dimanche 28 octobre 2018

Les Québécois Épuisés


En l’espace d’une centaine d’années, le monde du travail a fait un progrès remarquable. Loin derrière est l’époque où les ouvriers étaient à la merci de leur employeur, où le salaire reçu était tellement misérable qu’on devait faire travailler nos enfants, souvent dans des conditions déplorables, où les normes de santé et sécurité au travail n’était même pas à l’aube d’exister. (1)

 Aujourd’hui, à une époque où la loi régie sur le milieu professionnel, ou les salariés sont protégés par les syndicats et où les conditions de travail sont plus favorables que jamais, il serait facile de présumer que le moral des travailleurs est plus haut que jamais. Pourtant, l'épuisement professionnel des travailleurs a tellement pris d’ampleur qu’il est rendu un enjeu de société. En effet, Québec Solidaire nous faisait part le samedi 22 septembre de leur plan d’action pour lutter contre le fléau qu’est l’épuisement professionnel.

Gabriel Nadeau-Dubois souligne que les travailleurs québécois ont une lourde charge de travail et qu’ils ne font pas accorder suffisamment de vacances dans une année. Il souhaiterait une révision des normes du travail qui inclurait plus de vacances, plus de congés de maladie payés et le droit de refuser des heures supplémentaires. Pour lui, c’est simple « des travailleurs plus reposés sont des travailleurs plus motivés et productifs. » Il continue en ajoutant que le Québec devrait prendre exemple sur le modèle européen qui octroie environ 5 à 6 semaines de vacances, par années. (2)

En s’attaquant au « burnout » en pleine campagne électorale , Québec solidaire vient toucher un aspect du travail qui est plutôt tabou dans notre société et qui pourtant touche beaucoup plus de gens que l’on ne pense. Effectivement, une recherche menée par le cabinet-conseil Gallup estime que 28% des millénaux son ou se disent être sur le bord du burn-out, et que 21 % des gens d’autres générations sont aussi sur le bord du burn-out. C’est donc 1 travailleur âgé de 18 à 34 ans sur 4 qui ne peut plus gérer sa vie au travail et 1 sur 5 pour les 34 ans et plus. (3) Des statistiques choquantes, à première vue, mais comprenables lorsque l'on jette un regard critique sur notre mode de vie néolibéral.  Nous vivons dans une ère de performance 2où chacun d’entre nous est en compétition. Le travail est probablement la sphère la plus exigeante dans nos vies.  Selon la loi, la semaine normale de travail est de 40 heures. Donc en moyennes, nous passons 40 heures par semaine à devoir performer sous pression, où la qualité du travail est jugée par la vitesse d’exécution et l’absence d’erreur, avec des supérieurs qui ne reconnaissent pas toujours notre travail, un statut social qui ne représente pas nos ambitions et où le salaire laisse parfois à désirer. (4)
La haute autorité de santé définit le burn-out comme : « épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel. » (5) L’épuisement professionnel n’est pas quantifiable ce qui nous pousse à le banaliser, mais en réalité le travailleur à autant de chance de se blesser au travail qu’un athlète a de chance de se blesser en pratiquant un sport.

Québec solidaire affirme qu’un tel projet serait profitable pour l’économie de la belle province, et avec raison. Les entreprises perdent des milliards de dollars en raison de l’épuisement des employés. Le stress en entreprise représente 19% des coûts d’absentéisme, 40 % des coûts du roulement du personnel, 55% des coûts de programme d’aide aux employés, 60 % de coûts d’accidents de travail, 10% des coûts de régimes d’assurance-médicaments et 100% des coûts des poursuites liées au stress. (6)

Le plan d’action de Québec solidaire est un premier pas vers une société moins épuisé.  Certes, nous n’avons plus les conditions de travail dégradantes d’antan, mais reste tout de même que notre société capitaliste reste stable seulement à cause du travail acharner des salariés. Peut-être que dans quelques décennies nous regarderons en arrière et réaliserons que c’était le premier pas vers une autre révolution du travail.

Par Guillaume Courteau

Noiseux, Y. (2018). SOL-2015-A-18 : Sociologie du travail. Recueil inédit, Université de Montréal
 Ocampo, R (2018, 22 septembre ). « Plan anti-burnout: un travailleur repose est un travailleur motive,dit QS. »La presse, consulté le 22 septembre 2018, en ligne < http://www.lapresse.ca/actualites/elections-quebec-2018/201809/22/01-5197597-plan-anti-burnout-un-travailleur-repose-est-un-travailleur-motive-dit-qs.php. 

Schmouker,O. (2018, 22 août ). Leaders, Gare au burnout des millénaux![Billet de blogue]. Repéré à https://www.lesaffaires.com/blogues/olivier-schmouker/leaders-gare-au-burnout-des-milleniaux/604408

Warr, P. (2007). Work, Happiness, and Unhappiness. New York: Psychology Press, 111-133
5.     Mascret, Damien (2017, 22 mai). « Les médecins invités à prendre le burn-out plus sérieux » Le figaro, consulté le 22 septembre 2018, en ligne<  http://sante.lefigaro.fr/article/les-medecins-invites-a-prendre-le-burn-out-plus-au-serieux/

Institut universitaire en santé mentale de Montréal, Santé mentale, en chiffres, URL : http://www.iusmm.ca/hopital/sante-mentale/en-chiffres.html

1 commentaire:

  1. C'est très intéressant de voir l'impact qu'a le travail sur la vie individuelle des travailleurs cependant ce qui serait d'autant plus pertinent c'est de distinguer dans quelle sphère ou domaine ces problèmes de santé surviennent. En effet, nous savons que ces problèmes surviennent partout cependant il y a aussi une question de fréquence par rapport à cette surcharge de travail par exemple les infirmières dans le système publique risque d'être plus en contact avec des niveaux de stress plus élevé que dans un secteur dit privée. Cela peut être dû à des modes d'organisations qui diffèrent entre ces deux instances. D'ailleurs, il serait aussi pertinent d'ajouter l'indice du genre en lien avec la gestion du burn-out. En d'autres mots, plusieurs études montrent que le stress se vit différemment entre homme et une femme. En ce sens, en offrant une certaine cartographie des mécanismes de gestion du burn-out selon le sexe et le domaine dans lequel la personne travaille pourrait aider à donner une meilleure représentativité du phénomène dans le monde du travail. Selon moi, donner des vacances peut certes offre un moment de détente pour la personne qui vit un niveau de stress élevé cependant avoir 5 ou 6 semaines de vacances n'offre pas de faits véridiques que le phénomène puisse s'estomper dans le futur. De plus, en comparant les pays européens au Québec pour l'obtention de vacances, on ne peut pas infirmer que leurs offrir le même droit risque de changer la chose parce que le contexte historique est différent et les conditions d’existences aussi. Il faut donc peut plus s'axer sur la répartition des tâches au sein de l'entreprise plutôt que de leurs donner un certain nombre de vacances. Au final, si je comprends bien ton texte, les exigences liées au travail que l’employé pratique sont trop grandes par rapport à ses compétences actuelles, donc il s’agit plus de répartir les tâches quitte à employer plus de gens pour en alléger la charge de travail. Or, si les entreprises engagent plus de gens cela ne concorde pas avec leurs idéologies de maximisation des profits et de diminutions des coûts. Il s’agit là d’une seconde réalité à laquelle il faut se heurtée et tenter de lutter contre parce que s’attaquer à la colonne vertébrale de l’entreprise est beaucoup plus efficace que d’offrir un certain confort à moyen long terme. Bref, je trouve que la solution de Gabriel Nadeau-Dubois est utopique plutôt que heuristique.

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