Les salariés d’Itélé, chaîne d’informations
en continue française, sont en grève depuis la mi-octobre et ont voté le 2
novembre poursuite de cette dernière à plus de 78%[1].
Cette grève est d’une ampleur inédite pour le secteur de l’audiovisuel français[2].
Cette grève ne concerne pas une
bataille pour améliorer des conditions de travail ou pour protester l’arrêt d’une
activité. Non, elle est plus éthique que cela : il s’agit de protester
contre l’arriver d’un animateur vedette, Jean-Marc Morandini, mis en examen
pour corruption de mineur ![3]
Dès l’annonce de l’arrivée de l’animateur, proche du propriétaire de la chaîne,
les salariés ont voté une motion de défiance ; c’était le 11 octobre
dernier[4].
Deux jours plus tard, la Société des journalistes d’i-Télé, par le biais d’une
tribune demande à l’animateur de ne pas rejoindre la chaine, chose qu’il refuse
invoquant le principe de présomption d’innocence[5].
C’est à l’occasion de la première émission présentée par Morandini que la grève
débute entrainant dans son sillage le départ de plusieurs journalistes :
Alexandre Ifi, directeur adjoint de la rédaction, Olivier Ravanello ou encore
Amandine Bégot[6]. Des rencontres
entre les salariés et la direction ont lieu mais le climat n’est pas optimal. L’émission
en question est suspendue provisoirement en attendant la fin de la grève mais la
direction ne cède rien aux grévistes[7].
Ce mouvement social tombe au plus
mal car nous sommes en pleine campagne présidentielle en France et se déroule
actuellement les débats des primaires. I-Télé
étant une chaine d’information en continue, elle diffuse ces dits débats. Dans
ce contexte, les salariés avaient promis de s’engager à assurer les émissions
avant et après le débat ; elles ont été annulées par la direction[8].
En effet, la chaîne ne diffuse depuis le début de la grève que des
rediffusions.
Toutefois, le mal semble être
plus profond et l’arrivée de Morandini, un simple prétexte, légitime, pour
manifester. De fait en juin 2016, les salariés se sont mis en grève pour
protester contre l’arriver de Serge Nedjar, autre proche du propriétaire, connu
pour ses pratiques discutables en termes de management[9].
Pour cause, dès son arrivée, 53 contrats à durée déterminées ne sont pas
renouvelés soit près d’un quart de l’effectif total[10].
Une motion de défiance a alors été votée conduisant à une grève de quatre jours[11].
Dès septembre, le directeur de la rédaction part sans être remplacé, les
réductions budgétaires sont imposées signifiant moins de moyens pour les
journalistes pour couvrir les sujets lointains mais néanmoins importants.
Vincent Bolloré, propriétaire de la chaine mais également du groupe Vivendi
regroupant plusieurs autres grands média, souhaite réunir ces derniers pour
être l’accent sur les thèmes sport, divertissement, cinéma et international,
qui sont les plus rentables[12].
Cette stratégie n’est pas s’en rappelée celle mise en place au Journal de
Montréal il y a quelques années déjà ! En effet, les salariés d’i-Télé
craignent pour leur indépendance avec l’arrivée de contenus plurirédactionnels[13].
Là encore, la situation n’est pas s’en rappeler celle du Journal de Montréal.
Pour résumer, les revendications
des salariés de la chaîne sont simple : le départ de Morandini, la nomination
d’un directeur de la rédaction différent du directeur de la chaîne afin d’éviter
toute collusion et enfin la signature d’une charte éthique[14].
Nonobstant, la situation s’enlise
car aucune des deux parties ne cède du terrain, il s’agit d’une véritable
épreuve de force ![15]
Chacun étant concentré sur sa bataille, la chaine ne fait que diffuser des
retransmissions, c’est donc le téléspectateur qui en pâtit, délaissant peu à
peu ce média : l’audience a chuté de 0.5% des parts de marchés depuis le
début du conflit[16]. Ainsi,
c’est l’avenir d’i-Télé qui est engagé puisque selon Patrick Eveno, historien
des média, ce sont « deux projets éditoriaux qui s'affrontent et sont
incompatibles. Soit c'est l'actionnaire qui gagne en faisant partir le plus de
journalistes possible, soit ce sont les journalistes qui l'emportent, ce qui
suppose que Bolloré accepte de dire +Je me suis trompé+, ce qui ne semble pas
coller avec le personnage »[17].
Seul l’avenir pour dira si i-Télé
se relèvera de cette bataille …
[1] Alexandre. Piquard. « La situation reste
inflammable entre la direction et la rédaction d’i-Télé », Le Monde, 2
novembre 2016, maj le 3 novembre 2016, en ligne : [http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2016/11/02/les-salaries-reconduisent-la-greve-a-i-tele_5024171_3236.html],
consulté le 6 novembre 2016.
[2] Anne-Aël. Durand. « Trois semaines de grève à
i-Télé : comment en est-on arrivé là ? », Le Monde, 4 novembre
2016, maj le 5 novembre 2016, en ligne : [http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/11/04/trois-semaines-de-greve-a-i-tele-comment-en-est-on-arrive-la_5025721_4355770.html],
consulté le 6 novembre 2016.
[3] Ibid.
[4] Ibid.
[5] Ibid.
[6] Ibid.
[7] Ibid.
[8] Ibid.
[9] Ibid.
[10] Ibid.
[11] Ibid.
[12] Ibid.
[13] Ibid.
[14] Ibid.
[15] Alexis. Delcambre. « Pourquoi la crise s’enlise à
i-Télé », Le Monde, 24 octobre 2016, maj le 25 octobre 2016, en ligne :
[http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2016/10/24/pourquoi-la-crise-s-enlise-a-i-tele_5019515_3236.html],
consulté le 6 novembre 2016.
[16] Ibid.
[17] L’Indépendant. « C’est l’impasse pour iTele,
enlisée dans la grève … C’est l’avenir de la chaîne d’info qui est en question »,
L’indépendant, 5 novembre 2016, maj le 6 novembre 2016, en ligne : [http://www.lindependant.fr/2016/11/05/c-est-l-impasse-pour-itele-enlisee-dans-la-greve-c-est-l-avenir-de-la-chaine-d-info-qui-est-en-question,2275139.php],
consulté le 6 novembre 2016.
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