samedi 30 septembre 2017

Les robots, nouveaux bourreaux des droits de l'homme ?


  « L’essayer, c’est l’adopter » : si ce slogan que l’inconscient collectif s’était habitué à lire dans les campagnes publicitaires ultra-sexistes pour les robots ménagers des années 50, il est aujourd’hui utilisé pour parler de robots « humains », destinés à remplacer nos mains d’œuvre dans les usines.  En effet, selon une étude de la Fédération internationale de la robotique, on prévoit d’ici 2020 une arrivée de plus de 1,7 millions de robots dans tous les secteurs industriels confondus à travers le monde. Mais cette avancée fulgurante pose plusieurs problèmes, notamment sur les plans éthiques et entrepreneuriaux : que vont devenir les salariés remplacés par les nouveaux « joujoux » des chefs d’entreprises ? Comment le monde de l’industrie va-t-il évoluer alors qu’il semble déjà être plus rapide et efficace que jamais ?

  Si l’on prend le point de vue d’un directeur d’usine français interviewé par le Monde, l’investissement de ce robot profite non seulement au rendement économique de l’entreprise, mais aussi à faciliter la vie des employés : en effet, il déclare que les ouvriers remplacés par les bras artificiels sont affectés à d’autres activités, et qu’ils n’ont plus à fournir d’efforts spectaculaires pouvant nuire à leur santé. Pour autant, les détails ne sont pas donnés sur la nature des postes qu’ils occupent dorénavant, et on peut donc comprendre, si on lie entre les lignes, que cette « révolution des robots » est surtout intéressante pour les gains de productivité, mais sans doute beaucoup moins sur le plan social. Des ouvriers ayant été habitués toute leur vie à un certain cadre de travail doivent, du jour au lendemain, abandonner leur poste et apprendre de nouvelles techniques. On suppose que le salarié doit être stable psychologiquement : tous les efforts fournis pendant des dizaines d’années pour le bien de l’entreprise sont remplacés par des « êtres supérieurs », plus forts, plus rapides et jamais malades. Comment garder une reconnaissance de soi positive et se sentir utile et méritant ? Le salarié doit en effet se trouver dans une position d’aliénation totale face à l’entreprise : un changement de poste engendre de gros efforts d’apprentissage, mais dans le cadre d’une affectation comme celle-ci, le salarié doit se demander si son nouveau poste ne sera pas à son tour remplacé par une nouvelle machine. On peut donc en déduire que cela doit être une réelle source de stress : combien de temps va-t-il lui rester jusqu’à ce que tout soit robotisé et donc jusqu’au licenciement ?

  L’autre aspect important de l’industrie robotique est celui du rôle de la Chine. En effet, « avec l’installation d’environ 87 000 robots industriels en 2016 », les fournisseurs de robots chinois explosent les ventes à l’international et placent leur pays dans les premiers du marché mondial de la robotique. La main d’œuvre chinoise étant devenue moins intéressante que la main d’œuvre vietnamienne ou sri-lankaise, on la remplace par des robots en tout genre afin de réacquérir une compétitivité indétrônable à l’international. Ici se pose le problème des licenciements de masse dans les entreprises chinoises : environ 100 millions d’ouvriers chinois sous-payés risquent de se retrouver au chômage dans les 10 prochaines années. « Notre but est que 80% des emplois dans les usines soient remplacés par des robots » déclare une employée de la ville de Foshan. La situation politique de la Chine ne permet pas aux citoyens de réclamer une sécurité sociale et salariale descente, comme ça a été le cas dès le début du 20e siècle en Europe, et notamment en France. On place en second plan la question de ce qu’il adviendra des salariés après l’installation de robots dans les usines ou les restaurants. Si l’on ne parle que de l’aspect sociologique de cette « révolution des robots » en Chine, on remarque qu’elle représente la souffrance et l’insécurité dans laquelle des milliers d’ouvriers chinois vivent chaque jour. On peut prendre l’exemple troublant de l’entreprise Foxconn, un fournisseur d’Apple qui a « supprimé 60 000 emplois dans une de ses usines », au profit des robots. De plus, cette entreprise est réputée pour offrir à ses salariés des conditions déplorables de travail.
Pour conclure, on fait face à de réels enjeux sociaux et psychologiques chez les employés de ce genre d’entreprises, chez qui les taux de suicide étaient déjà importants avant que s’ajoute le stress du licenciement dû à l’arrivée fulgurante des robots. On peut plaider en faveur de la robotisation des entreprises en préférant le chômage aux conditions de travail déplorables, mais là aussi on met les individus dans des situations précaires, ainsi que le développement économique des pays. « L'utilisation des robots dans le secteur industriel vise à enrichir la Chine, soit. Mais il pourrait aussi créer l'effet inverse pour les 100 millions d'ouvriers qui travaillent dans les usines du pays. »

Margaux FARY
SOL2015

Références :  
 

Cosnard, Denis. 2017. « La « révolution des robots » s’impose dans les usines », Le Monde, en ligne :

VIPress. 2017. « 1,7 million de nouveaux robots pour transformer les usines dans le monde d’ici 2020 », VIPress.net l’électronique au quotidien, en ligne : http://www.vipress.net/17-million-de-nouveaux-robots-transformer-usines-monde-dici-2020/ (consulté le 30.07.2017)

Côté, Yvan. 2016. « La révolution des robots arrive en Chine », Radio-Canada, en ligne :

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