mercredi 23 octobre 2013

Du changement dans l’industrie textile au Bangladesh ?



Plusieurs mois après l’effondrement de l’usine Rana Plaza, les ouvriers du textile du Bangladesh sont en voie de réaliser un gain dans leur lutte pour l’obtention de meilleures conditions de travail, en effet une hausse des salaires minimums est attendu d’ici un mois au Bangladesh1. Deuxième exportateur de produits textiles après la Chine, le Bangladesh est reconnu pour le faible coûts de sa main-d’œuvre et ce même par rapport aux autres pays asiatiques, il est en effet deux fois moins élevés qu’au Vietnam et quatre fois moins qu’en Chine. Ces faibles coûts de production se font cependant au détriment du bien-être des travailleurs de cette industrie qui gagnent actuellement aux alentours de 40$ par mois. L’effondrement de l’usine de textile Rana Plaza au mois d’avril qui avait fait plus de milles morts avait justement révélé au monde les conditions de travail misérables de ces travailleurs forcés à travailler malgré les apparentes fissures dans le bâtiment. Cette tragédie terrible a entraîné alors la grogne des travailleurs qui ont entrepris une série de manifestations et de grèves qui secouent le pays depuis. Des manifestations importantes réunissant plusieurs milliers de travailleurs avaient notamment eu lieu à la fin du mois de Septembre suite au refus des propriétaires d’usine d’augmenter les salaires de plus de 20 %2. Les ouvriers réclamaient plutôt une augmentation du salaire minimum afin qu’il atteigne environ 108 dollars par mois soit plus du double du montant actuel affirmant du même coup qu’ils n’arrêteront pas leur mouvement de grève et de protestation si le salaire minimum n’atteint pas au moins 80$ par mois. Le gouvernement pourrait cependant décider de trancher le litige en imposant aux patrons un salaire minimum de 60 à 73$ soit une augmentation de 50 à 80 % par rapport à aujourd’hui.


Les patrons de l’industrie textile mettent en garde contre une augmentation des salaires trop rapide qui diminueraient leur compétitivité face aux autres exportateurs de textile en ces temps de récession mondiale surtout que le textile représente 80 % des exportations du pays, les ouvriers profitent cependant d’un rapport de force qui leur est plus favorable depuis les derniers mois. En effet, l’attention internationale portée aux conditions de travail des ouvriers du textile depuis l’effondrement de l’usine de textile du Rana Plaza qui fabriquait des vêtement pour entre autre les compagnies Wal-Mart et Joe Fresh, place le gouvernement et les multinationales dans une situation délicate auprès de l’opinion publique nationale, mais aussi internationale. Ce facteur pourrait être un élément déterminant pour le mouvement ouvrier au Bangladesh et pourrait mené à des gains plus substantiels que ceux réalisés en 2010, malgré des années de mobilisations. Des mouvements de mobilisation semblables avaient aussi émergés dans d’autres pays exportateurs de textile comme en Chine, mais aussi au Vietnam et au Cambodge où les grèves et manifestations de grandes ampleurs se sont multiplier3. Cette conjoncture dans la mobilisation des travailleurs du textile asiatique combinée à une attention internationale plus grande sur le sort des travailleurs de cette industrie pourrait peut-être changer la donne dans l’industrie du textile en mettant une pression pour l’amélioration des conditions de travail de ces ouvriers qui viendrait compenser la pression qu’exercent les multinationales pour constamment faire baisser leur coût de production.


Reste maintenant à voir si les augmentations de salaire qui seront annoncés prochainement seront une simple mesure pour tenter de diminuer les pressions internes et externes ou s’ils annonceront le début d’un réel changement pour les ouvriers du textile du Bangladesh. L’amélioration des conditions de travail des ouvriers du textile doit aussi passer par une meilleure règlementation de ce secteur par le gouvernement. En effet, les mesures de sécurité devraient être mieux appliquées afin d’éviter de nouvelles catastrophes comme celle du Rana Plaza. Ce ne sera toutefois pas facile puisque le réseau étendu de sous-traitance rend difficile la reddition de comptes et l’imputabilité des grandes compagnies du textile4. Même avec ces changements et les augmentations de salaires proposées, les salaires au Bangladesh resteront dans les plus bas en Asie et les conditions de travail très difficiles. Les ouvriers du Bangladesh comme ceux des autres pays asiatiques n’ont donc pas fini de lutter pour s’assurer des conditions de travail décentes et dignes.

Dominic Durocher

1 commentaire:

  1. Plus de 6 mois après la tragédie de l'usine textile Rana Plaza qui a couté la vie à 1129 travailleurs, les entreprises qui ont promis de l'aide aux familles des victimes n'ont toujours rien apporté. Les ouvriers continuent de sortir dans les rues pour recevoir une hausse salariale mais aussi une aide monétaire compensatoire aux familles des victimes.

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