lundi 1 octobre 2018

LA CONSTRUCTION DES CONNAISSANCES SUR LE TRAVAIL ET LA PAUVRETE AU PRISME DE L’INTERSECTIONNALITE


Ce panel nous permet de capter les origines et la pertinence de l’intersectionnalité afin de comprendre les divers phénomènes qui composent notre société au temps du néolibéralisme. En effet, dans la première présentation de cette séance portant sur « La gouvernementalisation de l’intersectionnalité à l’ère du néolibéralisme (post)racial » on souligne les multiples origines de l’intersectionnalité. En prenant l’exemple des femmes noires, il apparaît que les rapports d’inégalités entre le Nord et le Sud résultent en fait d’un héritage qui persiste encore aujourd’hui. Il est alors nécessaire de regarder les différents rapports qui composent ces inégalités comme des catégories qui s’influencent mutuellement. Pour cela, Sirma Bilge préconise une action tournée vers une vision holiste, donc un mode de pensée qui appréhende un phénomène ou un système complexe comme une totalité et dont les propriétés ne peuvent être expliquées qu’à partir d’un seul composant. Par ailleurs, lorsque l’on prend le cas de la discrimination raciale, genrée ou sexiste, on constate une invisibilité des femmes noires et donc l’intersectionnalisme serait une solution afin de les rendre de nouveau visible. Néanmoins, un problème persiste concernant le terme même d’« intersectionnalisme », puisque ce dernier est adulé et accusé dans les politiques politico-culturelles. Pour contrer cette difficulté, Bilge propose un cadre d’analyse double : un cadre de catégorie de pouvoir et un cadre de domaine de pouvoir. Cette approche permet de voir que la force de l’intersectionnalité est de savoir que nous ne savons pas tout et que donc le « etc. » de l’intersectionnalité se réfère à une universalité qui dépend d’un contexte et d’une spécificité. Elle préconise alors une réactualisation de l’intersectionnalité des critiques des femmes du Sud qui reste encore trop centrée sur l’expérience occidentale car l’intersectionnalité émerge de ces marges alors qu’elle devrait être plus globale et s’articulait non pas dans le Sud mais avec le Sud. Pour cette raison, l’intersectionnalité distingue diverses orientations telles que les inégalités sociales, l’historicité ou encore la justice sociale. De plus, lors de la présentation de Varsha Ayyar « Dalit Feminism and Labour : Current Challenges », on a pu voir comment l’intersectionnalisme pour contrer le problème de la condition de la femme en Inde. En effet, l’Inde est toujours reflétée par des stratifications au sein de sa société où une division sexuelle du travail persiste. On est face à un contrôle strict des femmes, une culture Hindou et des notions religieuses qui prennent encore beaucoup de place. De fait, dans cette culture, les « dalits » traduit par les « oppressés » correspondent aux « Intouchables » qui composent le groupe social le plus bas de la culture Hindou. Ainsi, comme il s’agit d’une société patriarcale, les femmes et les pauvres sont ceux qui sont politiquement et socialement exploités. Cependant, grâce à une approche intersectionnelle, plusieurs réactions, stratégies et mouvements de protestation sont apparus afin de contrer la domination : « Dalit panthers » et « Dalit Feminism ». Il s’agit pour la plupart de groupe de poètes qui par leurs écrits mettent en lumière la condition des Intouchables en tant que femme. Le but de ce phénomène activiste est l’émancipation des dalits et des femmes par le biais de l’intersectionnalité. Néanmoins, le travail et l’émancipation de la femme en Inde reste encore un sujet tabou dans cette économie informelle. Dans une troisième présentation de Nancy Guberman, cette dernière nous explique la mise en pratique d’une approche intersectionnelle : « Une application d’approche féministe intersectionnelle : petite histoire d’une formation d’accompagnement élaborée par Relais-femmes et la Table des groupes des femmes de Montréal (TGFM) ». Le premier constat de cette approche est qu’une femme sur deux est issues d’une diversité ce qui dans beaucoup de cas entraîne une sous-représentation des femmes immigrées et racisées comme employées. Ce phénomène est principalement causé par un manque de sensibilisation aux défis posés par la différence. Le but, donc, de cette approche intersectionnelle est de donner les outils pour changer les pratiques et les préjugés au sein des entreprises car l’expertise des femmes est bien souvent peu reconnue et pour cela, des formations gratuites ont été proposées. Ainsi, il fallait partir d’une identification des obstacles à l’embauche des femmes de diversité et d’une identification des outils et moyens qui conviendraient le mieux pour changer ces pratiques.
            Enfin, comme nous avons pu le constater dans ce panel, l’intersectionnalité permet de rendre visible les conditions de certains groupes de femmes qui se retrouvent marginalisées au sein de leurs cultures. Ainsi, elle apparaît comme une solution qui va permettre aux femmes discriminées de sortir de cette invisibilité sociale dont elles sont victimes. Par ailleurs, comme il a été démontré plus haut, il s’agit d’une approche activiste qui renvoie à une théorie transdisciplinaire qui doit permettre d’appréhender toute la complexité des rapports d’inégalités. Et pour cela, elle doit être approchée par une vision holiste qui en ce sens, étudie et analyse ce phénomène de discrimination raciale et genrée dans sa globalité. Par le biais de l’intersectionnalité, on cherche à étudier le problème et ses divers rapports dans plusieurs niveaux d’analyse puis on les met en interaction pour comprendre l’ensemble du problème. L’approche intersectionnelle est donc une méthode propice qui analyse dans sa totalité le phénomène en question et qui a pour but de contrer les problèmes de préjugés envers les femmes. Néanmoins, malgré son caractère d’universalité et de globalité, on peut s’interroger sur la suffisance de l’intersectionnalité comme une théorie ou approche capable d’analyse tout ce à quoi elle aspire.


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