professionnelle
[13] https://www.ledevoir.com/societe/sante/535432/chsld-sainte-dorothee
[14] https://urbania.ca/article/gros-plan-les-preposes-aux-beneficiaires/
[15] https://urbania.ca/article/quand-lintimidation-pousse-les-prepose-e-s-aux-beneficiaires-a-la-demission/
[16] Ibid.
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