C’est à
l’intersection des rues Sherbrooke et Assomption que c’est déroulé, il y a
quelques semaines, une manifestation ma foi très créative dans le but
d’améliorer les conditions de travail dans les résidences privées pour
personnes âgées. En effet, le 14 septembre, le Syndicat québécois des employées
et employés de service; secteur 298 (SQEES-298) a regroupé une dizaine de
mannequins dans les rues, vêtues en préposé et tenant des pancartes et des
slogans comme « Prendre soin de nous…
c’est aussi prendre soin de vous » pour défendre la cause des employés
travaillant dans les centres privés pour personnes âgées du Québec. L’idée était
de se faire entendre tout en permettant aux travailleurs et travailleuses de ne
pas abandonner leurs responsabilités envers les
aînées.
Depuis 2006, le
nombre de résidences pour aîné ne fait qu’accroître à cause des 45 815 chambres
d’hébergements, dans les établissements publics et conventionnés[1],
qui ont été mis hors de portée pour les aînés n’ayant plus la capacité d’agir de
manière indépendante dans leurs activités de la vie quotidienne. Quatre ans
plus tard, le nombre de résidences avait déjà augmenté de 30 %[2].
En conséquence, les résidences privées se sont tournées vers le profit pour
maintenir leur rendement à un certain niveau tout en faisant travailler leurs
employés à un salaire misérable ce qui vient automatiquement diminuer leur
condition de travail. De plus, les administrateurs des centres privés ont rationalisé
le travail en adoptant une loi qui force les préposés aux bénéficiaires à suivre
diverses formations et obtenir un diplôme « d’Assistance à la personne »[3]
qui doit être approuvé par le ministère de l’Éducation. Les employés auront jusqu’à la fin du mois de novembre 2015 pour finir leurs formations et avoir
leur diplôme. Cette nouvelle loi va donc amener les employés à exécuter des
tâches plus rigoureuses et complexes sans toutefois apporter de changement à
leur salaire. Effectivement, les travailleurs et travailleuses sont payés en
moyenne 12,50 $ l’heure, ce qui n’équivaut qu’à 22 000 $ par année[4].
L’enjeu ici est clair; il n’est pas normal que des préposés aient un salaire
aussi bas; tenant compte des tâches qu’ils doivent accomplir pour prendre soin
de nos aînés jour et nuit. Ce qui explique pourquoi plusieurs d’entre eux
doivent avoir plus d’un emploi pour subvenir à leur besoin et cela lorsqu’ils
ont des enfants à nourrir, l’école, l’électricité, la voiture, le transport en
commun, les taxes et autres à payer. Comment s'assurer de ne pas perdre d'employés dans un
domaine avec de telles conditions? Comment vont-ils subvenir à leurs besoins? S’ils ont
des enfants, comment vont-ils faire pour balancer travail et vie parentale
(aider leur enfant à faire leurs devoirs le soir, faire des activités avec eux,
s’impliquer dans leur vie, etc.)? Si on leur demande plus de responsabilités,
il est cohérent d’augmenter leur salaire et de leur donner le respect qu’il
leur ait dû.
Cette situation
n’est pas une avancé pour les travailleurs et travailleuses des résidences
privées pour personnes âgées du Québec, mais plutôt un pas en arrière. Cela me
fait beaucoup pensé aux conditions d’exploitation des ouvriers au début de la
période industrielle, car certaines problématiques de l’époque refont surface: la mauvaise gestion, la rationalisation du travail, le salaire exécrable et
la précarité. Il manque de stabilité dans le personnel ce qui affecte les aînés
en manque d’autonomie, car ils doivent continuellement s’adapter à de nouveaux
préposé(e)s. En plus, l’adoption de cette nouvelle loi, va rendre les
travailleurs de plus en plus interchangeables, dans le sens où ceux n’ayant pas
suivis cette loi (et celles qui suivront) seront mis à la porte quel que soit
leurs expériences de travail précédentes dans le domaine.
D’après un sondage, effectuée
par le « Léger marketing », 89 % de la population soutient la
FTQ et la SQEES-298 et admet qu’un salaire de 12,50 $ heure est beaucoup
trop bas pour ce type d’emploi[5].
Entre autres, 60 % des Québécois, ayant participé au sondage, croient que
l’augmentation du salaire des préposés va non seulement leur permettre de
préserver leur emploi, mais aussi de les rendre plus efficace[6].
Malheureusement,
les préposé(e)s ne peuvent pas quitter leur poste de manière spontanée, tomber en
grèves et manifester, car nous avons besoin d’eux pour prendre soin de nos aînés. Donc,
c’est dans ce contexte que le président de la FTQ, Daniel Boyer, ainsi que le
président du SQEES-298, Richard Belhumeur, ont pris la parole devant les
médias, le mois passé, pour révéler les injustices dont le personnel des
résidences est victimes. Pour remédier à la situation, les syndicats ont décidé
de négocier « l'ensemble [des] conventions collectives de ce secteur [d’ici]
la fin de l'année 2015. En s'appuyant sur les gains [qu’ils font], à chaque
signature de convention collective »,[7]
ils pourront garantir de meilleures conditions de travail.
Enfin, je dois
avouer que cet article m’a fait un choc surtout lorsque je le compare à ma situation en tant que travailleuses. Je suis assistante aux ventes chez
Ogilvy. Mes collègues et moi sommes payés
pas mal plus que ses individus et certains d’entre nous reçoivent de la
commission en plus de notre salaire habituel. Je n’arrive pas à comprendre
comment de simples vendeuses de vêtements, de souliers, de cosmétiques ou
d’accessoires de marques peuvent recevoir un salaire plus élevé que des
préposé(e)s qui passe leur journée et parfois même leur nuit à s’occuper de
personne âgée en manque d’autonomie. Ces travailleurs sont aussi importants que nous. Ils devraient être traité avec le même respect. Ils viennent en aide aux gens
qui ont contribué à la formation de notre société. Ils leur permet d’effectuer leurs activités de la vie quotidienne d’une manière dont d’autres
ne sauraient le faire. Il est clair qu’ils méritent un meilleur salaire et de meilleures
conditions de travail!
Cynthia Saint-Fleur
[1] Syndicat Québécois des employées et employés de service, section
locale 298 (FTQ), « Campagne sur les conditions de travail dans les
résidences privées pour personnes âgées », mis à jour le 14 Septembre
2015, http://www.sqees.ca/uploadedfiles/D%C3%A9pliant_Fr_PDF.pdf
, consulté le 24 Octobre 2015.
[2] Ibid.
[3] Ibid.
[4] FTQ. « Des Mannequins Manifestes », Le Monde Ouvrier, no 113 Septembre-Octobre 2015, p. 2.
[5] Ibid.
[6] Ibid.
[7] Syndicat Québécois des employées et employés de service, section
locale 298 (FTQ), « Campagne sur les conditions de travail dans les
résidences privées pour personnes âgées », mis à jour le 14 Septembre
2015, http://www.sqees.ca/uploadedfiles/D%C3%A9pliant_Fr_PDF.pdf
, consulté le 24 Octobre 2015.
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