Toute une
paire de manche attend celui ou celle qui pense pouvoir être en mesure de teindre de syndicalisme ne serait-ce qu’au
minimum une multinationale comme McDonald’s. En effet, l’entreprise semble disposer
des tous les outils à la fois interne (système cellulaire de division des
responsabilités, grandes firmes juridiques à sa solde etc.) et externe (main
d’œuvre malléable et bon marché, zones grises législatives) pour pouvoir se
passer d’être « union-friendly ». Si cette courte entrée de blogue s’attarde
plus à la dynamique qui s’opère au sein même des travailleurs de l’industrie du
fast-food, bien d’autres explications sont toutefois nécessaires à la
quasi-invisibilité du syndicalisme dans ce milieu.
La réalité des travailleurs.
Un facteur
essentiel caractérisant les travailleurs dans l’industrie du fast-food est sans
doute l’hétérogénéité de leur milieu social, allant de donc de pair avec les
différentes motivations qu’ils ont à travailler dans ce milieu. Par exemple,
pour deux personnes occupant un même poste de caissière chez Burger King,
peut-on simplement affirmer qu’Émilie (personne fictive), étudiante au Cégep du
Vieux-Montréal, venant d’une famille à moyen revenu, ne travaillant qu’une
quinzaine d’heures semaine peut être classée en situation précaire au même
titre que Fatima (personne fictive), 41 ans, fraîchement débarquée du Maroc et
ayant 3 enfants à élever? Cette question anodine nous ramène à ce que Guy
Standing mentionnait dans son ouvrage « The Precariat » : nous
n’entrons pas tous de la même manière dans les milieux de travail précaire. Les
caractéristiques multiples entre les travailleurs dans l’industrie du fast-food
constituent un obstacle majeur à leur propre organisation et les employeurs ne
sont bien sûr pas dupes, ils jouent à souhait sur ce terrain qui leur est
avantageux. Or, cette hétérogénéité de la main d’oeuvre dont disposent les
chaînes de fast-food, pervertie à souhait à travers leur politique d’embauche
se targuant d’être des mouvements de « diversité », leur permet en
même temps de tenir les syndicats bien éloignés.
Les différents besoins tournant autour d’un
revenu aussi minime soit-il me laisse donc perplexe quant à la possibilité de
pouvoir introduire une certaine solidarité au sein de cette classe de
travailleurs. Le simple fait de s’impliquer à vouloir, en tant que travailleur,
introduire un syndicat au sein d’une franchise de McDonald’s peut
automatiquement susciter des réactions intérieures aussi diverses que « cool
je vais pouvoir ajouter cela à mes expériences de travail » pour Émilie à,
« vais-je perdre mon emploi et ne pas être en mesure de nourrir ma
famille? » pour Fatima.
Par ailleurs,
une autre réalité majeure qui rend la tâche difficile quant à la syndicalisation
dans l’industrie du fast-food se trouve à être le fort taux de
« turn-over », c’est-à-dire le taux de remplacement des postes le
plus souvent au bas de l’échelle salariale de cette industrie. Certains auteurs
(T. Royle, E. Schlosser) nous apprennent qu’à son plus haut, ce taux peut
atteindre 400% par année ce qui veut dire une nouvelle personne à chaque poste
tous les 3 mois. Cette réalité est en forte contradiction avec le syndicalisme
américain ou canadien, organisé en unité et qui nécessite un vote en son sein
pour continuer à pouvoir exercer des négociations avec le patronat. Or, même du
point de vue des organisations syndicales, se disent-elles qu’il en vaut la
peine de mettre de l’énergie à organiser des travailleurs qui quittent leur
emploi tous les 3 mois, certainement que non.
Enfin, je suis
donc d’avis qu’il existe une certaine mentalité au sein du précariat, une
mentalité individualiste non pas par égoïsme mais par manque de connaissances
sur le pouvoir effectif de la solidarité. Une mentalité qui pousse ainsi l’employé
à quitter son poste une fois à bout pour recommencer un cycle similaire
ailleurs dans un même type d’emploi. Le peu de culture collective qui règne au
sein de cette classe les empêche de penser à organiser leur milieu de travail
au lieu de le quitter le plus souvent qu’autrement sur un coup de tête.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire