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milliards de dollars. Telle est la valeur estimée de la transaction qui verra
le géant de la biotechnologie agricole se fondre au champion mondial des
pesticides. Un bouleversement dans le mode de l’agroalimentaire qui laisse un
gout amer. Cette transaction n’est pas vraiment surprenante, par contre :
elle suit une tendance dans le marché. Comme vu sur le site web de la BBC,
cette fusion suit celles de la Chinoise ChemChina et de la Suisse Syngenta, alors
qu’aux États-Unis, la Dow Chemical et DuPont ont également unis leurs
destinées.[1]
Le marché mondial des semences et des pesticides est maintenant contrôlé par
trois joueurs. Plus proche de nous, les deux grand de le potasse, Potash Corp de
Saskatchewan et Agrium de l’Alberta, s’unissent pour former le plus grand
fournisseur d’engrais au monde.
Pratiquement
toute la production agricole mondiale est maintenant sous le contrôle d’une
poignée d’individus. Et pas nécessairement les plus sympathiques. Pour revenir
à Monsanto et Bayer, il est légitime de se demander à quoi ressemblera les
rejetons issus de l’union de ces deux monstres au passé plus que douteux.
Monsanto
est bien connue du grand public. Pour les mauvaises raisons. De très mauvaises
raisons. La compagnie produit ou a produit des produits comme le PCB, le
Roundup, l’agent Orange et l’aspartame. Les quatre produits sont associés à des
troubles de santé assez grave tel que cancer, malformation congénitale et
diabète. Dans tous les cas, Monsanto assure que ses produits sont totalement sécuritaires,
même s’il a été prouvé que 1. C’était complètement faux dans certains cas et qu’on
n’arrivait pas à prouver le contraire dans les autres, et que 2. Monsanto
connaissait les risques et avait sciemment caché des informations
compromettantes. Le quotidien français Le Monde citait le Washington Post en
2012 :
« La façon dont The Washington Post rapporte l'histoire
est édifiante : "Des milliers de pages de documents de Monsanto – dont
beaucoup sont estampillés 'CONFIDENTIEL : lire et détruire' – montrent que
pendant des décennies, la multinationale a dissimulé ce qu'elle faisait et
surtout ce qu'elle savait. En 1966, des responsables de l'entreprise avaient
découvert que des poissons immergés dans ce ruisseau se retournaient sur le dos
en moins de dix secondes, pissant le sang et perdant leur peau comme s'ils avaient
été bouillis vivants. Ils ne l'ont dit à personne", raconte le quotidien
américain. »[2]
Même chose
pour l’agent Orange : la compagnie savait depuis des années que son
produit était très dangereux pour la santé, mais l’a quand même vendu à l’armée
Américaine pour la défoliation de la jungle durant la guerre du Viêt-Nam. Les
effets se font encore sentir aujourd’hui.
Tant qu’à parler de guerre,
passons du côté de Bayer, qui durant la seconde guerre mondiale faisait partie
du cartel allemand de la chimie IG Farben, fabricant du pesticide Zyklon-B,
tristement célèbre pour son utilisation dans les chambres à gaz des camps de
concentrations. À cette même époque, la compagnie allemande s’est livré au
trafic humain en achetant des « lots » de femmes juives pour
pratiquer des expérimentations dites « médicales ». C’est aussi Bayer
qui a créé la gaz moutarde utilisé durant la première guerre mondiale et dont l’utilisation
est à l’origine de la fameuse convention de Genève et le Tabun, un gaz
neurotoxique semblable au sarin.
La compagnie serait aussi
impliquée dans le scandale de l’huile frelaté en Espagne au début des année 80 (plus de 20,000 malades et au moins 1,200 morts) et dans le scandale du sang contaminé qui a eu lieu à la même époque. Par laxisme ou par soif de profit, on a inoculé le VIH à des milliers d’hémophile à travers le monde. Ces thèses ne
sont pas prouvées hors de tout doute, mais il y a anguille sous roche. Dans un registre un peu plus positif (quoi que...), noyons que Bayer est aussi la première compagnie à
avoir synthétiser l’aspirine et l’héroïne. Dernièrement, sa ligne de contraceptifs
oraux de quatrième génération Yaz (Yaz, Yasmin et Yasminelle) ont été jugées
très dangereuses et présentait des risques accrus de thromboses.[3]
Les deux entités seront
maintenant regroupées en une seule. Si le passé est garant de l’avenir, il
faudra vérifier à plusieurs reprises ce que l’on va trouver dans son assiette
dans les prochaines années. Il est plutôt inquiétant de voir ce rapprochement
entre la production alimentaire et la production pharmaceutique. Monsanto a
créé l’aspartame. Bayer traite le diabète. Combien de rapprochement de genre
pourra-t-on faire dans dix ans ?
Jocelyn Trottier
[1]
BBC (7 septembre 2016), Le chimiste Bayer veut racheter Monsanto http://www.bbc.com/afrique/monde-37293636
[2] Seelow,
Soren (16 février 2012), Monsanto, un demi-siècle de scandales sanitaires
in Le
Monde.fr http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/02/16/monsanto-un-demi-siecle-de-scandales-sanitaires_1643081_3244.html#Gsr3ZZttDo3x7KyM.99
[3]
Lejeune, Anicée (3 février 2013), Les bénéfices de Yaz et Yasmin remis en cause
in Journal Métro http://journalmetro.com/plus/sante/233065/les-benefices-de-yaz-et-yasmin-remis-en-cause/
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