lundi 25 novembre 2013

« Remettre en question le système économique actuel et poursuivre les luttes féministes »



Du 14 au 17 novembre, plus de 800 femmes se sont rassemblées à l’UQAM, à l’occasion du Forum des États généraux de l’action et de l’analyse féministes. Démarche exceptionnelle, non seulement pour le mouvement féministe, mais pour l’ensemble des mouvements sociaux, souligne Delice Mugabo, coporte-parole de l’évènement site de la FFQ. Les États généraux se démarquent non seulement par leur ampleur, par la profondeur et la diversité des réflexions (plus de 60 ateliers ont eu lieu), mais aussi, par le nombre et la qualités des propositions débattues et adoptées en plénières. Chapeau à l’exercice de démocratie participative.




Les participantes des États généraux refusent de demeurer en mode passif et de baisser les bras devant le coriace « mythe de l’égalité ». Pour reprendre les mots d’Alex Conradi, coporte-parole et présidente de la Fédération des femmes du Québec  (FFQ): « Elles souhaitent reprendre du pouvoir, se faire entendre et proposer une société réellement porteuse de justice sociale féministe ». L’objectif surprend : « jeter les bases d’un projet féministe de société qui favorisera l’égalité, la justice, la liberté, la solidarité et la paix ». site de la FFQ On entend rarement ces cinq-là ensemble. On pourrait y voir de la naïveté rafraichissante, mais ce serait faire fi de toutes les têtes blanches, du background et de l’expérience de toutes les militantes jeunes et moins jeunes qui se sont rencontrées pendant ces quatre jours à l’UQAM.

« Maintenir la pression féministe visant plus d’égalité et de justice en poursuivant les luttes en 
faveur de l’équité salariale, l’égal accès des femmes au marché du travail et à la 
syndicalisation, la diversification des choix professionnels, l’amélioration des conditions de 
travail des femmes, la lutte contre l’exploitation et les violences au travail, la lutte contre le 
surmenage des femmes, etc. »


Agréable surprise, à une époque où les questions identitaires sont devenues les sujets de prédilections dans les milieux universitaires, la question du travail vient en deuxième position dans les propositions adoptées. Juste après la section « Bien-être et santé globale des femmes », mais « stéréotypes, représentations et normes sociales », on intègre les questions de « Système économique, travail des femmes et place de l’écologie ». Il faut de l’audace pour aborder de front les questions de pauvreté, d’économie et de respect de l’environnement et faire « le constat de l’échec du système économique actuel pour permettre aux femmes de sortir de la pauvreté ou de la précarité, pour reconnaitre le travail invisible des femmes et stopper la surexploitation des ressources naturelles. »

« Se donner les moyens de rompre avec le système capitaliste et néolibéral actuel en 
développant une vision tournée vers une économie des soins et des besoins pour assurer la vie 
sur terre et le bien-être des communautés au Nord comme au Sud »


La réflexion sur le travail des femmes, qu’il soit salarié, sous-payé, gratuit, délégué, domestique, à concilier, etc., ratisse très large. Je vous invite à la lire ne serait-ce que pour prendre connaissance des idées novatrices et révolutionnaires – ne manque plus que les moyens-  qui s’y trouvent. site des États généraux L’adoption d’une loi-cadre conciliation travail-famille-étude ou le revenu social universel garanti sont des propositions de la section « Remettre en question le système économique actuel et poursuivre les luttes féministes ». Surtout, prenez le temps de lire celle qui suit, « Développer parallèlement une vision alternative – féministe et écologiste – de l’économie et du travail », où on propose un projet universel qui ne tombe pas dans le piège du court-termisme économique. Premier objectif, « se donner les moyens de rompre avec le système capitaliste et néolibéral actuel en développant une vision tournée vers une économie des soins et des besoins pour assurer la vie sur terre et le bien-être des communautés au Nord comme au Sud ». Plus loin, il est question de « développer des pratiques collectives de prise en charge des soins. Autrement dit, rompre avec la division du travail […] ». Il faut avoir des rêves pour passer à l’action...




Un comité travaille actuellement à mettre de l’ordre et à synthétiser les propositions adoptées. Dans l’entre temps, dans les médias, on trouve le moyen de parler de ce qu’il avait été décidé d’éviter aux États généraux, le sujet de l’heure, la charte pour la laïcité du gouvernement du Parti Québécois… Même Le Devoir ne s’est contenté que de deux articles post États généraux, dont une lettre d’opinion, pour souligner les exclusions de l’évènement. Oui, il faut dénoncer l’exclusion des travailleuses du sexe voir l'article, oui, les positions de la FFQ sur le port du voile sont contreproductives voir l'article, mais de s’en tenir à ça est tout aussi inacceptable. Une campagne de salissage du féminisme, aussi vieille que le féminisme lui-même, a déjà fait et fait toujours un tort fou au mouvement. Et puis, entre vous et moi, prendre en photo l’une des quelques femmes voilées de l’assemblée, en gros zoom, c’est vraiment trop facile! voir l'article Attendons de voir ce qui sortira une fois les communiqués de presse envoyés…

 Malaka Rached





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