mardi 12 novembre 2013

« Métier formidable, conditions fort minables »

En grève depuis le 16 octobre dernier, les sages-femmes réclament reconnaissance et visibilité en France. Selon elles, leur métier n’est pas vu comme étant aussi important qu’il l’est en réalité auprès de la population. Elles demandent donc une meilleure reconnaissance de ce qu’elles font puisqu’actuellement, une personne qui exerce le métier de sage-femme n’est pas considérée comme faisant partie du personnel médical. Cela se fait ressentir sur les salaires, mais aussi sur les conditions de travail. Le salaire mensuel net commence à 1400 euros ce qui est l’équivalent de plus ou moins 1900 dollars canadiens. La revendication principale est donc d’obtenir une meilleure rémunération tout en ayant un meilleur statut au sein de la fonction publique comme celui de praticien hospitalier. De plus, comme l’a souligné M. Dutriaux, leur but n’est pas de remplacer les médecins puisqu’ils n’ont pas du tout la même fonction, mais c’est plutôt de travailler en collaboration avec eux afin de s’occuper des femmes en bonne santé et donc, d’alléger la tâche des médecins qui doivent déjà s’occuper des malades. C’est en lien avec ce désir de revalorisation du métier de sages-femmes que des milliers d’entre elles (puisque la plupart sont des femmes) se sont rassemblées devant le ministère de la Santé à Paris afin de manifester contre cette invisibilité. Marisol Touraine, ministre de la Santé en France, a donc rassuré les troupes en annonçant que leur statut au sein des hôpitaux serait discuté lors de réunions qui se tiendraient avant la fin du mois de novembre.

Les femmes sont bien souvent confinées à des emplois « traditionnellement féminins » qui n’ont pas du tout de bonnes possibilités de carrières ou encore des salaires intéressants. Comme c’est le cas, ici, les inégalités entre les métiers « d’hommes » et les métiers de « femmes » persistent. On parle ici de faible rémunération, d’inégalités au niveau des conditions de travail ainsi que d’une division sexuelle du travail. Même si la sage-femme, au moment de l’accouchement, fait le même travail que le médecin qui travail dans un hôpital et assiste la femme à donner naissance à son enfant, il reste que celle-ci est nettement désavantagée sous tous les points. Pourquoi une telle persistance au niveau des écarts de salaire? C’est la question à se poser.

Premièrement, il y aurait une tendance à naturaliser les compétences féminines comme c’est le cas ici. Les femmes qui prennent soin des enfants, ou dans ce cas-ci qui aident à la naissance de ceux-ci sont vues comme exerçant un « travail naturel », c’est-à-dire qu’il serait normal pour la femme d’être en mesure d’apporter son soutien et son aide lors d’un accouchement. Cependant, la naturalisation des compétences masculines est loin d’amener le même type de conséquences.

Deuxièmement, un autre point qui pourrait être amené est le fait que les femmes ont souvent une tendance à aller vers des métiers qui sont moins valorisants ou encore moins bien rémunérés. Une femme aurait plus tendance à se diriger vers un emploi d’enseignante au primaire plutôt que vers un emploi en informatique par exemple. Cette préférence pourrait être due à une construction sociale de l’éducation qui est donnée aux enfants alors qu’ils sont encore tout jeunes.

Troisièmement, il n’y a pas si longtemps de ça la majorité des femmes restaient à la maison pour s’occuper des enfants pendant que leurs maris s’occupaient de travailler pour faire vivre la famille. Cette vision de la femme comme étant naturellement prédisposé pour s’occuper des enfants est loin d’aider la cause des sages-femmes qui tentent de faire valoir leur métier comme étant plus que ce que la population croit actuellement. Cet « héritage » qui a été donné aux femmes d’aujourd’hui semble être ancré dans les esprits de tous puisque les gens continuent de dévaloriser les métiers qui touchent de près ou de loin au « don naturel » de la femme pour élever les enfants. Les compétences de ses femmes ne sont donc pas reconnues au sein de la fonction publique puisque les femmes sont encore aujourd’hui vues comme des spécialistes du « care ».

On peut toujours espérer que le ministère de la Santé en France viendra en aide aux sages-femmes qui ont un métier des plus nobles et qui se doivent d’être valorisées et surtout reconnues dans le milieu médical. Même si ce n’est pas demain que l’idée des spécialistes du « care » chez les femmes disparaitra, on peut toujours au moins croire en un avenir amélioré pour ces métiers de professionnelles médicales.

Anouk Dubeau



 

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