lundi 20 novembre 2017

Engageriez-vous une femme enceinte ?

Un article d’Andréanne Chevalier paru le 18 novembre dans Le Devoir se pose la question de l’employabilité d’une femme enceinte et des tabous qui entourent la question. À prime à bord, la question peut soulever un choc pour certains alors que pour d’autres, poser la question c’est y répondre. Cependant, tout ce qui entoure la question de la différence entre les femmes et les hommes sur le marché du travail s’avère être d’une sensibilité. Un directeur d’entreprise interrogé pour répondre à la question dit clairement son point de vue qui va dans le sens d’une incompatibilité entre la période où la femme est enceinte et le fait de postuler pour un emploi. Des arguments comme la perte de temps et le fait qu’il devra engager deux employé(e)s pour combler un seul poste est problématique pour lui. Par ailleurs, il soutient la thèse de plusieurs autres interrogés qui trouvent la question très touchy puisqu’il se trouve dans un dilemme entre son entreprise et l’aspect moral de la question. Un autre directeur soutient que son patron ne serait pas en accord avec la décision d’engager une femme enceinte. Par la suite, des femmes sont aussi interrogées sur la question et leur point de vue est semblable à celui des hommes. Étonnamment, les femmes interrogées ont une tendance vers le scepticisme quant au fait de postuler pour un emploi alors qu’elles sont enceintes. Le fait de débuter un emploi et de devoir abandonner pour un certain moment semble les rendre mal à l’aise et la plupart s’entendre pour dire qu’a la place du patron, elles n’engageraient probablement pas une femme enceinte.
Mais qu’en est-il d’un point de vue légal ? La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse stipule dans l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne que la discrimination fondée sur la grossesse est interdite, notamment à l’embauche. Exercer une telle pratique serait répréhensible de poursuite en justice notamment pour des dommages matériels, moraux et punitifs. En 2003, La Société de l’assurance automobile du Québec a dû dédommager une femme qui avait postulé comme contrôleur routier et elle a réussi à prouver qu’elle n’a pas eu l’emploi puisqu’elle était enceinte. Elle a donc reçu la somme de 37 628,20 $ en plus des avantages sociaux. Un professeur de l’UQAM au Département d’organisation et ressources humaines, Denis Morin, dit que l’embauche de femmes enceintes est une pratique fréquente dans les secteurs syndiqués, les grandes entreprises et la fonction publique. La réticence est plutôt propre à la PME. L’une des hypothèse est le taux de femme travaillant dans ses secteurs qui seraient plus sensibles à la cause.
Les femmes devraient-elles, dans un cas où elles souhaitent travailler pendant leur grossesse, mentionner à leur potentiel futur employeur leur statut ? Pour Denis Morin, l’entrevue est un bon moment pour mentionner à l’employeur le statut de femme enceinte puisque ce serait un moment important quant au contrat psychologique entre l’employé et l’employeur. Cependant, le mentionner en premier lieu n’est pas nécessaire, car une femme ne devrait pas se sentir coupable d’être dans cette condition.
On peut donc affirmer que malgré les avancés sociaux, les différences physiologiques constituent encore une cause des inégalités sociales qui persistent entre les femmes et les hommes. En ce sens, les femmes désirant entamer une nouvelle carrière ou avoir un nouvel emploi et qui sont enceintes se doivent, dans certains cas, faire un choix important puisque trouver un emploi stable et permanent représente un certain défi comparativement à l’homme. On peut donc faire un lien avec la surreprésentation des femmes dans le travail atypique puisqu’il est plus facile pour ses femmes de trouver des emplois temporaires, à temps partiels ou tout simplement un contrat « en attendant ». Encore une fois, la femme est désavantagée sur le marché du travail. Certaines femmes doivent mettre une pause sur leur carrière ou tout simplement reporter le début de celle-ci au détriment de la grossesse.
Par Jérémie Meynard

Lien : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/513322/engageriez-vous-une-femme-enceinte

Aucun commentaire:

Publier un commentaire