La
rentrée parlementaire aura finalement lieu aujourd'hui après l'
«habituelle» prorogation du parlement canadien qui a durée plus
d'un mois cette fois-ci. Deux projets de loi attirent
particulièrement mon attention en cette rentrée. Pour débuter, le
projet de loi C-377 sera vraisemblablement voté pour une seconde
fois à la chambre des communes après avoir été amendé par le
Sénat1.
Rappelons que ce projet de loi vise à ce que les syndicats ainsi que
les sections locales produisent un rapport financier détaillé
annuel et que ce dernier soit rendu public. Les membres ont déjà
accès aux états financiers de leurs syndicat, droit qui leur est
accordé à la fois par le code du travail (art 47.1) et le code
canadien du travail (art. 110). Cependant, cette loi irait au delà
de cette obligation en rendant certaines informations stratégiques
aux mains des employeurs et des organisations antisyndicales.
Le
parcours quelque peu prévisible – vu le contexte majoritaire du
parlement actuel- du projet de loi C-5252
mis de l'avant par le député conservateur Blaine Calkins le 13 juin
dernier sera aussi à surveiller durant cette session parlementaire.
L'adoption de ce projet de loi aurait comme conséquence de changer
la procédure d'accréditation d'un syndicat3.
Si en ce moment la signature de cartes de membre d'une majorité
absolue de salariés visés par l'accréditation suffi grosso modo à
ce qu'un syndicat soit accrédité, la situation serait fort plus
complexe et tumultueuse dans l'avenir. En effet, le projet de loi
vise à modifier le ratio de signataire de carte de membre à 45%
tout en obligeant la tenu d'un scrutin de représentation secret dont
les résultats prouvent que la majorité des employés de l'unité
désirent bel et bien être représentée par le syndicat. Ceci
étant, un salarié ne votant pas serait de facto considéré comme
étant contre la syndicalisation. Parions qu'un tel schème de pensé
n'inspirera pas une réforme des élections au fédéral ou le
Premier Ministre actuel a été élu avec 39,6% des voies des 61.4%
des citoyens s'étant prévalus de leur droit de vote4.
Par
ailleurs, cette loi ouvrirait aussi la porte à une campagne de
syndicalisation où les syndiqués militants en sa faveur
s'exposeraient à un certain risque. Dans les faits, le processus
d'accréditation se déroule actuellement dans le secret pour éviter
toute forme de représailles et de contre-attaque de la part de
l'employeur. Il s'agit d'une peur légitime si l'on se fie à une
étude de 2002 selon laquelle 29% des employeurs ont entrepris des
mesures de représailles envers des employés à la suite d'une
demande d'accréditation et ce, malgré la protection à cet effet
qui leur est accordée en vertu de l'article 15 du code du travail.
Il est donc possible d'anticiper de futurs obstacles à la
mobilisation des travailleurs voulant se syndiquer. Le fait que le
taux de syndicalisation ait baissé significativement dans les
provinces canadiennes depuis qu'elles ont adopté un tel changement
législatif5
soutien cette hypothèse.
Le
portrait dressé précédemment des deux projets de loi mis de
l'avant par le gouvernement conservateur ne sont que deux mesures
parmi d'autres visant le démantèlement progressif des syndicats au
pays. Elles font en effet suite à la réduction des avantages
fiscaux consentis aux fond des travailleurs par exemple. Ces mesures
permettent d'anticiper la vraisemblable abolition de la formule Rand
dans la forme ou elle se trouve actuellement. Une telle atteinte
priverait les syndicats de ressources financières importantes
limitant ainsi drastiquement leur moyens d'action social. La réforme
du code du travail a un impact non négligeable sur l'avenir des
syndicats au pays et c'est pourquoi les citoyens doivent s'en
préoccuper et se mobiliser en conséquence.
Historiquement,
les syndicats ont d'abord été décriminalisés dans l’après
guerre dans l'optique d'atteindre une paix industrielle puisqu'ils
étaient avant tout perçu comme étant un outil d'expression des
salariés. C'est dans ce contexte qu'est apparu le compromis salarial
fordiste. En tant que promoteur de l'intérêt publique, l'État
avait comme visé d'équilibrer le rapport de force entre les parties
via la législation. Aujourd'hui cette vision a drastiquement changée
et le compromis qui existait jadis n'en est plus un. Les syndicats
sont d'avantage perçus comme étant un monopole, c'est a dire une
force qui va à contre courant des dictas du marché. Selon ce point
de vue, les syndicats sont créateur de chômage en augmentant les
salaires pour une portion de salariés au delà de celui qui
prévaudrait autrement. Bref, cette vision dominante explique la
volonté de l'État à intervenir pour que le rapport de force des
syndicats soit affaibli et que le marché puisse de nouveau être
maître chez nous.
1C
377, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (exigences
applicables aux organisations ouvrières), 1e sess, 41e lég,
Canada, 2011 (3ieme lecture au Sénat le 26 juin 2013).
2C
525, Loi modifiant le Code du travail, la Loi sur les relations de
travail au Parlement et la Loi sur les relations de travail dansla
fonction publique (accréditation et révocation-agent négociateur),
1e sess, 41e lég, Canada, 2013 (dépôt et première lecture à la
Chambre des communes le 5 juin 2013).
3
Martin, Sylvain. Avec C-525, Harper veux rabaisser les
travailleurs au rang d'outils de production, L'aut'journal,
14 juin 2013. Document consulté en ligne :
http://lautjournal.info/default.aspx?page=3&NewsId=4722
4
Les résultats, élection 2011,
Radio-Canada, le 3 mai 2011. Document consulté en ligne:
http://elections.radio-canada.ca/elections/federales2011/les_resultats/
5Charbonneau,
Claudette. Vote à scrutin secret: mise à niveau ou ouverture
aux tactiques antisyndicales?, CSN, 21 septembre 2009. Document
consulté en ligne:
http://www.csn.qc.ca/web/csn/lettre/-/ap/Lett21-09-09
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