lundi 10 décembre 2018

Retour sur le programme « Objectif Emploi » et le 15$ de l’heure par le ministre du travail, Jean Boulet.


Dans un article du Devoir, Isabelle Porter fait un retour sur Objectif Emploi, un programme lancé en 2017 par le gouvernement libéral et qui « vise à ramener les nouveaux prestataires de l’aide sociale sur le marché du travail ».[1] Ce dernier a subi plusieurs critiques à son lancement en avril en raison de sa nature coercitive. En effet, en acceptant ou en refusant de s’engager dans le programme, les nouveaux prestataires peuvent recevoir des prestations (allant jusqu’à 240$/mois) supplémentaires ou, au contraire, des pénalités (allant jusqu’à 224$/mois).[2] Selon ce que l’article révèle, seulement 0,6% des participants ont eu des pénalités de 56$. Le programme a d’ailleurs compté beaucoup moins de participants que prévus (3526 plutôt que 17 000). Aussi, le nouveau ministre de la du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet, est favorable à l’augmentation du salaire minimum, mais est réticent au 15$/heure. Le ministre craint effectivement que les PME en souffrent et licencient de leurs employés, en particulier des jeunes.
Tout d’abord, il est possible de s’interroger sur les raisons d’un aussi faible niveau de participation au programme Objectif Emploi. Les critiques émises ont-elles découragées d’éventuels participants ne voulant pas s’exposer à tant de pression? Ce genre de programme suggère aussi que les bénéficiaires de l’aide sociale ne mettent pas suffisamment d’efforts dans la recherche d’emploi. Or, certains sont dans l’impossibilité de travailler si, par exemple, leur état de santé ne le permet pas. On leur octroie alors le statut de « Avec contraintes temporaires » et donc une allocation supplémentaire.[3] Comme le révèle certains cas, il peut parfois être ardu de faire reconnaître ce statut.[4] Beaucoup d’autres facteurs peuvent entrer en ligne de compte dans le montant alloué, mais une personne seule et sans contraintes n’obtient que 633$ par mois (contrairement au 648$ indiqué dans l’article, sauf erreur de ma part).[5] Ce montant est, comme on peut s’en douter, très peu enviable. Cela ne veut pas dire pour autant que les prestataires devraient se tourner d’emblée vers des emplois au salaire minimum.
En ce sens, le ministre Boulet semble se contredire en reconnaissant qu’il est effarant qu’autant de québécois travaillent à moins de 15$ de l’heure (760 000 selon l’article), mais en étant plus ou moins disposé à en faire le salaire minimum.[6] Doit-on en comprendre qu’il s’agit d’une augmentation enviable, mais pas pour n’importe qui, ni au détriment des PME? Selon le site internet Minimum 15$ contredisent l’affirmation selon laquelle ne peuvent se permettre cette hausse. Celui-ci souligne toutefois que l’augmentation devrait être graduelle.[7]
Enfin, pour un bénéficiaire de l’aide sociale, un emploi au salaire minimum peut sembler intéressant au court terme, en comparaison à la prestation mensuelle de 633$, mais au long terme, ça l’est moins. C’est surtout le cas sans une augmentation du salaire minimum à 15$. Les pressions exercées envers les prestataires les poussent-ils alors à accepter des emplois au salaire minimum dans le but de faire cesser une telle coercition et éviter l’obtention de pénalités?

Par Samantha Duchesne 
BIBLIOGRAPHIE

Emploi Québec, « Nouveaux montants de prestations », Programme d’aide sociale et
Programme de solidarité sociale, décembre 2012. http://www.emploiquebec.gouv.qc.ca/fileadmin/fichiers/pdf/Publications/00_nouv-montants-prestation_2018.pdf
Minimum 15$, Mythes et réalités, Québec, 2018.
https://www.minimum15.quebec/mythes-et-realites/
Porter, Isabelle. « Objectif Emploi : peu de pénalités données ». Le Devoir, 5 décembre
Radio-Canada, « Objectif Emploi : un programme controversé pour les prestataires d’aide
sociale », Radio-Canada, 2 avril 2018. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1092336/objectif-emploi-programme-controverse-prestataires-aide-sociale


[1] Isabelle Porter, « Objectif Emploi : Peu de pénalités données », Le Devoir, 5 décembre 2018, https://www.ledevoir.com/politique/quebec/542898/aide-sociale-objectif-emploi-peu-de-penalites-donnees
[2] Radio-Canada, « Objectif Emploi : un programme controversé pour les prestataires d’aide sociale », Radio-Canada, 2 avril 2018, https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1092336/objectif-emploi-programme-controverse-prestataires-aide-sociale
[3] Emploi Québec, « Nouveaux montants de prestations », Programme d’aide sociale et Programme de solidarité sociale, décembre 2012. http://www.emploiquebec.gouv.qc.ca/fileadmin/fichiers/pdf/Publications/00_nouv-montants-prestation_2018.pdf
[4] Radio-Canada, « Objectif Emploi : un programme controversé pour les prestataires d’aide sociale », Radio-Canada, 2 avril 2018, https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1092336/objectif-emploi-programme-controverse-prestataires-aide-sociale
[5] Emploi Québec, « Nouveaux montants de prestations », Programme d’aide sociale et Programme de solidarité sociale, décembre 2012. http://www.emploiquebec.gouv.qc.ca/fileadmin/fichiers/pdf/Publications/00_nouv-montants-prestation_2018.pdf
[6] Isabelle Porter, « Objectif Emploi : Peu de pénalités données », Le Devoir, 5 décembre 2018, https://www.ledevoir.com/politique/quebec/542898/aide-sociale-objectif-emploi-peu-de-penalites-donnees

Aucun commentaire:

Publier un commentaire