" Il faut renforcer les
contrôles. Il faut qu'il y ait, à un moment, une sanction". F.
Rebsamen, ministre français du travail et de l'emploi
Le ministre du travail et de l'emploi, François Rebsamen, déclarait
en septembre que Pôle Emploi (l'agence de recherche d'emploi en France) devait
accroitre le contrôle des chômeurs inscrits sur ses listes. Par là, il entend
sanctionner, donc radier, les individus n'étant pas activement à la recherche
d'un emploi. Selon lui, dans un pays qui tente de se redresser économiquement
"ce comportement n'est pas possible".
Il est plutôt difficile de lire ce genre de déclarations sans
réagir. Pour comprendre la sévérité de ces paroles et pouvoir les commenter de
façon justifiée, il nous faut dans un premier temps dresser le contexte de la
France qui se trouve aujourd'hui dans un état économique et social critique. En
effet, le chômage de masse poursuit inexorablement sa progression et nous
pouvons chiffrer aujourd’hui le nombre de chômeurs de longue durée, qui ne
cesse d'augmenter depuis bientôt dix ans, à presque 2,5 millions, dont la durée
moyenne d'inactivité se chiffre à 532 jours (1).
Nous parlons donc ici d'une société dans laquelle les individus
n'ont plus la force de chercher un nouveau travail. Travail qui, comme nous le
savons, occupe une place centrale dans la vie des individus depuis des
centaines d’années et fait partie intégrante de l'identité individuelle, occupe
le quotidien, procure un revenu mais également un sentiment d'utilité sociale. M.
Rebsamen voudrait donc radier des individus qui ne recherchent plus tout cela. Mais
n’y a t il pas la un paradoxe ? N’est il pas nécessaire de nous poser la
question « pourquoi » ils ne le recherchent plus ?
Nous ne parlons pas d'individus, du moins pour la majorité, qui ne veulent pas travailler pour profiter
du système mais d'individus qui ne veulent
plus travailler. Il s'agit de découragement et de désespoir. La
plupart sont "à bout de
forces", éreintés par les démarches administratives, les refus, les
échecs. Nous savons tous par notre expérience ou celle de notre entourage que
chercher un emploi par l’intermédiaire de ce type d’agence relève d’un
véritable parcours du combattant. Les démarches administratives sont souvent
compliquées par le zèle et la rigidité dont font preuve un grand nombre de
responsables dans les agences. Cela
étant, beaucoup peuvent être découragés par le phénomène du déclassement,
situation dans laquelle l’emploi occupé n’est pas au niveau de sa formation
mais que l’on accepte par besoin de revenus ou tout simplement pour faire
partie à nouveau d’un collectif. Finalement, la plupart des chômeurs qui ne
cherchent plus d’emplois sont simplement découragés. Partant de ce constat, est
il est raisonnable de prendre le problème dans ce sens la ? Ce type de
déclaration n’est-elle pas la preuve que les autorités publiques « attaquent
le problème » par le mauvais côté ? Les syndicats se sont par
ailleurs mobilisés et font savoir leur profond désaccord avec l’idée de
sanctionner les chômeurs qui ne cherchent pas activement du travail. Et pour
cause, à la vue d’une telle déclaration et lorsque l’on connaît la situation du
pays d’un point de vue politique, on pourrait croire qu’il ne s’agit au fond
que de faire baisser les chiffres du chômage après l’échec de la politique de
l’emploi depuis le début du quinquennat. Il semble pourtant qu’il serait plus
raisonnable d’opter pour une procédure d’accompagnement et d’encouragement du
chômeur plutôt que de procéder à une stricte radiation des listes. Face à ce
type de situation, la priorité des autorités devrait être de remobiliser les chômeurs en les rapprochant d’un
conseiller personnel qui pourrait les accompagner dans leur démarche. La
radiation ne devrait alors concerner que les individus fraudeurs donc
l’inactivité est motivée par l’intérêt et le profit.
Enfin, une étude récente de Pôle Emploi a montré que 20% des
personnes inscrites sur ses listes ne cherchaient pas d’emploi (étude menée à Toulon et Manosque auprès de
2600 chômeurs). Il est difficile de tirer une conclusion à une échelle si réduite
mais les chiffres nationaux de l’enquête définitive sortiront ce mercredi. Nous
pouvons déjà prévoir qu’ils ne seront pas brillants. Si le constat national se
révèle être le même que le résultat local, se posera alors la question des
moyens qu’il faudra mettre en place pour effectivement renforcer le contrôle
des chômeurs.
Source de l'article : http://www.huffingtonpost.fr/2014/09/02/controle-chomeurs-francois-rebsamen-rappel-loi_n_5752900.html?utm_hp_ref=chomage
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