dimanche 24 novembre 2013

Le bonheur de masse



Vendredi prochain, l’incarnation du rêve américain prendra forme dans le fameux Black Friday. Cette «fête nationale» inaugure pour la plupart des consommateurs le lancement du magasinage des fêtes.  «À titre d’exemple, l’an dernier, c’était environ 247 millions de personnes qui ont dépensé au total près de 60 milliards de dollars.» note Eve-Lyne Couturier dans son dernier billet publié à l’IRIS. 

Selon la chercheuse, deux aspects marquent cet événement : la force du marketing qui «cristallise l’impression d’urgence et d’éphémère» ainsi que le comportement souvent violent des consommateurs. La consommation reste un important levier de l’identité et de l’affirmation du statut social, particulièrement à l’heure où le déclassement vers le précariat tend à ébranler les repères «rationnelle». Ainsi, la «nécessité» d’acheter pour montrer à ses proches qu’on les aime ou encore profiter des rabais «exceptionnel» appartient d’une certaine manière à une logique d’adaptation où les moins fortunés tendent à être stigmatisés comme déviant, hors de la norme de consommation. 

Rappelons aussi que les établissements qui année après année affichent des bénéfices records cette journée sont aussi les même qui emploient des milliers de «working poor», pour et par ces mêmes travailleurs que Walmart récolte de la nourriture avec le slogan : «Please donate food items here so Associates in Need Can Enjoy Thanksgiving Dinner.» Plein de bonne volonté, Walmart veut aider les employés qu’elle néglige. Plein de bonne volonté, Walmart veut offrir ses produits au plus bas prix pour que tout le monde puisse acheter du bonheur pour Noel. C’est dans une certaine mesure ce que Standing décrit comme étant l’utilitarisme régnant dans la société, où la croyance en le plus grand bonheur du plus grand nombre. Ici, cela se traduit par une célébration de la consommation, où chacun peut se faire plaisir à «moindre coût». 

 «Making a fetish of happiness is not a prescription for a civilised society»[1]


Ali Romdhani


[1] Standing, The Precariat : A politics of Inferno

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