Entre le 27 et 29 Septembre a eu
lieu la troisième édition du colloque internationale du GIREPS (Groupe de
recherche interuniversitaire et interdisciplinaire sur l’emploi, la pauvreté et
la protection sociale) avec le sujet « Le travail qui rend pauvre ». Dans
le cadre de ce colloque, une séance a été consacrée aux développements récents
au Québec dans la matière de l’action publique et de la précarité. Cette
séance, structuré par trois présentations sur des sujets différents mais liés
dans la thématique, m’a spécialement marqué par les similarités qui semblent
exister entre mon pays d’origine, la Suisse, et la province du Québec.
Même si ce compte-rendu va se focaliser sur la
troisième présentation de la séance, qui parlait des conditions de travail dans
l’action communautaire autonome, les deux premières vont rapidement être
présentées. La première parlait d’une recherche sur l’aide sociale au Québec et
les questions de stigmate et d’intégration sociale. Les différentes lois sur
l’aide sociale ont été présentées par Diane Gagné, avant que Anthony Desbiens a
discuté un certain nombre de citations des personnes assistées. Malheureusement,
cette dernière partie très intéressante a été limitée par le manque de temps,
ne permettant pas d’aller dans le détail. Indépendamment de ceci, des
similitudes avec la situation suisse se sont montrés. La deuxième présentation
s’intéressait aux conditions de travail des travailleurs immigrants
temporaires, ou les différences ente la situation des travailleurs agricoles
(qui vivent et travaillent en groupe) et celle des travailleuses domestiques
(qui vivent et travaillent de manière isolées) ont été mises en avant par
Martin Gallié. De plus, une discussion théorique autour de la notion du
« travail non-libre » a eu lieu. Vu qu’il n’existe plus de permis de
travail saisonnier en Suisse depuis 1991 (respectivement 2002 pour les
ressortissants de l’Union Européenne) et que les travailleuses domestiques ne
sont pas soumises à des conditions d’immigration différentes que les
travailleurs et travailleuses dans d’autres métiers, l’absence de protection
légale garanti à ces personnes me semble scandaleux dans un pays dit
« développé ».
Maintenant donc sur la troisième et dernière
présentation de cette séance, qui portait le titre « L’action communautaire
autonome au Québec : un portrait des conditions de travail ». Mylène
Fauvel de l’Université de Montréal, Céline Métivier du Réseau québécois de
l’action communautaire autonome (RQ-ACA) et Annik Patriarca de Au bas de
l’échelle (ABE) ont toutes les trois présentées une partie de cette
intervention (ce qui n’as malheureusement pas augmenté la qualité de la
présentation). Dans une première étape, l’action communautaire autonome au
Québec est présentée, avec ~60'000 emplois et plus que 425'000 bénévoles qui
s’y engagent. La majorité des personnes qui y travaillent sont des femmes,
souvent hautement qualifiées (comme c’est aussi le cas en Suisse). Selon
Patriarca, le plus grand problème, comme probablement partout dans le monde
dans le milieu associatif, est le manque de financements (stables) qui ne
permet pas de payer de manière adéquate les employé(e)s ou d’en engager assez pour la charge de
travail qui existe (sans parler du manque de financement pour offrir leurs
services à tout le monde qui en aurait éventuellement besoin). En plus, avec
les politiques d’austérité qui se sont installés les derniers décennies, la
charge de travail pour les différentes associations augmente car la population
précarisée n’a plus accès aux services publiques, tant que le financement
publique n’augmente pas ou que de manière largement insuffisante.
Dans une deuxième partie de la présentation, la
recherche partenariale est rapidement présentée. Les deux buts de la recherche
serait de dresser un portrait des conditions de travail dans l’action
communautaire autonome ainsi que d’analyser les pratiques de gestion à
l’intérieur de ces associations. Malheureusement, au moment du colloque, la
recherche n’est pas encore assez avancée pour pouvoir traiter le deuxième
aspect. La suite de la présentation se focalise donc sur les conditions de
travail dans ce milieux, ou le salaire moyen est de 17,71$/h pour les employés
en temps plein et de 16,27$/h pour les employés en temps partiel, clairement
pas en lien avec le niveau de formation souvent universitaire des femmes qui y
travaillent. En plus, les employé(e)s dépendent fortement du financement
public, si ces derniers sont que de manière temporaire, les contrats de travail
sont aussi des contrats non-permanents. Ceci après semble créer des différences
importantes entre les employé(e)s permanent(e)s et non-permanent(e)s, selon les
panelistes.
En dernière étape ont été rapidement présentées
quelques déclarations des employé(e)s sur les aspects positifs et négatifs du
travail dans ce milieu. Les éléments positifs cités souvent sont donc
l’autonomie au travail, la conciliation travail-famille qui est rendu possible,
et bien sûr les valeurs défendus à travers ce type de travail et l’idée que le
travail qu’on fait chaque jour « a du sens ». Sur l’autre côté, le
manque de financement et la surcharge de travail importante, combiné avec le
fait qu’il n’existe souvent pas un responsable qui distribue le travail, fait
que les employé(e)s prennent souvent une partie de leur travail à la maison et
qu’il n’y a pas de « temps libre » clairement définit. Les panelistes
mettent aussi l’accent sur le fait que ce type de travail est seulement
possible dans des situations économiques spécifiques (si par exemple la jeune
femme habite encore chez ses parents et ne doit pas payer un loyer) et que
beaucoup des employé(e)s regrettent de ne pas pouvoir continuer ce type de
travail dans le long terme.
Il est donc intéressant de voir que dans ce
milieu qui lutte pour le respect des droits des populations précarisées, les
droits des employé(e)s devraient aussi être défendus. Vu que les employé(e)s
sont de manière quotidienne en contact avec des personnes qui sont dans des
situations encore beaucoup plus précaires, il ne semble pas surprenant que
c’est difficile pour eux de lutter pour leurs propres droits. Il serait donc
très intéressant de voir la suite de la recherche sur les stratégies de gestion
dans ce milieux et de voir si la protection des droits de leurs employé(e)s
fait partie de l’agenda ou pas du tout.
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